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Charly 9

Charly 9

Titel: Charly 9 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Teulé
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du royaume, l’Europe doit ignorer les
progrès du mal qui te conduit au tombeau.
    — Pourquoi le gnome difforme
a-t-il encore conspiré ?
    — Anjou exilé en Pologne et te
voyant péricliter, ton plus jeune frère Alençon rêve de la couronne de France et,
pour ce, s’est allié au Béarnais et autres Malcontents. À dix-neuf ans, il
estime que ce sera à lui de régner puisque Mes Chers Yeux a déjà un trône. Mais
ça, moi, je ne le veux pas. C’est Henri qui deviendra Henri III, roi de
France !
    Dégoûté, Charly 9 est aussi
fatigué des luttes intestines :
    — Je ne sais plus où j’en
suis ! Que deviendra donc tout ceci ? Que ferai-je ? Je suis
perdu, je le vois bien !
    Cette nouvelle déception n’est pas
faite pour arranger l’état du monarque. Ronsard, les paumes jointes, implore
Apollon de guérir son gentil roi même si en matière de poésie… il regrette le
choix des décasyllabes. L’atmosphère sourde est oppressante. À sa mère qui
recommande : « Ta réaction devra être plus violente qu’en février. Tu
as pardonné la première conjuration du mardi gras mais là, il faudra faire
couper des têtes ! » lui, répond : « Je ne veux plus de
sang. »
    De l’hémoglobine, il lui en coule
suffisament à la lèvre et à la paupière. Tandis que, près d’un mur, le crayon
de Ronsard voyage sur une feuille de papier que l’art veloute, Charly 9
décide :
    — Mamma !…
    Le roi ne regarde presque plus
jamais en face la personne à qui il s’adresse ou parfois il la regarde avec une
expression extraordinaire :
    — Ma mamma !… Je crie aux
méchants, aux traîtres, et désire aller voir Alençon pour lui donner sur les
doigts, lui dire : « Cadet, je veux te sortir de la cuisine
politique » et s’il refuse le faire jeter dans un sac en l’eau où tout
sera dit !
    Visage qu’en rides, il rassemble,
penche son corps voûté sur un long sceptre, pointe au sol, comme une canne qui
tremble. À un membre du Conseil qui se propose pour porter le symbole de la
royauté, le monarque répond : « Je suis assez fort et puissant pour
tenir mon sceptre et n’ai besoin de l’aide d’autrui. » Catherine de
Médicis lève les yeux au plafond décoré de têtes de lions et de guirlandes de
chênes :
    — Reste assis… Tu vas finir,
avec tout cela comme effort, par ne tuer trop tôt que toi-même.
    Charly 9 insiste et se redresse
encore mais il ne peut rester debout :
    — Mes jambes ne sont plus si
légères et volantes qu’avant.
    Amas retombé dans son trône, pendant
que la mère ordonne aux gens du Conseil : « Ayant appris la menace
des fantassins en Beauce, la Cour doit cette nuit même se sauver à Paris. Le
roi, ne pouvant évidemment tenir à cheval ni dans un carrosse où il serait trop
secoué, voyagera à bord d’une barque sur la Seine », Charly 9
s’empare de son huchet :
    — Bon, ben puisque c’est comme
ça je vais plutôt vous jouer du cor ! KRAA ! KRÏÏ !
KÊÊÊ !!!
    En soufflant, il projette des
étoiles de sang sur les cuirasses des gardes suisses.
     

 
38
    Partie du château de
Saint-Germain-en-Laye juste avant l’aube, la Cour s’arrête bientôt près d’une
rive de la Seine pour qu’on installe dans une barque le roi qui trouve que ça sent
autre chose que la vase des berges :
    — Snif ! Snif ! Il y
a une odeur de poisson pourri.
    — Qui a pendu ceci au dos de Sa
Majesté ? s’exclame un laquais, y décrochant un hameçon.
    — Nous sommes le premier avril,
justifie un page.
    — J’en ai marre aussi de ça…
soupire le monarque couché à bord de la frêle embarcation. Allez, batelier,
rame !
    La surveillance de Navarre et Condé
a été démultipliée. La reine mère les a fait monter avec elle dans son carrosse
protégé par mille trois cents soldats.
    — Hue !
    Sur la route très défoncée en cet
endroit de bord de fleuve, le lourd véhicule balance d’une telle inconstance
qu’il renverse presque ses occupants les uns sur les autres avec ses
mouvements. Dans des secousses qui auraient tué le roi de France, Catherine de Médicis
renifle :
    — Il y a ici une mauvaise
odeur. Henriot, avez-vous un poisson pourri accroché dans le dos ?
    — Non, pourquoi ?
    Le Béarnais, par la portière,
regarde la barque glisser sur la Seine à la vitesse du convoi terrestre et,
dedans, son royal beau-frère – sorte de mort qui serait encore joli bien que
transi et à demi caché en l’eau.

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