Dans l'intimité des reines et des favorites
cour, fit ses adieux et partit, « bien résolu de revenir en France le plus tôt qu’il lui serait possible ».
Anne d’Autriche, Marie de Médicis et leur suite rentrèrent à Fontainebleau à la fin de juin. Louis XIII les accueillit froidement et la jeune reine comprit qu’il avait été mis au courant des événements d’Amiens. Pas une fois, cependant, il n’y fit allusion : et c’est par M me de Chevreuse qu’Anne sut le lendemain qu’il avait chassé de la cour tous les serviteurs qui se trouvaient avec elle dans le jardin…
Pour se venger, ceux-ci racontèrent à qui voulait les entendre que la reine n’était pas aussi innocente qu’elle le faisait croire et qu’elle aimait passionnément Buckingham. Ces propos furent rapportés à Richelieu qui mijotait toujours dans son amertume de soupirant évincé, et des idées criminelles lui vinrent, paraît-il.
Deux mois passèrent. Deux mois d’été pendant lesquels on organisa des fêtes brillantes, et le roi sembla oublier les imprudences commises par son épouse. Mais, au début de septembre, Buckingham, qui se consumait loin d’Anne d’Autriche, demanda à revenir en France comme ambassadeur d’Angleterre.
Richelieu courut aussitôt chez Louis XIII et lui conseilla de s’opposer formellement au retour du duc. Le roi obéit. Lorsqu’il sut qu’il était indésirable en France, Buckingham fut très malheureux et chercha un prétexte pour se rapprocher de la reine. Comme il n’avait pas l’habitude d’employer des moyens mesquins, il décida de brouiller les deux couronnes et de faire éclater une guerre, avec l’espoir insensé de pouvoir un jour venir à Paris pour y signer un traité de paix et revoir Anne…
La lutte que menait alors Richelieu contre les protestants allait bientôt lui fournir l’occasion qu’il cherchait.
22
Pour revoir la reine, Buckingham pousse les
Anglais à secourir les protestants de La Rochelle
Il est impossible d’être amoureux et sage en même temps.
Bacon
Pendant que Buckingham se morfondait à Londres, Anne d’Autriche, enfermée dans sa chambre, cherchait à se venger de Richelieu. En apprenant que le cardinal s’était opposé au retour en France du beau duc, elle était entrée dans une violente colère et n’avait pas caché à M me de Chevreuse son intention de nuire par tous les moyens au premier ministre. Toujours serviable, sa pétulante amie s’était alors engagée à organiser un complot qui débarrasserait à tout jamais la France de ce fâcheux. Restait à trouver une idée…
Le destin, qui est un merveilleux auteur dramatique, fit alors entrer en scène un personnage qui allait permettre aux deux femmes de nourrir tous les espoirs : ce personnage était Monsieur, frère du roi, le beau Gaston d’Anjou, gai compagnon et coureur de filles, dont les exploits galants égayaient la cour. Sans que rien fasse prévoir une telle aventure, ce don Juan posa tout à coup son regard sur sa jolie belle-sœur, respira profondément et fut animé d’un beau désir.
Abandonnant aussitôt les dames qui contentaient jusque-là ses dix-huit ans peu exigeants, il suivit la reine pas à pas et fit tant et si bien que la jalousie du roi toujours en éveil ne tarda pas à être piquée. Or Louis XIII ne se contenta pas d’imaginer qu’il était peut-être cocu ; toujours compliqué, il pensa que Gaston, héritier présomptif de la couronne, souhaitait sa mort pour épouser Anne, et il en conçut une vive irritation.
Sans prendre le temps de réfléchir, il fit appeler Richelieu, lui exposa la situation et conclut :
— Il faut marier Monsieur !
Le cardinal, qui était également jaloux de Gaston, approuva avec une suave perfidie.
Aussitôt, on se mit en quête d’une épouse pour le frère du roi, et la reine mère, consultée, suggéra de choisir M lle de Montpensier qui était la plus riche héritière du royaume.
Le roi convoqua Gaston et l’informa de la décision qui venait d’être prise.
— Cette union est la seule que vous puissiez envisager pour votre bien et celui du royaume. Mon cousin, M. le Cardinal, est d’ailleurs de cet avis.
Monsieur était peu pressé de quitter le célibat ; il refusa catégoriquement de se marier et s’en alla fort irrité contre Richelieu.
Lorsqu’elles furent au courant de cette affaire, la reine et sa confidente comprirent que Louis XIII venait de leur donner l’allié qu’elles
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