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Bonaparte

Bonaparte

Titel: Bonaparte Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: André Castelot
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des amours de son frère, le Premier consul se déguise « en bourgeois », met des lunettes, se coiffe d’une perruque et, accompagné de Bertrand – lui aussi méconnaissable – se présente avec la qualité de « commissaire de guerre » lors d’une réception donnée par la dame.
    — Ils sont reçus avec courtoisie et invités à jouer aux « jeux innocents ». Bonaparte perd et on lui impose de « faire le portier », tandis que le colonel Joseph et Mme Fagan se livreraient à un « voyage à Cythère » dans une chambre voisine. Ainsi fut fait. Le jeu dit « innocent » terminé, Bonaparte prend congé mais, quelques secondes plus tard, le menuisier qui demeurait au rez-de-chaussée venait porter à Mme Fagan ce billet : « Je vous remercie, madame, de l’aimable accueil que vous m’avez fait. Si vous venez un jour dans ma baraque, je ferai encore le portier, si bon vous semble ; mais cette fois je ne laisserai point à d’autres le soin de vous accompagner dans le voyage à Cythère. Signé : Bonaparte ».
    Avant de quitter Boulogne, il écrit de nouveau – le 16 novembre – à Cambacérès : « Tout commence à prendre ici le mouvement et la direction qu’il doit y avoir. J’ai vu des hauteurs d’Ambleteuse les côtes d’Angleterre, comme on voit des Tuileries le Calvaire {31} . On distinguait les maisons et le mouvement. C’est un fossé qui sera franchi lorsqu’on aura l’audace de le tenter. »
    Après un mois passé à Saint-Cloud, il revient dans sa baraque boulonnaise et manque de se noyer en traversant un pont. Il tombe à l’eau, mais regagne la rive en s’exclamant :
    — Ce n’est qu’un bain !
    Le 5 janvier 1804, en dépit d’une mer très houleuse, Napoléon qui a pris place à bord d’un canot, défile devant les bâtiments. Au retour, les vagues empêchent Bonaparte de pénétrer dans le port. Il faut débarquer sur la plage et le chef de l’État est porté à terre sur les épaules des marins de la Garde consulaire.
    « Tout commence à prendre un aspect redoutable », écrit-il. Cette fois, l’Angleterre qui n’a jamais été envahie depuis Hastings commence à trembler. Le nouveau cabinet, présidé par le fameux Pitt, met tout son espoir, non seulement dans les batteries côtières anglaises, mais surtout dans la vaste conspiration qui se monte à Paris. Georges Cadoudal, dont les poches ruissellent d’or anglais, a débarqué, le 20 août 1803, sur les côtes normandes, déposé par le brick El Vencejo au pied des falaises de Biville. Le terrible Georges a gagné Paris et, en ce début de l’année 1804, il s’y trouve depuis cinq mois sans qu’un seul policier s’en doute. Pitt se frotte les mains : assurément, étant donné les appuis dont dispose le Chouan, le pouvoir du Premier consul va s’effondrer ! Sans parler de l’opposition des salons !
    — La France est perdue si Bonaparte ne l’est pas bientôt, s’écrie Mme de Staël. Ma vie, ma fortune, oui, pour le mortel généreux qui aurait frappé le tyran : pourquoi n’ai-je qu’un coeur à lui offrir ? Je l’adore, je l’épouse !
    Epouser l’insupportable Corinne ? Il y avait de quoi décourager les plus audacieux... Plutôt que les postulants à la main de Mme de Staël, Bonaparte pouvait craindre davantage Georges qui, à la tête de ses tapedurs a promis de mettre au point le rapt du tyran. Bien sûr, si le consul opposait la moindre résistance à son enlèvement, on saurait lui fermer la bouche – et pour toujours ! Le ministre britannique Wyndham le précisait avec confiance : « M. de Cadoudal possède cette aisance et cette assurance naturelle qui sont la marque d’un esprit supérieur ; de tous ceux que j’ai vus engagés dans les affaires royalistes, c’est lui qui me donne le plus la sensation qu’il est né pour devenir grand ». Assurément – les Anglais le pensaient –, cet « esprit supérieur » mettrait fin à la carrière de ce maudit général qui empêchait Pitt de dormir ! Ainsi que l’écrivait l’ultra-royaliste comtesse d’Albany : « C’est une terrible chose qu’un petit bout d’homme mette le monde sens dessus dessous. »
    Mais le « petit bout d’homme » n’avait nullement l’intention de se laisser faire.

    — Général, lui fait remarquer Fouché, ce qui est ridicule, c’est que vous portiez le même titre que Cambacérès et Lebrun, et qu’ils aient des gardes qu’on voit au Bois de Boulogne, dans les rues, et partout. Je vous l’ai dit

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