Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Au Coeur Du Troisième Reich

Au Coeur Du Troisième Reich

Titel: Au Coeur Du Troisième Reich Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoît Lemay , Albert Speer , Michel Brottier
Vom Netzwerk:
auparavant après mon serment de fidélité. Il ne montra d’ailleurs aucune émotion d’aucune sorte. J’eus à nouveau le sentiment qu’il était vidé, consumé, sans vie. De cet air qu’il prenait pour régler les affaires et qui lui permettait de tout cacher, il me demanda l’impression que m’avait faite la manière de travailler de Dönitz. J’eus le sentiment très net qu’il ne s’intéressait que de très loin à Dönitz et qu’en fait c’était la question de sa succession qui le préoccupait. Aujourd’hui encore, je suis persuadé que Dönitz a liquidé le sombre héritage dont il fut le légataire inattendu avec plus d’adresse, de dignité et de prudence que ne l’auraient fait Bormann ou Himmler. Je décrivis à Hitler l’impression positive que j’avais eue, ornant mon rapport de quelques détails qui ne pouvaient que lui plaire, mais me gardant bien, vu ma vieille expérience, d’essayer de l’influencer en faveur de Dönitz, ce qui n’aurait eu que le résultat contraire.
    Brusquement, Hitler me demanda : « Qu’en pensez-vous ? Dois-je rester ici ou partir en avion pour Berchtesgaden ? Jodl m’a dit qu’après-demain il ne serait plus temps. » Spontanément, je lui conseillai de rester à Berlin car qu’aurait-il fait à l’Obersalzberg ? Berlin tombé, le combat n’aurait plus de sens. « Et, ajoutai-je, je pense qu’il est mieux, si cela doit être, que vous terminiez votre vie ici comme Führer dans votre capitale que dans votre maison de week-end. » A nouveau, l’émotion me saisit. A l’époque, je pensais que ce conseil était le bon ; mais il se révéla mauvais car, s’il était allé à l’Obersalzberg, je suppose que le combat aurait été écourté d’une semaine.
    Ce jour-là, il ne dit plus rien de l’imminence d’un changement, de la nécessité d’espérer. Plutôt fatigué et apathique, il commença, comme si c’était tout naturel, à parler de sa mort : « Moi aussi, j’étais décidé à rester, je voulais seulement avoir votre avis. Je ne combattrai d’ailleurs pas, continua-t-il. Le danger est trop grand de n’être que blessé et de tomber vivant aux mains des Russes. Je ne voudrais pas non plus que mes ennemis traitent mon cadavre comme une charogne. J’ai donné l’ordre qu’on le brûle. M lle  Braun veut m’accompagner dans la mort ; quant à Blondi, je la tuerai d’abord d’un coup de revolver. Croyez-moi, Speer, il m’est facile de mettre fin à ma vie. Un court instant, et me voilà libéré de tout, libéré de cette existence pleine de tourments. » J’avais le sentiment de parler à un mort vivant. L’atmosphère devenait de plus en plus sinistre, la tragédie approchait de son dénouement.
    Au cours des derniers mois, il m’était arrivé de le haïr, je l’avais, en tout cas, combattu, leurré et trompé ; mais, en ce moment, j’étais ébranlé et en plein désarroi. Perdant tout contrôle de moi-même, je lui avouai à voix basse que je n’avais rien fait détruire, que j’avais même empêché toute destruction. Un moment, ses yeux se remplirent de larmes. Mais il n’eut aucune réaction. De tels problèmes, qui le préoccupaient tant quelques semaines auparavant, lui semblaient lointains, très lointains. L’esprit absent, il me regarda fixement lorsque je lui proposai en hésitant de rester à Berlin. Il garda le silence. Peut-être avait-il senti que je mentais. Je me suis souvent demandé s’il n’avait pas toujours su instinctivement que, ces derniers mois, j’avais œuvré contre lui et s’il n’avait pas tiré de mes mémoires les conclusions ?qui s’imposaient. Je me suis également demandé si, en me laissant enfreindre ses ordres, il ne donnait pas une nouvelle preuve de la complexité de sa nature. Je ne le saurai jamais.
    A ce moment-là, on annonça le général Krebs, chef de l’état-major général de l’armée de terre, venu au rapport 4  . Ainsi rien n’avait changé sur ce plan : le commandant en chef de la Wehrmacht continuait comme toujours d’entendre les rapports sur la situation militaire au front. Mais alors que, trois jours auparavant, la petite pièce du bunker réservée aux conférences d’état-major ne pouvait contenir tous les officiers supérieurs, les commandants en chef des différentes armes de la Wehrmacht et de la SS, aujourd’hui, elle était presque vide, car, entre-temps, ils étaient presque tous partis. En plus de Göring, de Dönitz

Weitere Kostenlose Bücher