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Consolation pour un pécheur

Consolation pour un pécheur

Titel: Consolation pour un pécheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Caroline Roe
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avoua-t-elle.
    — Pour une femme paresseuse, tu travailles très dur.
    — Papa, pourquoi Yusuf était-il si troublé quand cette femme – maîtresse Ana – est venue vous trouver ?
    — L’était-il ?
    — Vous l’avez remarqué, sans aucun doute. Moi-même, j’ai trouvé que sa voix avait une sonorité étrange. Et il a pâli dès qu’elle s’est dévoilée.
    — J’imagine que cela a à voir avec sa vie d’avant, ma chérie. Comme il ne désire pas en parler, je n’ai jamais trop cherché à savoir comment il subvenait à ses besoins. Je sais seulement qu’il gagnait parfois un sou ou deux en travaillant. Et qu’il était affamé quand nous l’avons rencontré pour la première fois.
    — Je suppose qu’il a dû quémander son pain.
    Raquel était mal à l’aise : il lui semblait impossible que le jeune garçon vif et plein d’assurance qui vivait avec eux, ce membre de la maisonnée, eût pu être contraint à mendier ses repas.
    — Dès qu’il est arrivé, ta mère s’est écriée qu’il allait nous dévaliser de tout ce que nous possédions, et il a nié de manière à la fois bruyante et indignée. Sans ambages, il a déclaré n’avoir jamais rien volé de sa vie – sauf quelques miettes pour apaiser sa faim, pour reprendre ses propres termes. Maintenant que nous le connaissons mieux, je suis convaincu qu’il disait la vérité. Mais un partie du pain – puisque c’est bien cela qu’il évoquait – venait peut-être de chez…
    — La mère Rodrigue, fit Raquel en riant. Pauvre Yusuf. Peut-être croyait-il qu’elle venait l’accuser de vol après tout ce temps. Elle n’a même pas dû le reconnaître.
    — Si. Et elle s’est certainement rappelé le pain, mais elle n’a pas cru bon de le lui reprocher. C’est étrange, certaines personnes se font un monde d’un quignon de pain – une chose que notre Miriam va émietter pour les oiseaux.
    — Elle préférerait les nourrir que de manger elle-même, dit Raquel avec un bâillement.
    — C’est comme ce pauvre moine qui a perdu ses orteils. Joaquim. Accablé de remords pour avoir volé un peu de pain. Tu t’en souviens ?
    — Non, papa, il n’a jamais parlé de pain. Il a seulement dit avoir volé quelque chose.
    — Tu en es certaine ? insista son père. Il me semble bien qu’il était question de pain.
    — Non, vous avez suggéré qu’un être aussi simple avait pu prendre un morceau supplémentaire au dîner et se dire que c’était un crime aussi affreux qu’un meurtre.
    — C’est exact, reconnut son père.
    — C’était plus grave, pourtant. Joaquim était fébrile et ne tenait pas en place. Il ne cessait de s’agiter et de vouloir se lever. Sans cesse, il répétait qu’il avait fait une chose terrible. « Nous t’en guérirons », voilà ce que vous lui avez gentiment répondu, papa.
    — Moi ? s’étonna le médecin. Comme c’est étrange.
    — Il m’a parlé un peu plus tard alors que vous étiez en grande discussion avec le chirurgien.
    — Lui ? Je ne l’aurais pas cru capable de tenir une conversation.
    — Effectivement, il ne l’était pas. Il répétait ce qu’il avait déjà dit, il délirait un peu plus, c’est tout. Et ses mots avaient encore moins de sens. Mais à un moment il m’a attrapé la main et m’a tirée au point que mon visage était tout proche du sien. « Il fallait que je le fasse », m’a-t-il dit, ou quelque chose comme ça. Ensuite il m’a demandé si je comprenais et a ânonné « Ils m’ont obligé » à plusieurs reprises. Sa tête est retombée sur l’oreiller. « Ils m’ont forcé et maintenant je suis damné, a-t-il ajouté. Je ne veux pas brûler en enfer. Dites à Notre-Dame que je ne veux pas brûler en enfer. » Il me regardait comme s’il me connaissait bien, ainsi que le font les hommes en proie à la fièvre.
    — Je me souviens de ce regard…
    — J’aurais voulu qu’il me dise pour qui il me prenait, mais il n’en a rien fait. Pour finir, il a juré qu’il ne ferait jamais une chose pareille, et je crois lui avoir répondu que j’en étais persuadée, rien que pour le calmer.
    — « Ils m’ont obligé » ? répéta Isaac. De qui pouvait-il parler ?
    — Je n’ai pas pensé à le lui demander. En revanche, j’ai voulu savoir quel crime était le sien, et il a répété que c’était mal que de voler un objet sacré. Qu’il ne le voulait pas mais qu’on l’y avait forcé. Et que je devais

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