Au pied de l'oubli
de grogner, Chapeau fit signe que son amie avait deviné l’animal qu’il
mimait.
— À mon tour, déclara Hélène en se levant.
C’était un de leurs jeux favoris.
Lorsque Hélène avait donné rendez-vous à Chapeau, l’Indien avait rapidement
pris les devants et l’avait patiemment attendue, assis sur une souche, les yeux
à demi fermés. Elle s’était laissée choir à ses côtés et avait accepté le cadeau
qu’il lui offrait presque à chaque rencontre. Cette fois, c’était une récolte de
fraises des champs, que Chapeau avait soigneusement déposée dans un morceau
d’écorce. Ensuite, pour l’amuser, Chapeau avait amorcé le jeu des
charades.
Hélène réfléchit. « Hum... quel animal imiter ? » Plus loin, un petit suisse se
faufila entre deux troncs d’arbre, apportant la réponse à la question de
l’imitatrice. Hélène essaya de gesticuler à la manière du petit tamia.
Accroupie, elle jetait des regards nerveux autour d’elle, guettant le moindre
danger. Chapeau étudiait les mimiques avec un grand sourire. Hélène s’enhardit.
Se déplaçant à petits pas rapides, elle s’immobilisait subitement, attentive aux
bruits, avant de repartir vers une autre direction. Soudain, sans crier gare,
Chapeau fonça sur elle, lui mit une main sur la bouche et l’entraîna sous le
couvert d’un taillis. Paniquée, Hélène se débattit. Dans sa tête, le carrousel
d’horreur tournait à une vitesse folle. L’homme l’attaquait, l’empoignait,
l’étouffait... Aucune comptine en ce moment ne pouvait la calmer. Elle essaya de
se libérer, ses ongles allant s’enfoncer dans la peau de son agresseur. Elle
lança un regard d’effroi à Chapeau. La douceur et le désarroi des yeux bruns la
rassurèrent un peu. Assez pour prendre une grande respiration. Une perdriole,
deux perdrioles... Chapeau en profita pour luifaire
signe de garder le silence et lui indiquer la direction d’où provenaient des
voix. Des intrus s’approchaient de leur cachette… Hélène comprit enfin que
Chapeau n’avait pas de mauvaises intentions. Elle pouvait avoir confiance, il ne
lui ferait pas de mal, lui, jamais. Les voix s’amplifiaient. Réalisant qu’Hélène
avait saisi la situation, l’Indien se contenta de la maintenir dans ses bras, se
reculant encore un peu plus à l’abri des feuillages, se dissimulant presque
parfaitement à la vue du couple qui venait d’émerger un peu en avant
d’eux.
— Tu es certain de pas nous perdre ? demanda Gertrude craintivement.
— Ben non, j’ai suivi ce petit sentier. Pis j’ai marqué mon chemin au fur et à
mesure. Inquiète-toé pas, ma Gertrude.
— Quand même... On a marché longtemps.
— Je veux être sûr d’avoir la paix. Tiens ici, c’est bien... t’es si belle, ma
femme à moé... tout seul, rien qu’à moé...
De leur cachette, Hélène et Chapeau ne perdaient rien du spectacle qui
s’offrait à eux. Jean-Baptiste avait déboutonné la chemise de Gertrude et lui
tétait goulûment chaque sein, l’un après l’autre.
— Ils sont rendus ben plus gros... J’aime ça, maudit que j’aime ça...
Tourne-toé astheure... Oui...
Hélène ne pouvait détacher ses yeux de Jean-Baptiste qui relevait la jupe de
Gertrude, lui baissait sa culotte tout en ouvrant la braguette de son pantalon.
Avant de la pénétrer, il avait caressé la croupe féminine, l’avait léchée avec
gourmandise... L’homme grognait, haletait... grognait, haletait... non, pas le
carrousel, non !
Sans s’en rendre compte, Hélène se mit à trembler. Chapeau resserra son
étreinte. Grâce à la sécurité des bras de l’Indien, la vague de peur s’estompa.
Hypnotisé par le spectacle érotique qui se déroulait devant eux,
Chapeau remonta ses mains jusqu’à la poitrine d’Hélène. Par-dessus le tissu, il
la caressa du bout des doigts, presque imperceptiblement. Tout en douceur, très,
très lentement...
— Oui... oui... oui... maudit que c’est bon, maudit que c’est bon, c’est...
bon.... ah !
Hélène et Chapeau retenaient leur souffle.
Jean-Baptiste prenait son temps, savourant chaque mouvement de va-et-vient,
gravissant le chemin vertigineux de la jouissance, repoussant le plus possible
l’atteinte du sommet, là où le soleil aveugle, là où il plantera profondément
son drapeau avant de redescendre, épuisé, vidé, mais heureux, si heureux
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