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C'était De Gaulle - Tome I

C'était De Gaulle - Tome I

Titel: C'était De Gaulle - Tome I Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Peyrefitte
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courtier entre les deux et s'estime déjà heureuse si elle arrive à être présente à la table. Les intérêts de l'Europe sont sacrifiés.
    « Seulement, depuis Yalta, l'Europe s'est développée. Elle a recommencé à devenir elle-même. Dans vingt ans, elle doit être aussi puissante que les États-Unis. Sa dépendance aurait alors quelque chose de monstrueux, de contre-nature. Alors, l'Europe pourra montrer les dents en face des Soviétiques, et montrer qu'elle n'acceptera pas qu'ils veuillent poursuivre leur avancée et leurs menaces. Et l'Amérique, qui aurait tendance à pactiser avec les Russes en sacrifiant le statut de l'Allemagne, doit comprendre qu'il ne lui servira à rien de nous trahir.
    « Pour les Américains, le monde est divisé en deux idéologies: l'idéologie communiste, l'idéologie capitaliste. Il faut choisir entre les deux : "Qui n'est pas avec moi est contre moi."
    « Mais ce n'est pas aussi simple. Il y a les Américains, dont les intérêts sont spécifiquement américains. Il y a les Européens, dont les intérêts ne se confondent plus avec les intérêts américains, même si, pendant un certain temps, l'intérêt des Américains a passé par leur installation militaire en Europe. Il y a l'Asie, il y a l'Afrique. L'Afrique ne peut être assistée que par l'Europe. L'Amérique latine se trouvera prise dans le dilemme de la dépendance à l'égard de l'Amérique du Nord, ou du communisme : auquel cas, elle risque de sombrer dans le communisme par désir d'échapper à la dépendance nord-américaine ; à moins qu'elle ne soit assistée par l'Europe. Quant à l'Europe, son intérêt est qu'elle puisse se défendre elle-même et adopter sa propre politique. C'est cette politique, et elle seule, qui pourra faire lever le rideau de fer. »

    « Entre gens de bonne compagnie »
    Au Conseil du 27 février 1963, Couve commente l'arrivée de M. Livingstone Merchant en vue des négociations sur la force atomique commune dans le cadre de l'OTAN : « Le problème se pose aujourd'hui dans des conditions très différentes :
    « 1. Une force franco-anglo-américaine aurait été une force multinationale ; notre refus l'a fait disparaître. Reste la force multilatérale, qui signifie une force américaine à laquelle on adjoint le plus grand nombre possible de mercenaires européens.
    « 2. Il y a une grande évolution aux États-Unis même. Le Pentagone, la Commission américaine de l'énergie atomique, sont hostiles au principe d'une internationalisation quelconque de l'arme atomique. Ils exigent le maintien du monopole absolu des Américains, qui n'est partagé qu'avec la Grande-Bretagne, et àcondition que l'arme atomique britannique leur soit subordonnée. Ils n'accepteront pas le moindre aménagement à la loi Mac-Mahon.
    « La conséquence technique immédiate, c'est qu'on ne parle plus des fameux sous-marins qui devaient être communs aux pays membres de la force multilatérale. L'amiral Rickover 3 a dit qu'il n'accepterait pas des équipages étrangers sur des sous-marins atomiques. Après une prise de position aussi éclatante, jamais la Commission de l'énergie atomique n'acceptera de faire des propositions qui iraient en sens contraire.
    GdG. — La marine américaine n'acceptera pas d'autoriser des marins étrangers à faire partie des équipages des sous-marins atomiques, même si leur nombre était réduit à 20 % de l'équipage. Top secret ! Hors d'ici, les Européens ! Nous n'admettons que les Anglais. Nous restons entre gens de bonne compagnie ! (Rires.) Tout cela est dérisoire ! Pourquoi construire à grands frais des sous-marins, s'ils ne sont pas utilisables par ceux qui sont invités à cotiser ? »
    Couve attend quelques secondes, puis reprend calmement : « Si on cherche à constituer un petit Conseil atomique au sein de l'Alliance atlantique, les Américains se réserveront un droit de veto.

    GdG. — Autrement dit, les alliés de l'Amérique accepteraient de payer très cher le droit de voir l'Amérique s'opposer à l'emploi qu'ils pourraient faire de l'arme qu'ils auraient achetée !
    Couve. — Partout, c'est donc la confusion. Mais en Grande-Bretagne, c'est le désarroi. Les Anglais ne savent absolument plus quelle pourrait être leur politique nucléaire. Leur livre blanc montre que toute la politique anglaise est en état de suspension dans le vide.
    « Il est probable qu'on va à une victoire des travaillistes. Eux, au moins, ils vont jusqu'au bout de la logique de

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