Cathares
vois, je ne te suis plus. Si tu veux que je t’aide, tu devras être plus clair.
Le Bihan le regarda avec un franc sourire.
— Tu m’as déjà beaucoup aidé, lui dit-il. Je ne t’en demanderai pas plus. En tout cas, pas aujourd’hui. Je peux prendre la voiture de ton fils demain ?
— Bien sûr, pas de problème !
— Je crois que ce grand cachottier de Rahn va devoir me dévoiler ses secrets.
48
Le Bihan ne put réprimer un bâillement. Cela faisait déjà deux heures qu’il patientait devant le bar-tabac d’Ussat en guettant attentivement les allées et venues de la patronne. Mais depuis qu’il était arrivé, la flamboyante Betty n’avait jamais été seule et il restait encore à ce moment-là quelques clients dans l’établissement. L’historien se dit qu’il n’avait d’autre choix que celui de prendre son mal en patience et qu’il finirait bien par trouver le moment opportun. Un peu plus tard, son attention fut attirée par deux curistes qui rentraient au centre du village après une randonnée dans la nature. À leur habillement, il en déduisit qu’ils devaient être anglais. L’homme marchait en s’aidant d’une de ces grandes cannes de marche sculptées dans un long morceau de bois. Il l’avait recouverte de petits écussons métalliques qui rappelaient les différents périples qu’il avait déjà accomplis. Le Bihan avait toujours trouvé étrange cette manie qu’ont les voyageurs de conserver des traces matérielles des pays qu’ils avaient visités. Écussons sur les vêtements, étiquettes sur les valises, savonnettes et cendriers dérobés dans les hôtels... Si seulement il pouvait retrouver la valise ou la canne de marche d’Otto Rahn, tout serait tellement plus simple !
Ces pensées l’avaient distrait un court instant de sa surveillance. Le temps pour Betty de mettre à la porte son dernier client qui, de toute évidence, n’était pas venu à Ussat profiter des bienfaits de l’eau. Quelques instants plus tard, la blonde fermait son établissement et s’engageait sur la rue qui menait à la nationale, de l’autre côté de la rivière. Elle passa devant la bâtisse qui avait jadis porté le nom d’hôtel des Marronniers sans lui jeter le moindre regard et poursuivit sa balade d’un bon pas. Le Bihan se souvint d’un détail que lui avait confié Mireille. Betty était très soucieuse de son physique. Elle prétendait que de grandes promenades quotidiennes la maintenaient en forme et surtout raffermissaient son corps. Le Bihan roulait loin derrière elle et assez doucement pour ne pas se faire remarquer. Il garda la même allure, le temps que Betty se soit éloignée de la zone habitée, et puis il accéléra. Betty ne remarqua pas la 2CV jusqu’à ce que celle-ci ralentisse et que son chauffeur baisse la vitre du côté passager.
— Betty ? lui lança Le Bihan.
— Encore vous ! s’exclama-t-elle en lui lançant un regard noir. Vous n’en avez pas assez de me harceler ?
— J’aurais encore aimé vous poser une question, montez !
La blonde s’arrêta et toisa la voiture et son conducteur avec le même dédain qu’une dame de la haute qui aborde un larbin.
— Je n’ai plus rien à vous dire ! lâcha-t-elle. Fichez-moi la paix ou j’appelle les gendarmes !
— À la bonne heure ! Je crois qu’ils seront heureux d’apprendre les petits secrets de vos diverses activités pendant la guerre.
Cette fois, Betty ne se contenta plus de lui décocher un regard noir. Elle frappa du poing un grand coup dans la portière qui fit craindre à Le Bihan de devoir s’en expliquer auprès de son propriétaire.
— Écoute, sale fouineur, lui lança-t-elle sur un ton menaçant. Tu n’as aucune preuve de ce que tu avances et tes méthodes d’intimidation ne marchent pas avec moi. Je ne suis pas le genre de femme qui s’en laisse conter par des minus dans ton genre !
— C’est dommage, répondit Le Bihan sans se laisser démonter. Je suis certain que les gendarmes aimeront écouter l’histoire du pauvre Richard Fritz.
À l’évocation de ce nom, Betty se raidit. Elle parut hésiter un instant et puis entra dans la voiture. Pour ne pas regarder son chauffeur, elle fixait un point imaginaire, au loin sur la route.
— C’est encore cette peste de Mireille, hein ? Il fallait toujours qu’elle fouille dans mes affaires. Je suis bien contente qu’elle ait dégagé le plancher !
— Avouez que cela n’est pas très
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