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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Daniel Cordier
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contrevérités ? Je ne suis pas au bout de mes surprises.

    Dans Combat et Libération (zone libre), un même
communiqué m’informe que « les bruits les plus
divers et les plus calomnieux circulent au sujet de
leurs relations ». Sans doute est-ce une retombée de
l’affaire Pucheu, que m’a révélée Yvon Morandat. Il
ajoute qu’ils poursuivent les mêmes buts, sont animés du même idéal et « reconnaissent le général de
Gaulle comme chef et symbole de la Résistance en
France ». Pour lever toute équivoque, Libération va
même jusqu’à titrer un article : « Les troupes du
général de Gaulle sur le sol de la patrie ».

    Dans Combat , un titre-programme marque avec
encore plus d’éclat son adhésion à de Gaulle : « Tous
avec de Gaulle, premier résistant de France ». À
grand renfort de citations, le journal affirme que le
Général adhère à l’idéal républicain et qu’il souhaite
une République rajeunie « de fond en comble par
l’épreuve » : « [A]vec lui, le pays retrouverait une
République ardente, humaine, véridique. » Oui, je
rêve.

    Mardi 1 er  septembre 1942

     

    Imprudence à tout-va

    Ce soir, je dîne avec Paul Schmidt. Je lui dis sans
tarder ce que j’ai sur le cœur : « Ça fait un mois que
je suis en France, et je suis sidéré par les imprudences dont je suis quotidiennement le témoin. Les
résistants sont fous ! Nous finirons tous en caisse.
Si le BCRA savait ce qui se passe, il n’enverrait plus
aucun agent.

    — Tu as mis un mois à t’en apercevoir ?

    — Non, j’avais peur à chaque rendez-vous, mais
je n’osais pas en parler.

    — Et maintenant tu fais comme tout le monde,
comme moi ! Les prudents ne “rentrent” pas dans
la clandestinité. Crois-tu que nous n’étions pas fous
pour nous engager, en juin 1940, avec de Gaulle ?
C’est parce qu’il n’y a personne dans ce que l’on
appelle pompeusement la Résistance que nous sommes tous imprudents. »

    Il a raison, je me conduis comme les autres militants : tous mes rendez-vous se tiennent place
Bellecour ou place des Terreaux, comptant sur la
démesure de la place pour me rendreinvisible 11 ,mes déjeuners et dîners dans les mêmes restaurants.
Pis, je n’y fais même plus attention. Parfois, je
m’interroge pour savoir ce que * Rex penserait de
moi s’il connaissait ma « vraie vie ». C’est ma seule
crainte, plus prégnante que celle du BCRA ou même
de la police.

    Dès le retour du patron, nous dînons avec
Georges Bidault, qui m’avait réclamé un rendez-vous d’urgence avec * Rex : « C’est très grave. » Les
propos de Bidault justifient l’urgence. Depuis le
début du mois d’août, et tout récemment encore,
les 23 et 24 août, des Juifs d’origine étrangère sont
arrêtés et expédiés en Allemagne. À Lyon même,
des événements se déroulent, sans que j’en reçoive
le moindre écho.

    Selon ses correspondants à Vichy, l’opinion — dans
la mesure où elle est informée par le bouche-à-oreille
ou les radios étrangères — commence à s’émouvoir.
Mgrs Saliège, archevêque de Toulouse, et Théas,
évêque de Montauban, ont fermement condamné
cette répression dans leurs lettres pastorales, lues
en chaire par les curés des diocèses.

    Bidault communique les textes à * Rex, qui en
prend connaissance : « Par leur courage, ils rachètent la conduite des autres.

    — Vous voyez, dit Bidault, il ne faut jamais
désespérer, même de l’Église. »

    On signale, en zone occupée, quatre mille enfants
juifs rassemblés à Pithiviers et Drancy. Les Allemands
ont ordonné de les expédier en Allemagne après
leur avoir enlevé leurs papiers d’identité. Bidault
ajoute qu’en dépit des protestations du grand rabbin
de France et du pasteur Boegner, Vichy va céder
aux Allemands. En l’écoutant, je me souviens que,
quelques jours auparavant, une information parue
dans Le Populaire évoquait les mesures antisémites
de la zone occupée : les policiers français avaient
arrêté des familles entières en séparant les hommes, les femmes et les enfants. Ce rapt d’enfants est
à mes yeux la preuve de la barbarie « teutonne » 12 .

    L’archevêque de Toulouse a raison de condamner
les auteurs de ce crime et de prêcher la tolérance à
l’égard des Juifs pendant l’Occupation. Je me sens
concerné personnellement : la guerre des nazis
impose à un chrétien de pardonner à ces hommes
d’avoir

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