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Au pied de l'oubli

Au pied de l'oubli

Titel: Au pied de l'oubli Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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groupe.
    — Après le feu, ce fils-là, je l’ai renié… C’était lui ou moi. Je l’ai
     sacrifié. J’m’étais juré de pas ressembler à mon père pis que je deviendrais
     jamais comme lui. Je voulais donc être un bon père pour mes enfants. Je pense
     que j’ai été pire. Quand on a quelque chose de tellement pris dans le travers de
     la gorge, faut ben boire pour le faire descendre !
    Il joignit le geste à la parole et vida son verre.
    — Le bon Dieu m’a jamais abandonné. Astheure, je le sais. Il a placé à mes
     côtés un ami… un vrai, rien que pour moé. Pour passer à travers les coups durs…
     Quand cet ami a osé me dire mes quatre vérités, je l’ai renié aussi... J’me suis
     mis tout le monde à dos.
    Georges releva la tête.
    — Mais mon ami a été éprouvé l’automne dernier, pis j’ai réussi à être à ses
     côtés. Ouais, j’ai été là pour lui, répéta-t-il avec fierté.
    Des murmures d’approbation accueillirent ces propos.
    — Pis je suis monté voir mon plus vieux. Il m’a montré où il travaillait, une
     belle job. Je voulais y demander pardon... Les mots ont pas voulu sortir... Je
     pense qu’il les a entendus pareil.
    Les membres applaudirent à tout rompre.

    Hélène et Julianna acceptèrent la tasse de café, mais
     refusèrent la pointe de tarte. Henriette les avait installées au salon et les
     trois femmes jasaient de choses et d’autres en guettant le retour de
     Georges.
    — C’est sa soirée de cartes du mardi avec des gars de l’usine. Ça fait deux ans
     qu’il en rate pas une. Il devrait plus tarder, dit Henriette.
    Elle était bien curieuse de savoir quel était le but de cette visite
     inattendue. Polie, elle n’osait le demander directement.
    — Georges va être surpris de vous trouver icitte. Il va peut-être penser que
     quelque chose de grave est arrivé... Vous apportez pas une mauvaise nouvelle,
     toujours ?
    — Hélène et moi, on doit juste parler à Georges.
    — Parce que les mauvaises nouvelles, on a eu notre lot cet automne. Excuse-moi
     Julianna, je voulais pas tourner le fer dans la plaie.
    — Il n’y a pas de mal, chère... la rassura Julianna. Zoel nous manque beaucoup,
     cependant la vie continue, comme on dit.
    — Comme ça, vous arrivez du chalet ?
    — Je suis montée aller-retour à matin pour passer la journée avec Isabelle.
     Elle défaisait ses décorations de Noël.
    — Comment étaient les chemins dehors ? s’informa Henriette.
    — Glissants... On a attrapé un peu de neige, répondit Julianna en essayant de
     cacher sa nervosité. Jean-Baptiste a de bons réflexes. Il y avait une voiture en
     avant de nous qui pensait que la route lui appartenait.
    — Vous retournez toujours pas là-bas à soir ? s’alarma Henriette.
    — Jamais de la vie ! Jean-Baptiste nous attend au restaurant en
     haut de la rue. Quand on sera prêtes, il va nous ramener à Chicoutimi.
    — Pis toi, Hélène, t’es pas restée au lac ?
    — Euh, non... Je... je voulais voir papa.
    Les yeux perçants d’Henriette cherchaient à lire sur le visage de ses invitées
     la raison de leur présence en ce soir de janvier.
    — Vous changez pas d’idée ? Pas de tarte au sucre ?
    — Pas pour moi, déclina Julianna.
    — Moi non plus, dit Hélène d’une petite voix.
    Elle se sentait soudain si misérable ! Son cœur allait fendre ! Elle avait
     envie de fuir, de se sauver de cette maison ! Elle aurait dû se marier en
     cachette, les mettre devant le fait accompli. Au fond d’elle, elle rêvait d’une
     belle cérémonie, entourée des siens. Elle voulait entrer à l’église au bras de
     son père. Quand celui-ci arriverait, elle espérait de tout son cœur trouver les
     mots justes pour le convaincre. Chapeau avait désiré effectuer cette démarche
     avec elle, arguant qu’il devait se présenter à sa future belle-famille. Hélène
     l’en avait dissuadé. Le contexte était particulier. Valait mieux la laisser
     gérer la situation. Ce soir, elle regrettait presque la présence de son
     amoureux. Sa force tranquille, son calme, sa sérénité auraient été bienvenus. Au
     moins, sa tante Julianna la soutenait. Elle n’était pas d’accord avec son
     choix ; cependant, elle allait le respecter.
    Hélène se concentra sur sa tasse de café.
    — J’ai allumé des lampions à l’église aujourd’hui, leur dit Henriette. Pour
     tous ces petits anges morts lors du feu de

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