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Au Fond Des Ténèbres

Au Fond Des Ténèbres

Titel: Au Fond Des Ténèbres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gitta Sereny
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le lendemain matin et je me suis couché tôt. Le matin suivant une voiture avec chauffeur est venue me chercher pour me conduire d’abord à Cholm [Chelm – mais il a toujours dit Cholm ou Colm] où Globocnik m’avait dit de me présenter à l’expert géomètre Baurath Moser qui avait la charge du matériel dont j’aurais besoin pour Sobibor. »
    Est-ce que ce Baurath Moser fit quelque allusion à la destination réelle de Sobibor ?
    « Non, mais je ne lui ai rien demandé ; ça ne m’est pas venu à l’esprit. Les instructions de Globocnik avaient été parfaitement claires : Sobibor était un camp d’équipement pour l’armée. L’expert et moi nous n’avons parlé que de fournitures. »
    Quelle était la distance entre Chelm et Sobibor ? Et entre Sobibor et Lublin ?
    « Colm était à une trentaine de kilomètres de Sobibor et Sobibor à environ cent dix kilomètres de Lublin [en fait quarante-cinq et cent soixante]. Baurath Moser me proposa de faire la tournée des camps qu’il approvisionnait dans le district. Le premier que j’ai vu était à mi-distance entre Colm et Sobibor, une ferme appelée Griechhof [le véritable nom était Kirchhof]. Deux ou trois cents femmes juives y étaient employées, la plupart Allemandes ou parlant allemand. J’y ai jeté un coup d’œil. Il n’y avait rien de-sinistre, vous savez ; elles étaient presque libres, si vous voulez ; c’était simplement une ferme où des femmes travaillaient sous la surveillance de gardes juifs. »
    Qu’entendez-vous par « gardes juifs » ?
    « Eh bien, je suppose qu’on pourrait dire de la police juive. J’ai regardé ; et je vous dis, ces femmes semblaient tout à fait contentes – elles paraissaient en bonne santé. C’était seulement des femmes au travail, vous voyez. »
    Est-ce que ces gardes étaient armés ?
    « Ils étaient armés de Weissen Schlagmitteln » [expression réellement extraordinaire, dont la traduction littérale serait instruments blancs pour battre [45] ].
    Qu’entendez-vous par là ? Des matraques, des fouets ?
    Il haussa les épaules ; c’était une question à laquelle il ne voulait pas répondre.
    « On est arrivés au village de Sobibor à l’heure du dîner. Au milieu du village, il y avait un autre camp de travail. Le responsable était armé d’un fusil et portait un uniforme bleu qui ne m’était pas familier ; il m’a conduit à une baraque où nous avons dîné, servis par de jeunes Juives. Pendant le repas, il m’a expliqué le travail qui était effectué ; essentiellement du drainage. »
    Et qui faisait le travail ?
    « Des prisonniers juifs. »
    Vous étiez-vous attendu à trouver tout ça ? Ou bien avez-vous commencé à vous poser des questions ?
    « Non. C’était simplement un camp de travail au milieu d’un village polonais et utilisant de la main-d’œuvre juive.
    Rien de particulier dans tout cela : les travailleurs étrangers étaient employés partout. »
    Il m’a été confirmé en Pologne que ces deux camps étaient en effet des camps de travail pour femmes juives ; la plupart d’entre elles venaient de Tchécoslovaquie et d’Autriche et vivaient là apparemment dans des conditions relativement humaines en exécutant des travaux de drainage.
    À partir de ce moment-là et pour des raisons que je n’ai jamais très bien comprises, Stangl présentait deux versions différentes de sa première vision de Sobibor. « J’ai demandé où se trouvait l’emplacement du camp de Sobibor, me dit-il la première fois, et on ne me l’a pas indiqué ; on m’a seulement dit qu’il était trop tard pour y aller ce soir-là et que nous passerions la nuit dans le village. Nous y sommes allés le lendemain matin – il se trouve qu’il n’était qu’à environ six kilomètres. »
    Au cours de la seconde série d’entretiens, il marmonna quelque chose au sujet de l’écroulement d’un pont et d’une inondation et il me raconta qu’ils étaient retournés à Chelin passer la nuit et à Lublin dans la matinée, et qu’il n’avait été à Sobibor que trois jours plus tard avec six autres hommes dont son ami Michel, qui avait été en poste avec lui à Hartheim. Plus tard il me dit que Michel – sur lequel il me raconta trois histoires différentes – s’était enfui en Egypte à la fin de la guerre et que probablement il y était encore.
    À quoi ressemblait le camp quand vous êtes arrivé ?
    « Il y avait juste la

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