Byzance
montrer patient. Ce qui nous renvoie à notre Tauro-Scythe. Pourquoi Joannès soutiendrait-il un parvenu, un parvenu barbare, si ce Barbare ne figurait pas d’une manière ou d’une autre dans une équation importante ? Si ce Haraldr n’est pas au courant des manigances de Joannès – et malgré ses protestations, je crois que c’est possible – , nous pouvons l’utiliser à nos propres fins. Et si c’est un complice délibéré du grotesque Joannès, nous pourrons le renvoyer à son mentor chargé de cadeaux empoisonnés. Que pourrions-nous trahir de nos propres objectifs ? Entre cette brute asexuée de Joannès et moi-même, l’inimitié est absolument transparente : il ne saurait y avoir d’ennemis plus implacables.
— Je ne mets pas en doute votre logique, Mère.
Zoé écarta légèrement le rideau, se demandant pour quelle raison sa voiture – et probablement le reste de la caravane impériale – venait de s’arrêter.
— Tu sais à quel point j’apprécie ton intuition, petite fille. Que dit-elle ?
— Pendant un instant, j’ai eu l’impression que ce Haraldr imaginait… Je ne sais pas. Il m’a regardée comme s’il se prenait pour un roi.
— Oh ! il ne compte sûrement pas conquérir l’Empire romain avec ses cinq cents vauriens varègues ! Mais crois-tu qu’il ait des ambitions pour lui-même ?
— Des ambitions ? Je ne suis pas sûre que ce soit le terme exact. Le destin règne sur tout, et le destin n’a pourtant pas d’ambition. Cet homme… Il me glace. Non comme l’agent d’une puissance terrestre, mais comme les mystères du destin lui-même.
Maria serra les mains comme pour les empêcher de trembler.
— Je sais que cela n’a pas de sens. Mais je vous ai raconté ce qu’Ata m’a dit au sujet des trois lignes qui se croisaient. Jamais il ne m’a laissé entendre que l’homme serait un Barbare blond. Je ne sais pas.
Zoé posa les mains sur celles de Maria.
— Je crois que ce Tauro-Scythe n’est qu’un membre du chœur dans notre drame. Mais peut-être… Ne t’en offense pas, petite fille, mais tu m’as dit un jour qu’il t’avait donné du plaisir dans l’évanescence du sommeil, murmura Zoé en souriant. Peut-être est-il l’instrument d’un destin simple. Je sais que tu trouves les Tauro-Scythes agréables d’allure et que tu n’es jamais allée jusqu’au bout de ton… enquête sur les… capacités de l’hétaïrarque. Peut-être fais-tu trop de cas d’un désir fondamental, le seul qui soit facile à assouvir comme tu l’as judicieusement fait remarquer l’autre jour. Tu ne serais sûrement pas la première dame de ma cour à prendre un Barbare tauro-scythe dans son lit.
— Peut-être. J’avoue qu’il était dans mon lit la nuit dernière après votre conversation avec lui, répondit Maria dont les yeux s’agrandirent à ce souvenir. Puis-je vous raconter ?
— Oh oui, petite fille ! s’écria Zoé, toute fatigue oubliée.
— Il est venu vers moi complètement nu, la poitrine couverte de poils pareils à des fils d’or, les bras aussi durs et lisses que de la pierre sculptée. Il a déchiré ma robe. Je me suis soumise totalement. Mère, je suis gênée de vous avouer ainsi mes pensées les plus dévergondées. Je l’ai supplié de me pénétrer par tous les orifices à grands coups sauvages. Je lui ai hurlé de déchirer ma chair avec ses dents, de mordre mes lèvres et mes mamelons, et du sang et de la sueur mêlés à de l’huile chaude se sont répandus entre nos poitrines. Puis je me suis dressée au-dessus de lui. Je lui ai tiré les cheveux, je lui ai griffé les yeux et il a compris mon plaisir. Nous nous sommes élevés dans la même extase vers un dôme doré, et dans ma main j’ai découvert un couteau, une lame froide, glacée. Au moment de la passion suprême, je l’ai plongée de toute ma force dans son cou et il a disparu, il est mort pendant que j’étais transportée de plaisir, soulevée par la dernière chaleur de son membre brûlant tandis que son corps se glaçait et que ses bras de soleil me retenaient. Quand je me suis éveillée de ce rêve, j’étais trempée de mes propres humeurs.
— Maria ! Tu t’es surpassée ! Au récit de tes fantasmes nocturnes, notre spécialiste des désordres sexuels s’évanouirait comme une pucelle à la vue de son premier membre sans fourreau ! Tu vois bien que tu peux prendre du plaisir avec lui. Mais je crois que nous pourrons nous
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