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Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1986-1997 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michèle Cotta
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construction européenne. Son argument : « Moi, je me suis battu pour qu’il y ait débat contre le traité de Maastricht. Les socialistes me traitaient alors par le mépris. Les Français ont pourtant dit : nous voulons l’Europe, mais le traité ne nous dit rien qui vaille. Et, aujourd’hui, au moment où tout peut être remis à plat, les socialistes déserteraient ! »
    Contrairement à l’axe défini par Juppé – on ne parle pas d’Europe, ça ennuie tout le monde –, Séguin fait entendre, dans cette ville qu’il ne connaissait pas, sa différence : « Oui, convient-il, la France est engagée dans l’Europe, il ne faut pas moins d’Europe, mais mieux d’Europe. » Il a une façon qui n’appartient qu’à lui de récupérer le thème européen au moment où personne n’ose plus en parler.
    À noter qu’il n’a pas dit un mot sur Juppé. Ni sur les quatre années où Balladur et Juppé ont été Premiers ministres.
    13 mai
    René Monory, que je rencontre dans son bureau du Sénat donnant sur les jardins du Luxembourg dont les arbres reverdissent, est ravi de cette dissolution : « Songez que Chirac a désormais les mains libres pour la négociation européenne. Personne, aucun pays ne va remplir les critères de Maastricht, d’où un gigantesque marchandage ! » À propos du temps de travail, il n’est pas, comme le sont tous les porte-parole de la majorité, vent debout. Il est partisan d’une grande liberté en la matière. « Je ne suis pas contre le fait que certains descendent à 30 heures par semaine. Dans ma commune, j’engage des salariés à temps choisi lorsqu’il s’agit d’un travail saisonnier : le ramassage des melons, par exemple. Je suis favorable à la flexibilité du temps de travail. »
    J’avoue que je ne m’attendais pas à entendre parler de melons par le deuxième personnage de l’État, mais rien ne m’étonne plus.
    Le Premier ministre qui aurait ses faveurs serait Édouard Balladur. Le jeu lui paraît ouvert, dans l’esprit du Président, entre celui-ci et Alain Juppé. Monory, lui, pousse de toutes ses forces en faveur de Balladur, persuadé que Chirac ne peut pas garder Juppé pour incarner un nouvel élan.
    Il a un mot très drôle sur Douste-Blazy après m’avoir dit qu’il avait pris de ses nouvelles et que le blessé n’allait pas trop mal, que son métier de médecin lui avait sans doute sauvé la vie. C’est lui qui, paraît-il, a diagnostiqué, quand il a été frappé, l’ampleur de sa blessure, et qui a exigé d’être immédiatement transporté à l’hôpital. Quelques minutes de plus et il était mort. « Il m’a dit un jour, raconte-t-il : “Pour moi, mon bleu de travail, c’est mon smoking.” »
    14 mai
    Nouveau départ en campagne, cette fois avec Laurent Fabius. Malgré la réserve qui est la sienne depuis que les médecins, les conseillers de l’hôtel Matignon et accessoirement lui-même ont étéattaqués par les hémophiles au sujet du sang contaminé 28 , il est aujourd’hui remonté comme en 14, cornaquant deux jeunes candidats, Christian Paul, qui cherche à se faire élire dans la Nièvre, dans la circonscription « historique » de Château-Chinon, celle jadis représentée au Parlement par François Mitterrand, et Gaétan Gorce, énarque lui aussi, sorti deux ans plus tôt du cabinet de François Mitterrand. Gorce est né dans la Nièvre ; en revanche, Christian Paul, né à Clermont-Ferrand, fait figure de parachuté.
    Dans l’avion qui décolle du Bourget, il ne me faut pas longtemps pour me rendre compte que Laurent Fabius croit à une victoire possible de la gauche aux législatives dont le premier tour a lieu dans dix jours. Les chances, selon lui, sont à cinquante-cinquante. « Actuellement, me dit-il, la tendance dominante est que la droite va s’en sortir ric-rac. En réalité, cent sièges peuvent basculer d’un côté ou de l’autre comme un rien. »
    À son avis, si les élections avaient eu lieu à la date normale, c’est-à-dire en 1998, la gauche aurait gagné les doigts dans le nez : Juppé ne pouvait éviter un tour de vis dans l’année qui vient ; le débat européen, avec les mauvais chiffres français, aurait mis Chirac en position difficile. « Aucun doute : si les élections avaient eu lieu à leur date, on aurait jugé sur le bilan de Juppé, point final. »
    Le problème, particulier au PS, est que ses candidats nouveaux n’ont pas eu le temps de se faire

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