C'était De Gaulle - Tome I
reste le directeur de cabinet). — Il y a des progrès certains. La coopération technique marche bien. La présence de nos hauts fonctionnaires en mission fait des miracles. C'est comme un mécanicienqui remet aussitôt en marche une auto dont la conductrice ne sait même pas ouvrir le capot. Les Algériens demandent que nos consuls soient chargés de régler le problème du vin... Tout ça, c'est bon.
« Ce qui est mauvais, ce sont les ministres algériens qui arrivent en France avec arrogance et ont des exigences extraordinaires. Ils veulent la réciprocité en tout ! Puisque nous installons un système français en Algérie de manière à pallier leur sous-administration, ils veulent qu'il y ait un système algérien en France : par exemple, des représentants du Trésor algérien qui surveilleraient notre système de trésorerie et de fisc en France. C'est comique. Ils veulent voir, à la Santé et dans les autres prisons de la région parisienne, si les Algériens ne sont pas torturés !
« Nous devons assurer nous-mêmes le contrôle des Algériens en France. Nous ne devons pas nous laisser envahir par la main-d'œuvre algérienne, qu'elle se fasse ou non passer pour des harkis. Si nous n'y prenions pas garde, tous les Algériens viendraient s'installer en France ! Nous ne pouvons pas admettre non plus qu'une police auxiliaire étrangère s'installe en France. Les vues des responsables algériens sont si éloignées des nôtres, sur tous ces problèmes, qu'il y a nécessairement des points de friction. »
Le Général a retrouvé sa sérénité : Pompidou exerce sur lui une action sédative. Il conclut : « Ce ne sont pas des questions insolubles ! Il faut que nous apprenions à faire une gymnastique de la coopération. Pour tout avantage donné, il nous faut une contrepartie, c'est-à-dire un avantage reçu. Nous devons à la fois être ouverts et fermés. »
Au Conseil du 16 janvier 1963, on examine la question de l'amnistie sur les événements d'Algérie (particulièrement, l'affaire du réseau Jeanson 3 ).
GdG : « Ce n'est pas parce que nous avons accordé l'indépendance à l' Algérie, qu'on doit couvrir de fleurs des gens qui ont combattu l'armée française. »
« L'Algérie n'intéresse plus personne »
Le Général m'avait annoncé qu'il traiterait aussi de l'Algérie et de la coopération franco-algérienne dans sa conférence de presse du 14 janvier 1963. Il n'en a rien fait. À l'issue du Conseil du 24 janvier, je lui demande pourquoi.
GdG : « Il y avait d'autres sujets plus importants dans l'immédiat. Et on ne m'a même pas questionné sur l'Algérie, ce qui prouve qu'elle n'intéresse plus personne.
AP. — Qu'auriez-vous dit si vous aviez traité ce sujet ?
GdG. — Eh bien, que l'Algérie est maintenant en bonne voie. C'est beaucoup moins désespéré que l'on n'aurait pu le craindre.
« Les dernières semaines ont révélé aux Algériens combien l'Algérie avait besoin de la France ; ils commencent à comprendre. Et puis, il en est des colères nationales comme de toutes les passions, elles retombent avec le temps. Le fanatisme algérien, qui s'était déchaîné contre nous, est en train de disparaître. En pratique, seuls les militants et les militaires étaient des fanatiques. Tout ça est en train de se tasser. Attendons encore quelques mois et vous verrez que la coopération franco-algérienne a un grand avenir.
« Il reviendra des Français en Algérie. Il est probable que ce ne seront pas les mêmes. Ce sont ceux qui s'y rendront au titre de la coopération : les Algériens mesurent combien ils en ont besoin. Mais qu'ils ne viennent pas avec l'idée de s'installer de père en fils ! Il faut venir avec une valise et être prêt à repartir aussitôt. »
« Ça vous est égal, Monsieur le ministre des Finances ? »
Le Conseil du 30 janvier 1963 commence par l'examen du décret sur le personnel enseignant en Algérie.
Broglie : « Il faudrait spécifier que la prime spéciale instituée par ce décret doit être versée mensuellement et non semestriellement.
GdG. — Qu'on écrive dans le décret que c'est mensuel ou que c'est semestriel, de toute façon, vous savez bien qu'on ne les paie pas ! »
Le Général jette un œil sévère du côté de Giscard, qui ne bronche pas.
Joxe appuie la demande de Broglie : « Les fonctionnaires français en Algérie ne sont pas payés depuis des mois, c'est scandaleux.
GdG (agacé que Giscard n'ait pas réagi). —
Weitere Kostenlose Bücher