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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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réfugier dans un endroit familier, bien qu’il fût infesté de Faldene. J’avais été stupide et, maintenant, Meg le payait.
    — Je le répète, dit ma tante, on ne peut tenir cette conversation ici. Venez à l’intérieur.
    Je fis signe à Dale, et nous la suivîmes dans le grand hall, qui demeurait le centre vital du manoir comme aux temps médiévaux. C’était une salle immense, orgueilleusement décorée d’épées et de lances héritées de nos ancêtres qui s’étaient battus à Crécy et Azincourt. Ma mère m’avait raconté que, lorsqu’elle avait été renvoyée de la cour en disgrâce, étant enceinte de moi, ses parents lui avaient fait parcourir le hall en lui montrant ces reliques, et l’avaient accusée d’avoir trahi leur honneur.
    Cela lui avait paru injuste, car certains de nos nobles ancêtres n’avaient pas été des modèles de vertu, ce dont il restait des preuves concrètes. Chez les Faldene, on avait souvent de gros sourcils. C’était parfait pour les hommes – ceux d’Oncle Herbert rendaient son visage impressionnant –, mais cela constituait pour les femmes une véritable épreuve. Ma mère et moi avions échappé aux sourcils Faldene, mais pas mes cousines. Mary en particulier consacrait beaucoup de temps à les épiler pour leur donner une forme plus séante. Or, le même trait physique surgissait assez souvent parmi les villageois et les métayers de la région. Il était évident qu’autrefois, certains hommes de la famille s’étaient montrés prodigues de leurs faveurs.
    La salle était splendide, néanmoins, et lumineuse grâce aux immenses fenêtres de la façade et à celles, plus étroites, donnant sur la cour de derrière. Une servante – pour moi, nouvelle – apporta aussitôt des coupes de vin sur un plateau. Je m’assis et, d’un signe du menton, j’indiquai à Dale de prendre un siège et une coupe. Elle obéit non sans méfiance. Elle en savait assez au sujet de Tante Tabitha pour que sa présence la rende nerveuse, et elle la fixait tel un baril de poudre placé trop près d’un feu de bois.
    Je bus une gorgée d’un air sombre et répétai que je souhaitais voir ma fille.
    — Où est-elle ?
    — À ses travaux d’aiguille. Elle partage la gouvernante de votre plus jeune cousine, qui en ce moment leur enseigne la dentelle. Elle se porte à merveille, bien mieux que dans cette chaumière, à gratter la terre et à nourrir les poules comme une fille de paysan. Comment avez-vous pu la laisser avec cette souillon paresseuse ?
    — Bridget n’est pas paresseuse.
    Je pouvais difficilement réfuter l’accusation de saleté. Ma tante remarqua l’omission et un éclair de triomphe passa dans ses yeux bleus.
    J’engloutis mon vin. J’avais passé l’essentiel des deux premières décennies de ma vie sous sa férule. J’étais revenue, poussée par la fureur, ma peur pour Meg et l’indépendance nouvelle que j’avais acquise au contact de Gerald et de la cour. Maintenant, le carcan des habitudes anciennes se refermait sur moi. Par un sursaut de volonté, je déclarai d’un ton ferme :
    — Tante Tabitha, je vais emmener Meg. Elle est ma fille. Il m’appartient de décider où et comment elle vit. Vous n’auriez pas dû la conduire ici.
    — Inutile d’être aussi abrupte. Certes, tu pourras la voir. Toutefois, m’avertit-elle, ne va pas t’illusionner. Elle ne retournera pas avec toi dans cette chaumière. Tu as toujours été têtue, Ursula, refusant la place qui t’échoit de par la volonté divine, tout comme l’enseignement de l’Église authentique. Eh bien, détruis ton âme à ta guise, mais nous sauverons celle de Meg. Contrairement à toi, elle n’est pas le fruit du péché et elle reste, après tout, notre petite-nièce. Ici, elle sera élevée dans la propreté, recevra une éducation convenable et apprendra la vraie foi, au lieu d’être vouée à la damnation éternelle en tant qu’hérétique. Nous ne la laisserons pas partir.
    J’allais répliquer : « Sale hypocrite, vous l’avez amenée ici pour me blesser. Vous voulez l’humilier et en faire votre servante. Rendez-la-moi tout de suite, ou je vous dénonce pour faire dire la messe dans cette maison ! » C’était le stratagème que j’avais conçu en venant et je croyais qu’il accomplirait son effet. Les Mason esquivaient la loi, mais si les autorités recevaient une plainte officielle contre mon oncle et ma tante, elles seraient tenues

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