Amy, ma fille

service.
    Comme d’habitude, elle a haussé les épaules en répondant :
    — Ouais, ouais, papa.
    Les journaux mentionnaient également la drogue, mais je ne les ai pas crus une seule seconde.
    En mars 2004, au cours de la promotion de Frank , Amy avait participé au quiz musical hebdomadaire et irrévérencieux de la BBC2 : Never Mind the Buzzcocks . Ç’avait été un succès, Amy était très drôle et avait fait rire le public. En novembre 2006, pour la promotion de Back in Black , l’émission l’a invitée une fois de plus. Son look était tellement unique que les caméras l’adoraient et on voyait sa photo partout.
    De longues heures se sont écoulées entre l’arrivée d’Amy dans le studio et le début de l’enregistrement de l’émission. Pour tromper l’ennui, elle a bu. Quand ils ont commencé, elle était ivre. Elle a fait de bonnes blagues pendant cette émission, mais avec le recul, je comprends que sa réputation sulfureuse est partie de là.
    Elle était dans l’équipe du comique Bill Bailey. Elle a tout de suite accroché avec le présentateur, Simon Amstell, qui l’a présentée comme ça :
    — La première invitée de Bill est Amy Winehouse, la « Juive du jazz » qui a remporté un Ivor Novello. Amy aime Kelly Osbourne et l’odeur de l’essence. Moi j’aime bien les allumettes. Déjeunons ensemble !
    Amy a sorti sa première blague quand Penny Smith, la présentatrice de GMTV qui était dans l’équipe adverse, a désigné sa coiffure en lui demandant si c’était vraiment ses cheveux.
    — Bien sûr que oui, a répondu Amy. C’est les miens puisque je les ai achetés.
    Peu après, Amy a demandé à Simon de remplir son verre et celui-ci a refusé, ce qui a donné lieu à des plaisanteries bon enfant. Elle a annoncé qu’elle retrouvait Pete Doherty le soir même pour composer une chanson.
    — Non ! a bondi Simon. Il va vouloir vous vendre de la drogue ! Ne l’approchez pas ! Faites plutôt un duo avec Katie Melua. Ça, c’est bien !
    — Je préférerais choper le sida des chats, merci, a-t-elle répondu.
    Quand est arrivée l’épreuve de l’« intro » dans laquelle deux joueurs doivent faire découvrir à leur partenaire une chanson en chantant l’intro, Amy s’est levée en faisant « Psssh ».
    — Pourquoi vous faites ça ? a demandé Simon Amstell.
    — Je sais pas, c’est mon nouveau truc, a-t-elle répondu.
    Simon a enchaîné du tac au tac :
    — Ah bon ? Pourquoi « Psssh » et pas… « crack » ?
    Amy n’a pas relevé l’allusion mais a continué :
    — Euh, est-ce que je ressemble à Russell Brand ?
    Puis elle s’est caché la tête dans les mains en faisant mine d’être horrifiée.
    — Oui ! a répondu Simon.
    En se rasseyant, elle a bu une gorgée d’eau puis s’est retournée pour cracher derrière elle.
    — On n’est pas sur un terrain de foot, a commenté Simon. Vous venez là, et en plein milieu, crack !, vous vous mettez à cracher partout… !
    Amy a répondu sur un ton volontairement suppliant :
    — Oh, arrêtez, arrêtez ! S’il vous plaît !
    — Ce qu’il faut arrêter, c’est cette addiction… Ce n’est même plus un jeu, là, Amy… c’est un rappel à l’ordre !
    Amy a éclaté de rire et m’a confié plus tard que c’était la réplique la plus drôle de l’émission. Je crois qu’elle aimait bien Simon Amstell. Elle l’a laissé lui faire des remarques qu’elle n’aurait jamais acceptées de la part de quelqu’un d’autre.
    Le lendemain, je suis allé la voir.
    — Tu sais, tu ne devrais vraiment pas boire quand tu travailles. Tout le monde voyait que tu étais saoule, c’était gênant.
    Nous nous sommes disputés.
    — Tu sais pas de quoi tu parles, papa. Tout le monde rigolait.
    — Ils riaient de toi, pas avec toi.
    — Regarde les émissions une deuxième fois, papa, tu verras.
    — Mais j’ai raison : il faut que tu arrêtes de boire.

7
    « Un mélange entre
 Ronnie Spector
 et la fiancée de Frankenstein »
    Début 2007, Back to Black était numéro un au Royaume-Uni et nous avons organisé une fête pour célébrer l’occasion. Amy a bu plus qu’elle n’aurait dû mais tout le monde était si heureux du succès de l’album que je n’ai rien dit.
    — Bravo ma chérie !
    — Tu es fier de moi, papa ?
    J’avais du mal à croire que ma talentueuse fille avait besoin de me poser cette question.
    — Toujours, ma chérie. Je suis