Dans l'intimité des reines et des favorites
patentes qui faisaient Antoine d’Estrées gouverneur de l’Île-de-France et accordaient à Gabrielle d’importants domaines.
Voici le texte d’un de ces actes inspirés par le désir : Henry, par la grâce de Dieu, roi de France et de Navarre, Savoir faisons que Nous, voulant reconnaître comme notre ami et féal chevalier des Ordres, capitaine de cinquante hommes d’armes de nos ordonnances, le sieur d’Estrées, notre lieutenant général de l’Île-de-France, par les grands et recommandables services qu’il a faits à nos prédécesseurs et à Nous en diverses circonstances et voulant par les susdites considérations gratifier notre chère et bien-aimée Gabrielle d’Estrées, sa fille, avons donné et délaissé, donnons et délaissons à ladite dame nos terres et seigneurie d’Assy et ensemble le château de Saint-Lambert, avec les bois, terres, prés, etc., y appartenant.
Quelques jours plus tard, Gabrielle se trouvait, douce et ronronnante, dans le lit du Béarnais.
Nicolas s’aperçut tout de suite de son infortune et fit mine de protester. Aussitôt une charge extrêmement importante vint lui permettre d’élever convenablement ses deux petites filles : il fut nommé Gentilhomme de la Chambre du Roi…
Pourvu de ce titre savoureux, il vécut dès lors en fermant les yeux…
En octobre 1592, la cour errante du « roi sans capitale » s’installa à Saint-Denis. Gabrielle y vint rejoindre Henri IV qui la remercia publiquement en organisant une grande fête avec des violons.
Pendant quelques jours, le roi, oubliant de nouveau son trône, son royaume et son armée qui attendait, un peu déconcertée, qu’on lui donnât des ordres, se consacra entièrement au corps merveilleux de sa favorite.
Cette vie voluptueuse devait être de courte durée. Au début de novembre, le prince de Parme ayant fait son apparition avec des troupes nombreuses à la frontière nord-est, le Béarnais dut sortir du lit de Gabrielle, s’habiller à la hâte et se mettre en campagne pour parer à cette nouvelle menace.
Le lendemain, un personnage souriant arrivait à Saint-Denis. C’était Roger de Bellegarde qui voulait profiter de l’absence du roi pour essayer de reprendre sa place en un endroit dont il conservait bon souvenir.
En le voyant paraître, la favorite fut extrêmement émue. Elle n’avait pas cessé d’aimer le Grand Écuyer et le lui avoua sans détour, dès qu’ils furent seuls.
Le soir, ils étaient au lit, fêtant joliment leurs retrouvailles.
Henri IV aurait sans doute ignoré cette infidélité si le duc de Parme n’était mort subitement. Privée de son chef, l’armée ennemie, en effet, se disloqua aussitôt et le roi, n’ayant, dès lors, plus rien à craindre dans le Nord, revint à Saint-Denis où l’attitude gênée de Bellegarde lui donna quelques soupçons.
Un jour, il faillit bien avoir la preuve de son infortune. Voici ce que nous conte Sauval, dans son style savoureux :
« Le roi, étant parti fort matin pour exécuter quelque entreprise qu’il avait préméditée, laissa Gabrielle d’Estrées au lit, où elle demeura sous prétexte d’une feinte incommodité, pendant que Bellegarde, pour mieux cacher son jeu, publia qu’il retournait à Mantes ; mais, aussitôt que le roi fut parti, Arphure, confidente de M me Gabrielle, qu’on nommait ordinairement la Rousse, introduisit le duc dans un cabinet dont elle seule avait la clef, et l’en retira quand sa maîtresse se fut défaite de toutes les personnes qui lui pouvaient être suspectes. Pendant que ces deux amants ne songeaient qu’à goûter tous les plaisirs qu’une tendre passion peut donner, le roi, qui n’avait pu exécuter son dessein, revint à Saint-Denis. Épouvantée, Gabrielle appela Arphure, qui fit promptement entrer le duc dans le cabinet où il demeura sans bouger. »
Il était temps ; déjà le roi poussait la porte de la chambre. Voyant que sa maîtresse était encore au lit, il se recoucha près d’elle, sans se soucier d’un Conseil qui l’attendait, et se montra galant homme.
Mais l’amour a le pouvoir d’ouvrir l’appétit, « aussi, nous dit Sauval, eut-il envie de manger des confitures. Comme il savait qu’Arphure enfermait celles de sa maîtresse dans le cabinet qui donnait dans la ruelle, il en demanda la clef. M me Gabrielle répondit que cette fille l’avait emportée, et qu’elle était allée visiter quelque parent qu’elle avait dans la
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