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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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d’hommes dotés d’oreilles pour les entendre  (95) . »
    Or quelques-uns n’oubliaient pas. Ils ne pardonnaient pas. Ils savaient non seulement qu’Eichmann était vivant, mais connaissaient toutes les étapes de son existence et l’ampleur de ses crimes.
     
    Eichmann est né, le 19 mars 1906, à Solingen (Rhénanie), d’un père comptable à la Société d’électricité et des transports qui, plus tard, est devenu directeur commercial, à Linz (Autriche), de la Société d’électricité et de tramways. C’est là que le petit Adolf, dès 1914, a grandi et poursuivi des études médiocres, quatre ans d’études primaires et quatre ans de lycée technique. Son père a estimé que mieux valait s’en tenir là. On a vu le jeune Eichmann travailler quelque temps dans les mines, devenir stagiaire dans une usine de construction électrique avant de se voir, en qualité de représentant, engagé à la Vacuum Oil Company. Il y reste pendant cinq ans et demi, de 1928 à 1933.
    Au cours de cette période, s’est produit l’événement capital de sa vie : il est devenu nazi. Cela s’est fait assez curieusement. On ne parlait jamais de politique chez les Eichmann mais l’un des amis d’Adolf avait adhéré au groupe « jeunes » de l’Association des anciens combattants austro-allemands. Adolf l’y a suivi. Que ses nouveaux camarades souhaitassent le retour de la monarchie était le cadet des soucis du jeune homme.
    C’est le temps où sont apparus à Linz les premiers fidèles de Hitler. Dans les rues défilent les groupes de SA ou de SS. Ces nationaux-socialistes regardent beaucoup du côté des « jeunes » de l’Association des anciens combattants. Logiquement, ils cherchent à attirer vers eux ces garçons déjà motivés. Quand, dans une brasserie, le parti nazi organise une grande réunion d’information, Adolf Eichmann s’y rend. Pour voir. Il y rencontre un certain Kaltenbrunner, fils d’un avocat. Leurs pères sont amis. À l’issue de la réunion, le jeune nazi s’approche de lui :
    — C’est entendu, tu viens chez nous !
    Sans songer à discuter, Adolf répond :
    — Oui, c’est bon !
    Simple détail : Kaltenbrunner, au parti national-socialiste, milite dans la SS. Par voie de conséquence, Eichmann va devenir SS.
     
    Dans un premier stade, il conjugue l’exercice de son métier de représentant et l’entraînement du week-end – très dur – à la SS.
    La crise sévit en Autriche. Il est licencié. En désespoir de cause, il préfère regagner l’Allemagne. Il emporte une lettre de recommandation, signée Kaltenbrunner, pour la SS allemande. Sa vie change du tout au tout. Il devient, à Berlin, l’un des trois mille agents appointés du Sicherheitdienst – le SD – de Heydrich. Nous sommes en 1934, Eichmann a vingt-huit ans. Jusqu’en 1945, il ne quittera plus l’uniforme noir à tête de mort. Pour le moment, il n’est que sergent. C’est au début de 1935 – l’année où, à Nuremberg, Hitler proclame les lois raciales – qu’on lui réserve un poste au Service des affaires juives de la SS.
    Aussi consciencieux que scrupuleux, il estime que, pour accomplir sa mission, il doit apprendre l’hébreu et le yiddish. Il demande une bourse pour recevoir les leçons d’un rabbin. On la lui refuse  (96) . Il décide d’apprendre seul la langue de ses adversaires. Bientôt, il en saura assez pour lire les journaux imprimés en yiddish.
    Nommé en 1938 officier – Untersturmführer, c’est-à-dire sous-lieutenant –, il est envoyé au Moyen-Orient pour enquêter sur la situation en Palestine. Au retour, il rédige un rapport aussi violemment antisioniste qu’antisémite.
    Il a trouvé sa voie.
    L’antisémitisme est à la source même du nazisme. Au lendemain de l’arrivée de Hitler au pouvoir, la chasse aux Juifs a commencé en Allemagne. Pour le moment, il s’agit seulement de leur interdire toute participation à la vie de l’État. Le but recherché – et avoué – est de s’emparer de tout ce qu’ils possèdent et, autant que faire se peut, les contraindre à émigrer. Nommé à Vienne après l’ Anschluss , tantôt usant d’une brutalité inouïe, tantôt négociant patiemment avec les représentants de la communauté juive, Eichmann saisit des biens immenses tout en poussant la grande majorité des Juifs autrichiens hors des frontières. À Berlin, on s’émerveille. Décidément, on dispose d’un homme précieux. Ses qualités

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