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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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ont en tête le programme commun de gouvernement conclu entre les communistes et les socialistes français.
    Mitterrand, lui, est peu enclin à établir une classification idéologique des socialistes : « Que chaque expérience gouvernementale se déroule, dit-il, et l’Histoire jugera ! »
    Chacun des participants marque, à sa façon, ses distances avec le communisme : Gonzales, si jeune au milieu des autres, souligne que, pour le mouvement socialiste, le détachement vis-à-vis du modèle soviétique est très important et, que pour les socialistes espagnols, l’essentiel est de rebâtir une démocratie, de « détruire les institutions et les superstructures de la dictature ». Donc, pour lui, les alliances englobent toutes les forces qui luttent pour la démocratie, quelles qu’elles soient.
    Le Portugais fait profil bas : « Nous vivons au Portugal une extraordinaire expérience, parfois dramatique, où nous avons appris deux vertus essentielles : la fermeté et l’humilité face aux faits. » Mais il revendique le droit, pour chaque parti socialiste, à son identité propre.
    Le Grec Papandréou, vieux caïman à qui on ne la fait pas, enfonce le clou de la différence entre les socialistes de l’Europe du Sud (« Les partis de l’Europe du Sud sont les partis de la classe ouvrière, on ne peut pas oublier cela ») et ceux de l’Europe du Nord. Pour d’autres raisons que Mitterrand, il est le défenseur d’une gauche unie : « Nous comprenons que, dans les pays où le PC n’existe pas, on s’en passe. Bon, mais pas en Grèce où les Colonels sont encore menaçants... »
    C’est absolument l’inverse de ce que j’ai vécu à Berlin-Est avec les partis communistes. Certes, chacun des deux courants revendique son identité, mais, à Berlin, j’ai senti tomber le niet des Soviétiques. Là, personne n’est d’accord et tout le monde fraie son propre chemin. Franchement, je préfère !
    3 février
    Je n’écris plus rien qui vaille dans ce cahier au moins depuis la conversation avec Friedmann. C’est que j’ai fait une longue enquête chez les socialistes du Sud-Ouest, à Toulouse et en d’autres lieux, et que je m’y suis ennuyée à mourir.
    On ne m’y a parlé que des problèmes entre les socialistes, qui ne cessent de progresser, et les radicaux, notamment dans le Tarn-et-Garonne, ancien fief des Baylet et de La Dépêche du Midi , Alain Savary essayant de définir un modus vivendi avec eux, car l’intérêt national, m’a-t-il dit, est « de permettre aux radicaux de survivre, ce qui suppose pour nous des sacrifices locaux ».
    Inutile de dire qu’aucun socialiste ne tient à s’effacer pour faire de la place aux radicaux !
    J’ai interminablement parlé, et ceux que j’interviewais encore plus que moi, d’une circonscription du sud de la Haute-Garonne, où le conflit entre le candidat socialiste et le radical perdure depuis une dizaine d’années.
    De tout cela, comme l’écrivait André Gide, rien ne sort, sinon un grand mal à la tête et l’envie d’aller se promener... ailleurs que dans la Haute-Garonne !
    Au fond, les choses m’intéressent moins que les gens. Ainsi de Maurice Faure à Cahors. Peu d’hommes politiques me semblent à la fois plus décriés et plus méconnus que lui. Lui qui dit, à près de cinquante ans : « Ah, ne me demandez pas de quel côté de la barricade je suis, ça m’empêche de dormir ! » Lui qui soupire, avec le souvenir des élections législatives de 1967, où il a dû prendre en marche le train de la gauche unie entre le premier et le deuxième tour : « J’ai déjà fait le voyage dans un sens en 1967, je ne peux pas le faire aujourd’hui dans l’autre ! » Lui, reflète le malaise de tant de gens de gauche, radicaux ou socialistes, qui ont combattu avec sincérité, pendant des années, l’Union soviétique et les communistes français, qui ont jugé, depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale, que le communisme était le mal extrême, et qui, aujourd’hui, sont à la croisée des chemins, ou plutôt que Mitterrand a placés au pied du mur : l’alliance à gauche avec les communistes ou la droite avec Giscard et Chirac.
    Maurice Faure ne veut ni de l’un ni de l’autre. Il est au milieu du gué. Il y restera, s’il ne choisit pas.
    Que lui a-t-il manqué ? De quel choc, de quoi ne se relève-t-il pas ? D’avoir réussi trop jeune, et sans coup férir ? D’être prêt à toutes les

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