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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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lui-même bordé d’un mur de pierre de dix pieds de haut du côté intérieur. L’entrée se faisait par un corps de garde, où un court tunnel passait sous le logement du portier et à côté d’un petit bureau, dans lequel ce dernier s’asseyait lorsqu’il était de faction. La grille ouverte livrait passage à des chariots qui entraient et sortaient, et nous nous retrouvâmes derrière un chargement de tonnelets de vin. Je regardai autour de moi avec intérêt. L’endroit était désert du temps de mon enfance, quand j’étais entrée en grimpant par-dessus des éboulis, mais je ne me rappelais aucun détail ; or, maintenant j’avais besoin de connaître le mieux possible la disposition des lieux.
    L’intérieur donnait une grande impression d’espace. De part et d’autre du corps de garde se trouvait un enclos, où une douzaine de vaches paissaient d’un air placide. Le chemin traversait ensuite une étendue herbeuse jusqu’aux anciens bâtiments de l’abbaye, transformés en habitation. Un passage voûté menait sans doute vers la cour principale, tandis qu’un second chemin, sur la droite, contournait l’édifice pour rejoindre des écuries. À côté de la maison, on créait un jardin ; des hommes retournaient la terre afin de former des parterres et installaient des treillis ; plus loin, quelques arches en ruine et les bases de piliers de pierre marquaient le site où se dressait jadis l’abbatiale.
    — Les pierres ont servi à bâtir l’église du village, là-bas, expliqua Matthew, qui chevauchait près de moi, en désignant une tour visible au-delà du mur extérieur. Dans l’ancien temps, les villageois possédaient leur propre entrée dans l’église abbatiale. Maintenant, ils ont St Thomas, au village. Je fais respecter la loi sur l’assiduité à l’église et j’assiste aux offices avec régularité, mais une petite chapelle est aménagée à l’intérieur de ma maison. Autrefois, c’était le parloir réservé aux visites, dans la partie la plus ancienne de l’édifice, et c’est là que nous prononcerons le « oui » sacramentel. J’ai préparé la cérémonie pour aujourd’hui, dans l’espoir que vous seriez rétablie à temps. Oh, Ursula, je suis si heureux que vous alliez mieux ! Je n’ai fait que prier pour vous, hier. Tout est prêt. Le prêtre de St Thomas croit que nous nous sommes unis à Faldene dans la plus stricte intimité.
    — Je suppose que vous écoutez la messe, dans votre chapelle.
    — En effet. J’ai un prêtre à demeure, un vieil homme qui est aussi l’un de mes oncles : Armand de la Roche. Il célèbre la messe. Ursula, croyez-moi : avant longtemps, vous y prendrez goût vous aussi.
    — Peut-être, répondis-je d’un ton morne, et il n’insista pas.
    Nous franchîmes le passage, débouchâmes dans une cour bien entretenue, et soudain nous fûmes entourés par l’agitation que suscite toute arrivée dans une grande demeure : les chiens aboyèrent, les poules s’égaillèrent en tous sens, des gens surgirent pour nous accueillir. À l’évidence, on nous attendait. Pendant que je gisais sur mon lit de douleur dans la plus belle chambre de Faldene, les allées et venues entre le manoir et Withysham s’étaient succédé.
    Brockley emmena les chevaux, tandis que Dale et moi étions conduites à l’intérieur. Je fus présentée à l’oncle Armand, un vieux Français en soutane noire, puis à un grand Anglais taciturne aux épaules voûtées, qui était l’intendant, Mr. Malton, et enfin à la gouvernante, elle aussi française, Mme Montaigle. Elle avait les traits durs, les cheveux grisonnants et des manières brusques, sauf quand elle regardait Matthew. Alors, les lignes de son visage s’adoucissaient et ses yeux pâles fondaient de tendresse. De toute évidence, elle l’adorait.
    J’allais infliger une peine cruelle à ces gens.
     
    Il y avait eu en effet des allées et venues. Les tonnelets de vin que j’avais vus en arrivant étaient destinés au festin de noces, et l’on m’avait désigné une chambre où je pourrais me préparer. Mme Montaigle avait trouvé et nettoyé une très belle robe, qui avait appartenu à la mère de Matthew. Elle était en satin bleu pâle brodé de fleurettes dorées, et s’ouvrait sur un jupon crème où courait la même broderie fleurie. Je serais d’une élégance appropriée pour l’occasion.
    L’attitude de Mme Montaigle à mon égard exprimait un mélange de doute

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