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Dans l'intimité des reines et des favorites

Dans l'intimité des reines et des favorites

Titel: Dans l'intimité des reines et des favorites Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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leurs amours ?
    — Jamais je ne pourrai plus demeurer en tête à tête avec lui, dit-elle. Il faut même qu’il parte sans essayer de me revoir.
    À cette idée, elle ne put s’empêcher de pleurer…
     
    Quelques jours plus tard, Henriette-Marie quitta Amiens pour se rendre à Boulogne, où elle devait embarquer. Anne d’Autriche l’accompagna en carrosse et, à deux lieues de la ville, s’arrêta pour lui faire ses adieux. Lorsqu’elles se furent longuement embrassées, Buckingham s’approcha et vint prendre congé de la reine de France. Un instant, ils se regardèrent en silence. Tous deux étaient très pâles. Puis le duc se pencha par la portière, à l’intérieur du carrosse, et prononça quelques mots. Tout en parlant, il chiffonnait les rideaux de la voiture : on s’aperçut alors qu’il cherchait à dissimuler ses larmes.
    Enfin, il s’inclina et regagna le cortège qui partait pour l’Angleterre.
    Anne reprit le chemin d’Amiens. Son émotion était si grande que la princesse de Conti, qui se trouvait assise à ses côtés, dit en arrivant que, « de la ceinture au bas, elle pouvait répondre au roi de la vertu de la reine, mais qu’elle n’en disait pas autant de la ceinture au haut, parce que les larmes de cet amant [228] avaient dû atteindre son cœur et que, le rideau l’ayant cachée un moment à elle, elle soupçonnait ses yeux de l’avoir du moins regardé avec pitié » [229] .
    Cette pitié fut-elle si grande qu’Anne consentit à donner un baiser au duc, comme le prétendent certains historiens ? Ce n’est pas impossible, et cela expliquerait l’acte insensé, extravagant, commis quelques jours après par Buckingham, décidément aveuglé par l’amour.
    Laissons M me  de Motteville nous exposer les choses : « La passion du duc de Buckingham lui fit faire encore une action bien hardie, que la reine m’a apprise, et que la reine d’Angleterre m’a, depuis, confirmée, qui la savait de lui-même. Ce célèbre étranger étant parti d’Amiens, occupé de sa passion et forcé par la douleur de l’absence, voulut revoir la reine, quand même ce ne serait que pour un moment. Quoiqu’il fût près d’arriver à Calais, il fit dessein de se satisfaire en feignant d’avoir reçu des nouvelles du roi son maître qui l’obligeait d’aller à la cour. »
    — Je dois porter un pli important à Sa Majesté la reine mère, dit-il.
    Et, sans autre explication, il abandonna Henriette-Marie, monta sur un cheval et retourna à Amiens au triple galop.
    Après une courte visite à Marie de Médicis, il se précipita chez Anne d’Autriche et sollicita une audience. On lui répondit que la souveraine, ayant été saignée le matin, se trouvait couchée et ne pouvait le recevoir. Il insista et finit, après de longs pourparlers, par être introduit dans la chambre de la reine où se trouvaient les princesses de Condé et de Conti. Anne était au milieu d’un grand lit à baldaquin. En voyant entrer son cher Anglais, elle ne put s’empêcher de sourire et murmura :
    — Quel fou !…
    Pourtant, nous dit M me  de Motteville, « elle fut surprise de ce que tout librement il vint se mettre à genoux devant son lit, baisant son drap avec des transports si extraordinaires qu’il était aisé de voir que la passion était violente et de celles qui ne laissent aucun usage de raison à ceux qui en sont touchés ».
    Très exalté, il éclata en sanglots et dit à la reine « les choses du monde les plus tendres ». Anne, à la fois émue et fort embarrassée par ces démonstrations, ne savait quelle contenance prendre. Alors, une vieille dame, la comtesse de Lanoi, scandalisée par l’attitude du duc, intervint :
    — Tenez-vous, monsieur ! Ce ne sont pas là des manières qui ont cours en France.
    — Je suis étranger, répondit assez grossièrement Buckingham, et je ne suis pas obligé d’observer toutes les lois de l’État.
    Et il recommença à baiser amoureusement les draps en poussant de gros soupirs.
    La scène devenait si burlesque que la reine en souffrit. Elle prit une voix sévère et, cachant son émotion, reprocha au duc de la compromettre par sa hardiesse. Puis, « sans être trop en colère », note M me  de Motteville, elle lui ordonna de se lever et de quitter la pièce. L’Anglais se redressa, salua profondément à plusieurs reprises et s’en alla, l’air égaré.
    Le lendemain, il revit Anne d’Autriche en présence de toute la

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