Ce jour-là
nouveaux équipements tous les ans.
Je l’ai présenté aux vendeurs dès le premier jour. Le second, tout le monde me demandait où était Walt. Dans un bar, le soir du troisième, je l’ai retrouvé entouré d’une cour de hauts responsables de la National Rifle Association (8) . Il avait un cigare aux lèvres et donnait des claques dans le dos et serrait des mains, tel un politicien en campagne. Tout le monde l’adorait.
Walt, un petit mec avec beaucoup de charisme.
Nous avons tenu une courte réunion avec l’équipe, et je leur ai annoncé que l’idée du sentier de chèvres était abandonnée.
« Nous remonterons la route principale et nous nous ajusterons au moment d’approcher la cible. Des questions ? »
Tout le monde secoua négativement la tête.
« Non, dit Charlie, on est parés. »
Fondamentalement, la tactique était simple. Nous connaissions les objectifs à réaliser et nous n’avions besoin que d’un cadre général. Quand on sait « tirer, se déplacer, communiquer », le reste se met en place tout seul. Les opérations, quand elles sont trop compliquées, tendent à ralentir l’exécution. Tous les hommes présents dans la salle de musculation ce soir-là avaient des années d’expérience. Les plans changeaient toujours, il était plus pratique de dresser de grandes lignes simples. Nous l’avions déjà fait et nous avions confiance les uns dans les autres.
La patrouille sortit par le portail et emprunta la route en dur en direction du village. Une belle route, probablement construite avec les impôts des Américains. À moins d’un kilomètre du poste, nous avons progressivement commencé à décrocher, nous détachant du groupe principal. Puis nous avons pris à droite ; direction notre vallée, par l’ouest.
Nous avons suivi ce chemin pendant deux heures. Il serpentait sur le flanc de la montagne et les épingles à cheveux se succédaient. Bientôt, nous sommes tombés sur un groupe de véhicules. Il y avait, garés sur le bas-côté, un camion Hilux et deux monospaces avec des galeries sur le toit. En passant, j’ai regardé à travers les pare-brise. Il n’y avait personne dans les véhicules.
Ils ne pouvaient pas aller plus loin : c’était la fin de la route.
Après, il fallait emprunter une piste étroite et raide pour s’enfoncer un peu plus dans la vallée. Je sentais les effets de l’altitude à chaque pas, le poids de mon équipement me ralentissait. Je commençais déjà à fatiguer et nous n’étions qu’à mi-chemin. J’espérais que tous ces efforts en vaudraient la peine.
Au bout d’une heure, j’ai aperçu les bâtiments cibles et au moins deux faibles lumières à côté. Des bosquets me cachaient presque complètement la vue. Les maisons en pierre et en terre paraissaient sortir des parois de la vallée.
Il aurait été plus facile d’emprunter le chemin d’accès normal au village, mais des sentinelles le surveillaient. Il ne fallait pas risquer de se faire repérer. Les drones continuaient à nous signaler la présence de mouvements dans les arbres, autour de la route et près de la cible.
Comme toujours, l’effet de surprise serait déterminant. Très souvent au Kunar, la voie la plus rapide entre deux points est un sentier de chèvres. On disait la même chose pendant mon enfance en Alaska. Mais là, nous n’avions pas le choix, il fallait quitter la route. Personne ne tenait à stagner dans cette vallée jusqu’au lever du soleil.
« Nous allons monter tout droit jusqu’à la crête et les contourner », dit notre chef de troupe dans la radio.
Mes jambes protestaient, mais nous savions que c’était la bonne tactique. Le patron était sûr qu’on allait retomber sur le sentier de chèvres initial une fois là-haut.
Nous avons entrepris l’escalade de la montagne, à la recherche du sentier. Plusieurs fois, j’ai dû resserrer ma bandoulière et m’agripper à des rochers pour franchir un passage. Quand je n’arrivais pas à monter tout droit, je zigzaguais. Personne ne parlait, mais mes coéquipiers grognaient.
Nous avions tous conscience de l’enjeu. Mais pour neutraliser la cible, il fallait lui tomber dessus. Pas le choix. À chaque pas je me disais qu’il valait mieux que la cible en question en vaille la peine.
Après deux heures d’ascension, nous avons fini par trouver le sentier de chèvres. Je ne sentais plus mes jambes et j’avais du mal à respirer, tant j’étais fatigué. Mais le fait
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