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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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vie politique saine comporte une majorité et une opposition. Je souhaite par conséquent de façon générale qu’il y ait en France une majorité à peu près définie, sans être ouverte à tous les vents, et une opposition elle-même à peu près définie. Ce qui me manque, c’est une opposition. »
    Quant à la question sur l’héritage du général de Gaulle, je m’attendais depuis le début à ce qu’elle soit posée. Il répond avec finesse : « J’ai été depuis plus de vingt ans le collaborateur le plus proche du général de Gaulle. Je ne reconnais à personne le droit de critiquer ma politique au nom du général de Gaulle. »
    Derrière la fatigue apparente de son visage et de sa voix, il a une vraie présence, une véritable autorité. Et un certain bonheur d’expression. Ce n’est pas un orateur de tribune, comme Mitterrand, mais il a une épaisseur, une densité que les autres n’ont pas. Que Chaban n’aura jamais.

    22 janvier. Congrès du PSU
    La direction est très attaquée, comme d’habitude, sur la négociation avec le PC, sur ses rapports avec la Ligue communiste, sur son échec à l’UNEF. Personne ne nie que la négociation entre le PSU et le PC se solde par un échec. Lorsque Michel Rocard parle, il commence par annoncer la couleur : « L’état de santé du parti n’est pas très bon. » Baromètre électoral mauvais, effectifs stagnants, échecs répétés sur le mouvement étudiant. Il fait quelques constats désenchantés : « La synthèse entre toutes les expériences du mouvement ouvrier exige d’abord de la patience. » Ou : « Nous devons mener une lutte révolutionnaire dans une période qui ne l’est pas. » Tout cela sous le feu d’une pression unitaire émanant des autres mouvements de gauche, qu’il reconnaît très forte, mais dont il ne veut pas.
    Allez donc faire un parti dans ces conditions ! En relisant les notes que j’ai prises tout à l’heure, je m’aperçois – mais peut-être n’ai-je pas assez bien écouté – qu’il a beaucoup parlé du Parti communiste, mais qu’il n’a pas cité une fois le nom de François Mitterrand. Ce qui me fait rire aussi, c’est qu’à un moment, après un déluge de propos sur « l’invasion progressive de notre vie quotidienne par le capitalisme » et l’axe du contrôle ouvrier, qui est aujourd’hui, selon lui, un « débat majeur », il déplore, chez d’autres orateurs, le « danger du verbalisme ». Qu’est-ce que ce serait s’il ne le dénonçait pas !
    Le soir, Michel Rocard nous dit, navré : « C’est très difficile de faire un parti sans réflexes léninistes ! » C’est le drame du PSU, où chacun dit ce qu’il veut dans son coin, avec quelques camarades, sansse soucier de ce que disent à deux pas les autres au même moment. De chapelle en chapelle, on perd le curé.
    Ce qui n’empêche pas la motion majoritaire de Rocard d’être adoptée à une très large majorité : 436 voix pour, 21 contre, 63 abstentions et 48 ne-prend-pas-part-au-vote.
    En réalité, c’est un round d’observation que ce conseil national du PSU. Michel Rocard et son extrême gauche se sont jugés, jaugés mutuellement, et, pour le moment, la victoire est revenue à Michel Rocard.
    Les gauchistes du parti ont déclenché la bataille sur quatre points :
• Sur le Parti communiste, d’abord : une minorité maoïste a pris note de ce qu’elle appelle l’« évolution irréversible du PC » et conclu que vraiment, à aucun niveau, à la base comme au sommet, il n’y a rien, jamais, à faire avec eux. Ils ont été battus par une majorité qui pense que, pour des actions tactiques bien précises, on peut continuer à travailler avec les communistes. Moyennant quoi, pour compliquer les choses, l’unanimité est acquise à la rupture des pourparlers que le PSU avait initiés avec eux.
• Deuxième terrain d’affrontement, plus large : l’attitude envers les groupes révolutionnaires. Le texte présenté par la direction condamnait le dogmatisme trotskiste ou maoïste. Eh bien, ce texte a été repoussé. Une majorité de congressistes ont parlé des progrès réels accomplis par le mouvement révolutionnaire en France, et même défendu dans certains cas les pratiques violentes des maoïstes dans les entreprises.
• Troisième terrain d’opposition : les municipalités où le PSU est associé à des sociaux-démocrates. Type Grenoble : faut-il partir, faut-il

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