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Antidote à l'avarice

Antidote à l'avarice

Titel: Antidote à l'avarice Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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souvenir.
    — Dans ce cas… ça épargnera à l’un des palefreniers de le tenir. Et je suis sûr que son maître n’y trouvera rien à redire.
    L’étalon fut surpris par l’éclat de rire général et fit un écart loin de la foule. Le palefrenier accourut pour le saisir par la bride, mais une voix l’en empêcha.
    — Attends. Voyons ce que ce garçon sait faire.
    Le sergent regarda attentivement Yusuf calmer le cheval et le mettre au pas près de la mule de son maître.
    — Cet enfant a dit vrai. En route, messires, une longue journée nous attend.
    Il avait à peine fini de parler que sa propre monture franchissait la porte du monastère et s’engageait sur la route de Barcelone.
     
    Le chemin qui s’offrait à eux était assez fréquenté et il semblait improbable qu’ils puissent rencontrer des problèmes ; c’est pourquoi seuls deux gardes les escortaient, dont l’un était entièrement voué à la surveillance de Sor Agnete. Deux autres étaient partis avec l’évêque, et le capitaine avait assigné les deux derniers à la surveillance du train de chariots.
    — Nous rattraperons bientôt nos compagnons, maître Isaac, dit la voix plaisante du sergent. Trouvez-vous votre mule à votre goût ?
    — C’est une bonne bête, reconnut Isaac. J’en ai monté de pires à maintes reprises.
    — Vous êtes habitué à leur allure ?
    — Eh oui, sergent. Quand j’étais enfant et jeune homme, j’ai parcouru de nombreuses lieues à dos de cheval ou de mule, j’ai monté des bêtes de tout genre, certaines têtues, nerveuses et imprévisibles, d’autres d’excellente nature. Les mules de Son Excellence sont des créatures supérieures.
    — Oui, c’est une bête patiente et docile. Le capitaine vous l’a lui-même choisie.
    — Elle doit effectivement l’être puisque ma fille, qui n’a rien d’une amazone, est capable de la conduire.
    — Elle sera bientôt dégagée de cette responsabilité, maître Isaac. Je prendrai moi-même les rênes.
    Il s’avança pour joindre le geste à la parole.
    — Je vais me charger de la mule de votre père, maîtresse Raquel. Vous jouissez depuis déjà longtemps de ce privilège. Nous pourrions même tenter un bref galop, ajouta-t-il en riant.
    Menée par le sergent, la mule marcha aussitôt d’un pas plus rapide. Tous accélérèrent, et ils commencèrent à combler leur retard.
    C’était un groupe silencieux. La nuit de veille de Raquel faisait payer son dû. Ses pensées confuses allaient de la route à la maison pour se changer en rêves éveillés où Daniel gisait, grièvement blessé : quand elle tentait de l’aider, il se transformait de façon inexplicable pour prendre les traits du jeune étranger. Les religieuses chevauchaient sans échanger le moindre mot. Marta tenta bien de converser avec l’abbesse mais, devant son mutisme, elle abandonna. Timide et malheureux, privé de la présence amicale de Bernat et de Francesc, leur prêtre et confesseur regardait fixement la route qui s’ouvrait devant lui.
    — Sommes-nous encore loin de Barcelone ? finit par demander Raquel. Est-ce là la montagne qui domine la ville ?
    Elle désignait un sommet qui se dressait en direction du sud-ouest.
    — Oh non, maîtresse Raquel, lui répondit le sergent, nous ne sommes pas aussi près. Nous aurons de la chance si nous arrivons avant le coucher du soleil.
    — Nous allons tout de même plus vite qu’hier, sergent, dit le prêtre.
    — C’est vrai, mais ceux qui nous devancent sont plus lents que nous et vont encore ralentir. La chaleur aidant, la fatigue se fera sentir.
    Dès qu’il eut prononcé ces mots, chacun prit subitement conscience que le soleil était de plus en plus chaud. Porteuse d’odeurs de poisson et de sel, et aussi de toutes les fragrances mystérieuses de la mer, une brise légère les avait rafraîchis, mais chaque fois que la route serpentait derrière les collines omniprésentes qui protégeaient la côte des vents du large, la matinée printanière ressemblait à un après-midi estival. Les bêtes ralentissaient et cherchaient à s’écarter du chemin, et leurs cavaliers perdaient leur bonne humeur au fur et à mesure qu’ils avançaient.
     
    Devant eux, le train des chariots s’était engagé sur une longue ligne droite bien abritée. Comme Gilabert, Naomi et Judith avaient investi l’un des véhicules et que les bagages s’empilaient dans l’autre, tous ceux qui étaient censés aller à pied durent

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