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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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votre propriété familiale, madame ? demanda Brockley avec respect.
    — Oui. On pense qu’elle a été octroyée à l’un de mes ancêtres par le roi Harold, avant l’époque de Guillaume le Conquérant. En fait, avant qu’Harold lui-même devienne roi, à en croire la légende. Je n’y serai pas la bienvenue, toutefois, je le crains.
    À la grille, Harry Fenn, le portier, qui dans mes souvenirs avait toujours eu les cheveux blancs, sortit pour nous barrer le passage, aussi revêche que d’habitude. Harry Fenn n’avait jamais eu d’affection pour moi, ni moi pour lui. C’était un serviteur dévoué, qui avait réservé sa loyauté à mes grands-parents tant qu’ils étaient en vie, et la vouait désormais à mon oncle et à ma tante. Il me considérait donc, lui aussi, comme une tache sur leurs nobles armoiries.
    — Dame Ursula. Quelle surprise !
    — Tant que cela ?
    Il savait sans l’ombre d’un doute que Meg était ici, auquel cas mon arrivée ne pouvait l’étonner. Il s’empara de la bride d’Étoile.
    — Vous feriez mieux d’attendre ici que je vous annonce. Je ne suis pas sûr que dame Tabitha soit en mesure de vous recevoir. Descendez.
    — Non, merci. Nous y allons directement.
    — J’ai des ordres, dame Ursula.
    J’avais raison. Il était au courant pour Meg. Je lançai un coup d’œil à Brockley, qui leva sa cravache.
    — Vous avez entendu ma maîtresse !
    Harry, l’air sombre, s’empressa de lâcher la bride.
    — Je préfère attaquer par surprise, dis-je en piquant des deux.
    Il y avait eu du changement, en mon absence. On avait introduit l’art topiaire dans le jardin à la française, où les buis étaient désormais taillés en forme de coquelets et de têtes de chevaux. On avait arraché le lierre qui couvrait jadis les murs presque jusqu’au sommet des tours crénelées flanquant la façade. La maison devait être plus claire, à l’intérieur, mais les pierres grises dénudées lui donnaient une apparence sévère.
    Mue par une impulsion, je menai mes compagnons vers l’arrière, où une cour s’étendait entre les deux ailes, les écuries formant le quatrième côté. Les portes donnant sur cette cour restaient souvent ouvertes. En chemin, j’avais conçu un plan pour forcer mon oncle et ma tante à me rendre Meg, mais je préférais éviter un affrontement direct. Si je le pouvais, je comptais faire irruption dans la maison, la trouver et l’emporter.
    On entrait par le bâtiment des écuries. Nos sabots résonnèrent sous la voûte et nous débouchâmes dans une cour en pleine effervescence. Les palefreniers bouchonnaient les chevaux en plein air et soignaient l’un d’entre eux en lui baignant la patte antérieure dans de l’eau froide. C’était le plus bel animal que j’aie jamais vu. Un pie-fauve.
    Je tirai si fort sur les rênes qu’Étoile secoua sa crinière en guise de protestation.
    Ces derniers jours, je m’étais dit une ou deux fois que si, moi, j’avais commis un meurtre, je me serais séparée d’une monture qui attirait autant l’attention. Mais William Johnson et ses amis n’avaient aucunement conscience qu’on les poursuivait, et si le fameux pie ressemblait à celui-ci – pouvait-il en exister deux ? – je ne m’étonnais plus que son propriétaire tînt à le garder.
    « Pie » est un mot agaçant. Il fait songer à un oiseau, à une lettre grecque, voire à une vache. Rien en lui ne permet de décrire, ne fût-ce que de loin, la beauté de cet animal. Sa robe d’un alezan doré semblait éclaboussée de neige ; sa tête fine, fièrement dressée, et ses longues épaules obliques évoquaient le désert et la course sans effort. C’était un hongre, châtré sur le tard à en juger par la crête sur son encolure robuste, et sa queue désinvolte semblait une cascade blanc et fauve. Il était superbe.
    Je ne pouvais en détacher mon regard et j’entendis Brockley étouffer une exclamation de stupeur. Les garçons d’écurie s’étaient interrompus et se tournaient vers nous. Oubliant toute subtilité, je désignai le pie-fauve et demandai :
    — À qui appartient-il ?
    Le garçon qui s’en occupait ne me connaissait pas, mais, impressionné par mon ton péremptoire, il répondit :
    — À messire Johnson, de Withysham.
    — Withysham ?
    Je restai perplexe, puis je me rappelai que l’ancien monastère avait été transformé en gentilhommière. Alice Juniper en avait fait mention, avant mon départ

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