Alias Caracalla

son compte des contacts politiques et syndicaux en zone sud.

    Fort de ces précisions, * Rex relate leur entrevue,
au cours de laquelle * Francis s’est montré surpris que
la réorganisation de la direction de la Résistance ne
lui attribue aucune fonction.

    En retour, Manuel fait part à * Rex des relations
du BCRA avec * Francis avant son arrestation : « Lors
de son premier voyage, il nous a demandé de lui
confier une mission d’organisation politique concernant les deux zones, tandis que vous seriez cantonné
dans une mission purement militaire auprès des
mouvements. Nous n’avons pas donné suite à sa
demande et lui avons confirmé que vous seul représentiez le Général avec tous pouvoirs sur la zone
sud. Au cours de son séjour à Londres, il nous a
semblé prétentieux et surtout soucieux de jouer un
rôle de premier plan dans la Résistance. »

    *Rex complète le tableau. *Francis a repris le projet des socialistes et de * Froment d’un comité politique regroupant mouvements, partis et syndicats.*Rex justifie de nouveau son veto : « La Résistance
est l’armée des martyrs. Je refuse d’y introduire des
partis politiques qui se sont déshonorés en juillet
1940 et ont disparu. Par ailleurs, les Français ont
évolué. Autour de quelle idéologie formeront-ils les
nouveaux partis ? Tout le monde l’ignore. Seuls les
mouvements de résistance de différentes tendances
ont droit à la parole. »

    Il demande à Manuel d’user de son autorité pour
faire entendre raison à * Francis et aux socialistes.
Le commandant est dubitatif : * Villiers 24  a refusé toute
négociation au sujet de son propre projet de Comité
exécutif de la Résistance et poursuit ses consultations en vue de sa formation.

    Manuel espère seulement que la réunion qu’il a
organisée demain entre * Rex et le groupe * Froment
mettra un terme à ces divergences de vues.

    Vendredi 11 décembre 1942

     

    Réunion avec les socialistes

    La réunion prévue avec * Froment et ses adjoints,
les jeunes avocats marseillais * Danvers et * Brémond
et le colonel * Veni, chef des groupes paramilitaires
du réseau, accompagné de * Tourne 25 , ancien député,
se tient chez le député socialiste du Nord Raymond
Gernez.

    J’accompagne * Rex et Manuel dans les vieilles
rues derrière la place des Terreaux. Nous pénétronsdans un immeuble ancien. L’appartement possède
de hauts plafonds et des pièces spacieuses.

    Le propriétaire nous fait entrer dans sa chambre.
Des chaises sont installées autour d’un guéridon.
Un lit se dresse dans une alcôve. Derrière un paravent, j’observe une table de toilette avec un pot à
eau dans sa cuvette en porcelaine décorée.

    À l’exception de Gernez et * Danvers, je ne connais
personne. Bien que je corresponde depuis quelque
temps avec * Froment, je le découvre parmi lesparticipants 26 . Comme d’habitude, * Rex, après m’avoir
présenté, demande aux uns et aux autres d’organiser après la séance des liaisons rapides avec lui par
mon intermédiaire.

    C’est l’assemblée la plus nombreuse à laquelle
j’assiste. Je n’ai participé jusque-là qu’à des repas
ou des rendez-vous limités à une ou deux personnes.
Aujourd’hui, il s’agit d’une réunion exceptionnelle,
avec plusieurs hommes politiques n’appartenant pas
à la Résistance homologuée.

    Aucun ordre du jour n’a été préparé, et il n’y a
pas de présidence. Comment * Rex va-t-il se faire
entendre ? Je m’installe en retrait, face à * Brémond,
*Danvers,*Froment 27 , *Rex et Manuel, tandis que
Gernez, * Tourne, * Veni et l’autre Froment me tournent le dos.

    Au cours des présentations, j’observe attentivement les participants. * Rex et Manuel en connaissent quelques-uns. Détendu, * Rex a un mot aimablepour chacun. Lorsque tous sont assis, Manuel donne
la parole à * Rex. Celui-ci leur souhaite la bienvenue
à Lyon, comme si c’était lui qui les invitait — je sais
pourtant que, jusqu’à la demande transmise par
Manuel, il avait toujours refusé de les rencontrer.

    *Rex précise l’objet de la réunion : examiner la
place du réseau * Froment dans la Résistance, ainsi
que le projet de Comité exécutif proposé par le CAS
(Comité d’action socialiste). Il rappelle qu’il a déjà
étudié avec * Froment, au mois de juin, un projet
similaire, qu’il a refusé. Sa position n’a pas changé :
l’objectif des résistants est l’organisation de la libération