Azteca
et brillant, magnifiquement brodés ; des
sandales en cuir souple, avec une paire dorée pour les cérémonies pourvue de
lacets qui me montaient presque jusqu’aux genoux. La Dame de Tolan m’avait même
envoyé une petite fibule d’or et de jaspe pour attacher mon manteau que je
portais simplement noué sur l’épaule.
Lorsque j’eus fait mon choix parmi ces élégants atours, Cozcatl
m’emmena dehors pour me montrer les bâtiments qui abritaient les salles de
classe. Il y en avait bien davantage que dans un calmecac. Je m’intéressai
particulièrement à celles où l’on enseignait la connaissance des mots,
l’histoire et la géographie. On pouvait aussi, si on le voulait, suivre des
cours sur la poésie, le travail de l’or, de l’argent, de la plume, la taille
des pierres précieuses et bien d’autres arts.
« Les cours où il ne faut ni bancs, ni matériel, se tiennent à
l’extérieur, sauf par mauvais temps, me dit mon jeune guide. Quand il fait
beau, comme aujourd’hui, les Seigneurs Professeurs et les étudiants préfèrent
travailler dehors. »
Je vis en effet des groupes assis sur l’herbe ou rassemblés autour des
pavillons de marbre. Les professeurs étaient des hommes d’un certain âge, vêtus
d’un manteau jaune caractéristique, mais il y avait une grande variété parmi
les étudiants : jeunes gens et hommes de tous âges et de toutes tailles
et, de temps à autre, une jeune fille ou une femme, ou encore un esclave se
tenant un peu à l’écart.
« Les étudiants ne sont pas groupés par âge ? » demandai-je.
« Non, Seigneur. Selon leurs connaissances. Certains sont plus
avancés dans une matière que dans une autre. Lorsque vous irez à un cours pour
la première fois, le Seigneur Professeur vous posera des questions pour savoir
dans quelle classe il vous mettra – par exemple, chez les débutants, les
moyens, les moyens forts et ainsi de suite. Il vous classera d’après vos
connaissances et aussi d’après vos capacités à en apprendre davantage.
— Et les femmes ? Et les esclaves ?
— Les filles nobles ont le droit de suivre les cours jusqu’au plus
haut niveau, si elles le veulent et si elles en sont capables. Il en est de
même pour les esclaves, dans la mesure où c’est compatible avec leur travail.
— Toi-même, tu parles bien pour un si jeune tlacotli.
— Je vous remercie, Seigneur. J’ai appris à bien parler le
nahuatl, les bonnes manières et des rudiments de travaux ménagers. Plus tard,
j’espère bien continuer pour être un jour Maître des Clés dans une maison
noble.
— Si un jour, j’ai une maison, Cozcatl, je te promets que tu auras
la place », lui dis-je, plein de généreux sentiments.
Je n’aurais pas dû dire « si », mais « quand ». En
effet, je n’en étais plus à souhaiter devenir quelqu’un, je m’y voyais déjà. Je
me promenais dans ce magnifique parc, un serviteur à mes côtés, fier dans mes
beaux vêtements et je souriais en imaginant quel grand homme je serais. Et
maintenant, je suis là, mes révérends, tout courbé et vêtu de haillons et je
souris aussi en pensant au jeune prétentieux que j’étais.
Neltitica, le Seigneur Professeur d’Histoire, qui semblait assez vieux
pour avoir vécu tous les événements historiques, me présenta à ses élèves.
« Nous avons parmi nous un nouvel étudiant piltontli, c’est un Mexicatl
que nous appellerons Tête Haute. »
J’étais si heureux d’avoir été présenté comme un étudiant noble, que
mon surnom ne me fit pas faire la grimace.
« Tête Haute, peut-être pourriez-vous nous donner un bref aperçu
de l’histoire de votre pays ?
— Bien sûr, Seigneur Professeur », répondis-je avec
assurance. Je me levai et tous les regards se tournèrent vers moi. Je
m’éclaircis la voix et me mis à raconter ce qu’on m’avait appris dans la Maison
de l’Apprentissage des Manières de Xaltocán.
« Sachez qu’à l’origine, mon peuple vivait dans une région
lointaine au nord d’ici. Son nom était Aztlân ou Lieu des Aigrettes Enneigées
et les habitants s’appelaient les Aztlantlaca ou Azteca. Mais Aztlân était un
pays rude et Huitzilopochtli, leur principal dieu, leur apprit qu’il existait,
vers le sud, une terre plus clémente. Il leur dit aussi que le voyage serait
long et pénible, mais qu’ils reconnaîtraient tout de suite leur nouvelle
patrie, car ils verraient un cactus nopalli avec un aigle d’or posé
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