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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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heures du matin, Bonaparte est debout et se fait conduire vers les forts qu’il visite minutieusement. Il inspecte même les bureaux des douanes qui ne l’attendaient guère. Il pense déjà à faire élever une baraque sur le « point le plus dominant », c’est-à-dire sur la falaise de la Tour d’Ordre d’où, ainsi qu’il le dira un peu plus tard à l’amiral Bruix, « on pourra facilement s’y tenir pour donner là des ordres dans les nuits importantes de l’embarquement ».
    Le 9 juillet – après avoir été acclamé à Calais, à Dunkerque et à Lille – il pénètre en Belgique. L’enthousiasme est stupéfiant. « Ces bons Belges, écrit Soult, qui jamais peut-être n’ont éprouvé de grande émotion et qui sont froids par caractère, s’épuisent en démonstrations d’une vive allégresse. » Napoléon est traité en monarque. Partout il est accueilli par deux ou trois dizaines de jeunes filles vêtues de blanc, flanquées de cavaliers réunis en escadrons ‘honneur.
    À Gand, les habitants n’ont quitté leur air maussade qu’en voyant le Premier consul et son épouse se rendre à Saint-Bavon pour entendre la messe. Le maire proteste lorsque Bonaparte, énumérant les principales ressources de la ville, le félicite de posséder treize raffineries :
    — Il n’y en a que neuf !
    — Treize, confirme un conseiller.
    On fait le compte : Bonaparte et le conseiller ont raison. On devine l’étonnement du maire en constatant que le Premier consul connaît mieux sa ville que lui-même, qui l’administre depuis dix ans. Chaptal, qui nous rapporte ce trait, nous peint le futur empereur, ce 18 juillet, traversant l’Escaut devant Anvers, à la Tête de Flandre.
    — Quelle est la profondeur du fleuve ? demande Napoléon.
    — Vingt-deux pieds, lui répond-on.
    — La profondeur est-elle la même jusqu’à Flessingues ?
    — Oui.
    Il se tourne alors vers le ministre de la Marine :
    — Combien de pieds d’eau prennent les vaisseaux de 14 ?
    — Vingt-deux pieds quand ils ne sont pas armés, et vingt-cinq lorsqu’ils le sont.
    — Cela me suffit. Je veux faire ici un grand port de construction, capable de recevoir vingt-deux cales.
    Il s’adresse alors à Chaptal :
    — Demain, vous m’achèterez ce grand couvent qui est là, vis-à-vis, et toutes les maisons contiguës.
    Puis il ordonne encore à Decrès :
    — Vous acquerrez tout le terrain nécessaire pour placer vingt-deux cales.
    Les acquisitions sont effectuées dès le lendemain. Il décide également de faire venir, comme manoeuvres, à Anvers, six cents forçats de Brest et de traiter pour vingt-cinq millions de fournitures.
    À Anvers, l’enivrement est indescriptible. Illuminations, banquets, réceptions se succèdent. C’est « un délire d’acclamations ». L’expression est d’un royaliste, qui précise : « Les lettres particulières attestent l’ivresse et l’empressement du peuple ; on se porte réellement en foule autour du grand homme, on est heureux d’en recevoir un regard, une parole... » On le harangue en l’appelant Napoléon le Grand, et pour la première fois, le mot « empire » est prononcé.
    Comme le remarquait Mme de Staël : « les institutions monarchiques s’avançaient à l’ombre de la République ». Ce n’est pas à un roi que la République compte se donner, mais à celui qui va devenir l’empereur de la Révolution. L’agent de Louis XVIII annonce encore à son maître : « Quelques-uns assurent que son dessein est de se faire couronner empereur à Bruxelles. C’est pour cela, dit-on, qu’il a rassemblé dans cette ville le Conseil d’État et tous les ministres. C’est surtout dans cette vue qu’il fait venir le cardinal-légat, sans doute pour lui faire faire la cérémonie du sacre. D’autres prétendent que c’est à Aix-la-Chapelle, capitale de l’ancien Empire des Gaules, et sur le tombeau de Charlemagne, qu’il veut ressaisir son héritage. »
    Mais à Bruxelles, il ne se passe rien de tel Bonaparte semble n’avoir en tête que ses projets de débarquement en Angleterre. Il le confie au secrétaire du roi de Prusse :
    — Je puis échouer, les armes sont journalières, mais je puis réussir aussi... Jugez du chaos qui en résulterait pour le commerce et les fortunes !
    Dès son retour à Paris, Bonaparte, tout en reprenant sa vie officielle, multiplie ses préparatifs. Il crée même une compagnie de « guides interprètes ». En même temps, il fait activer les

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