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Bombay, Maximum City

Titel: Bombay, Maximum City Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Suketu Mehta
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scrutin de farce.
    Les électeurs doivent choisir entre Sonia Gandhi, italienne de naissance et veuve de Rajiv Gandhi, et Atal Bihari Vajpayee {56} , un des piliers du BJP. Les intellos n’aiment pas la première. Patriotes, ils s’insurgent contre l’idée que l’Inde aurait besoin d’importer ses Premiers ministres comme elle importe les combinés radio-CD ou les jeans de marque. Sonia, dont le plus grave défaut est donc de n’être pas indienne, a très peu de supporters à Malabar Hill ou à Jor Bagh. L’Inde rurale, en revanche, l’a acceptée sans réticences. Lorsque, montant à la tribune, elle entame ses discours en disant : « Grâce à mon mari, j’ai eu une vie comblée », ses auditeurs ne voient plus en elle l’immigrée italienne mais Sati Savitri, parangon mythique de l’épouse accomplie. Sonia cesse alors d’être la veuve italienne d’un pilote de ligne moitié kashmiri et moitié parsi qui écorchait le hindi. Dès qu’elle pénètre dans la famille de son époux, la femme perd ses origines. De quelque bout du monde qu’il vienne, chacun peut faire sa vie en Inde. Même celui qui en est parti vingt ans durant.
     
    Quand j’arrive au lieu du rendez-vous, je trouve Jayawantiben Mehta assise à la table en Formica. Femme au foyer, cette dame entre deux âges est députée BJP de la circonscription de Mumbai Sud ; en 1996, elle a battu le candidat du parti du Congrès, Murli Deora, qui occupait le siège depuis douze ans. Pour l’heure, elle gère le financement de sa campagne et marchande ferme avec les commerçants censés la soutenir.
    « Jusqu’à présent vous avez donné trois lakhs {57} et soixante-quinze mille roupies. Il vous reste donc à payer un lakh et vingt-cinq mille roupies, exige-t-elle.
    — Pas du tout ! Nous vous en avions promis trois au grand maximum.
    — Jamais de la vie. Je ne marche pas à moins de cinq. »
    Un lakh vaut cent mille roupies, soit à peu près mille sept cents euros. La scène se déroule dans le bureau d’un des dirigeants de l’association des diamantaires. Son père, sa femme et lui sont tous trois de fervents militants de l’Hindutva, mais trop policés pour briguer eux-mêmes les suffrages des électeurs. Le BJP avait approché son épouse pour qu’elle défende les couleurs du parti aux législatives ; elle a refusé car elle ne voulait pas « se salir les mains ».
    À un moment donné, ce monsieur respectable attrape sous son bureau un sac de courses en plastique blanc qu’il pose brutalement devant Jayawantiben. Laquelle se garde bien d’y toucher, même pour en examiner le contenu, et demande simplement qu’on le fasse porter dans sa voiture.
    Son assistant sort de sa poche un carnet à souche, et les négociations reprennent. Il s’agit maintenant de savoir quelle part du montant sera versée par chèque et combien en liquide. Le thé est servi. Pendant que nous le dégustons, M me  la députée m’invite à l’accompagner dans sa tournée électorale. Puis elle s’en va et je reste assis devant le sac en plastique blanc que personne n’a encore emporté. Je jette un coup d’œil à l’intérieur. Dedans, plusieurs centaines de milliers de roupies en liasses de billets enveloppés de papier journal. Sur le sac on peut lire :
    Gourmandises sucrées et salées de Haldiram.
    Elles remportent tous les suffrages !
    Bien décidé à profiter de l’invitation de Jayawantiben, je me mêle un beau matin à son escorte. Je n’ai pas à aller très loin : elle fait campagne tout près de Dariya Mahal, dans les villages secrets de Malabar Hill. Je me risque à sa suite sur le bord de mer rocheux où prolifère un immense bidonville dont les habitants, pour la plupart, ne lui témoignent qu’indifférence. « On n’a même pas l’eau, ricane un homme. Ils passent nous voir tous les cinq ans. » À l’entrée d’une maison, quelques femmes, pourtant, accueillent la candidate. Elles apportent une assiette en métal sur laquelle elles ont déposé une noix de coco, une lampe, un bâtonnet d’encens, elles font devant elle un petit puja puis se baissent pour lui toucher les pieds. Jayawantiben leur donne sa bénédiction. Les slogans que lancent ses partisans sont en marathe, en hindi ou en anglais, selon la langue majoritaire dans les différents villages du slum.
    Apparemment, M me  la députée inspire plutôt confiance. À quelques pas des Jardins suspendus, une Gujeratie sort de son taudis et tend le

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