Ce jour-là
passerais davantage de temps sur le terrain, au combat. Lorsque je me suis engagé après l’université, mon père ne souleva aucune objection.
Comme tous mes camarades SEAL de l’équipe, j’étais très motivé. Et une fois le BUD/S terminé, j’étais déterminé à devenir le meilleur des SEAL. Je n’étais pas le seul à être dans cet état d’esprit. Il y avait tout un bataillon de types exactement comme moi. On luttait pour garder le rythme. On appelait ça « le train à grande vitesse » : c’était difficile d’y monter, difficile d’en descendre, et une fois à bord, on avait intérêt à s’accrocher parce que c’était un sacré voyage.
En réalité, nous avions deux familles : les types de l’unité et notre famille à la maison. La mienne était très unie. Mon autre famille, chez les SEAL aussi, et mes liens avec mes camarades, comme Phil, Charlie ou Steve tout aussi forts.
Maintenir un équilibre entre travail et vie de famille était compliqué pour beaucoup. Les divorces amers n’étaient pas rares. Nous rations les mariages, les enterrements, les vacances. Nous ne pouvions pas dire non à la Navy, mais on pouvait dire non à nos familles. Ce qui arrivait souvent. Il était difficile d’avoir du temps libre. Le travail primait. Il prenait tout et donnait peu.
Le plus drôle, c’est qu’on se voyait même en dehors des déploiements, pendant les permissions. Nous venions pour nous occuper de notre matériel, faire du sport, ou régler un problème de dernière minute avant le départ.
Le secret honteux, c’est que tout le monde adorait ça.
Nous n’attendions qu’une chose : être rappelés. Le reste passait après.
En 2009, j’en étais à mon onzième déploiement. J’étais devenu le bras droit de Phil. Depuis 2001, la seule pause que j’avais eue avait été ma formation à la Green Team. Si on peut appeler ça une pause ! Huit années d’affilée à partir en mission ou à s’entraîner en vue de la prochaine. J’étais devenu plus affûté, plus mature. Je progressais, et des nouveaux arrivaient. Ils avaient de l’expérience au combat, ils étaient meilleurs que moi quand j’avais terminé la Green Team. C’était tout le commandement qui était meilleur. Nous nous occupions surtout de l’Afghanistan. Même avec le ralentissement des opérations en Irak, la cadence ne baissait jamais. Tous, nous voulions bosser, mais les plus anciens commençaient à sentir les kilomètres qu’ils avaient au compteur.
Steve était monté en grade. Il était responsable d’une équipe dans le groupe. Charlie était instructeur à la Green Team.
Lors des déploiements en été, nous étions très occupés, car l’offensive des talibans battait son plein. En effet, les combats étaient moins fréquents pendant l’hiver à cause du froid et des mauvaises conditions sur le terrain.
Au début de l’été, un soldat américain a disparu. On a tout laissé tomber pour le récupérer.
Le soldat de première classe Bowe Bergdhal avait été capturé le 30 juin 2009 par un groupe de talibans qui l’avaient rapidement conduit près de la frontière. Ils espéraient gagner le Pakistan. Nos services de renseignements avaient remonté toutes les pistes et nous avions fait plusieurs tentatives pour le récupérer, sans résultat. C’était une course contre la montre pour le retrouver avant qu’ils le fassent entrer au Pakistan. On craignait que les ravisseurs ne le revendent à un autre groupe comme le réseau terroriste Haqqani, allié des talibans.
Moins d’un mois après sa disparition, les talibans nous firent parvenir une vidéo de Bergdhal devant un mur blanc, habillé en tunique bleu layette et sarouel typiques de la région. Il était mince, avec un long cou de poulet. Il paraissait effrayé.
Peu après l’arrivée de cette vidéo, un soir, on nous fit savoir qu’on l’avait peut-être repéré.
« D’après les renseignements, il se trouverait aujourd’hui au sud de Kaboul », nous dit notre commandant, en pointant un endroit sur une carte au centre de l’Afghanistan. « Le tuyau manque beaucoup de précision, mais c’est une priorité. »
On nous rassembla pour un briefing dans le centre des opérations. Steve et son équipe étaient là aussi. Toute l’unité participait à l’opération. Le plan prévoyait un vol hors de portée des lance-roquettes, pour ensuite rejoindre la position. Cette méthode ne présentait pas autant de garantie
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