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Délivrez-nous du mal

Délivrez-nous du mal

Titel: Délivrez-nous du mal Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Romain Sardou
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avait révélé que les miracles de Cantimpré avaient une cause, et que celle-ci était à trouver chez un enfant. Un garçon nommé Perrot. Le prêtre Guillem Aba faisait tout pour ne pas le laisser découvrir et pour détourner la dévotion de ses fidèles sur Evermacher. Le village s’était laissé jouer, mais pas la vieille Ana.
    Bénédict haussa les sourcils en voyant que Moccha faisait référence au petit Perrot comme à l’« Enfant-Dieu » !
    Mais son émoi atteignit son comble lorsque, visant la dernière note ajoutée au dossier quelques semaines plus tôt, il apprit l’enlèvement mystérieux de Perrot à Cantimpré !
    Là, Bénédict se prit le front entre les mains.
    L’« Enfant-Dieu ! »
    Sa déroute était totale. Il avait l’impression d’être à la place de Rainerio, d’avoir lui aussi touché à quelque chose de trop sensible et tortueux.
    — Je n’ai rien compris. Je me fourvoie depuis le début.
    Il entendit la porte du cabinet s’ouvrir dans son dos.
    Le visage du diacre se figea.
    Bénédict Gui se retourna et reconnut le cardinal Moccha, cette fois vêtu de sa soutane pourpre.
    Derrière lui entrèrent Fauvel de Bazan et quatre gardes armés.
    La créature d’Artémidore de Broca souriait.
    — Vois-tu, j’étais convaincu de te retrouver tôt ou tard, Bénédict Gui, dit-il.
    Deux gardes se placèrent devant l’issue secrète du cabinet. Bénédict n’avait nulle part où fuir.
    Bazan reprit :
    — Ne t’avais-je pas averti de te défier d’une volonté aussi réglée, froide et calculatrice que la tienne ?
    Le cardinal Moccha observait Bénédict avec courroux.
    Quand avait-il été repéré ? Qui l’avait dénoncé ? Moccha ? Comment ? Si vite ? Pour la première fois depuis longtemps, Gui ne savait plus quoi penser…
    Il fut assommé. Fauvel ne voulait risquer aucune évasion. Il fut ligoté, poings et chevilles liés, la tête mise dans un sac de toile, et emporté par les gardes…

C HAPITRE 11
    — En quoi puis-je vous aider ?
    Le père Aba se figea.
    Il continuait d’errer avec fascination entre les rangs d’établis de la grande aile du monastère, découvrant de nouveaux sujets d’étude, insolites ou terrifiants.
    Le père Aba se retourna pour voir celui qui l’avait interpellé d’une voix chevrotante mais douce.
    C’était un vieillard, le dos courbé, des petits yeux chassieux et fatigués, portant une longue barbe et une bure brune à liseré blanc.
    Ce n’était pas tant le fait d’avoir été surpris qui glaça le sang d’Aba que cette impression soudaine de connaître ce vieil homme ! Il essaya de toutes ses forces de ne pas laisser paraître sur son visage le flot de pensées qui l’assaillait.
    L’homme le gratifia d’un sourire plein de bonté.
    — Je me nomme Arthuis de Beaune, dit-il.
    Là, le père Aba ne parvint plus à dissimuler : la surprise se lut sur toute sa figure.
    Arthuis de Beaune. Ce grand savant était venu à Paris, quinze ans auparavant ; le tout jeune Guillem Aba s’était précipité pour l’entendre discourir de son Bestiaire . Seulement, peu après cet exposé qui fit grand bruit, car il invoquait le droit d’étudier librement la nature, Arthuis de Beaune disparut ; nul ne savait où il s’était retiré, ni pour quelle raison il désertait le monde. Toutefois, à intervalles réguliers, il laissait publier les résultats de ses nouveaux travaux qui étonnaient par leur variété et leur audace.
    « Arthuis de Beaune s’est reclus ici… ? »
    Le vieil homme renouvela sa question :
    — Que cherchez-vous, jeune ami ?
    Le père Aba, déguisé sous l’habit d’un laïque du monastère, resongea aux fragments d’hostie miraculeuse changée en sang et en chair :
    — Mon nom est Cantaclerc, dit-il hâtivement, je viens éclairer les ombres qui pèsent sur le miracle eucharistique de Douai de 1254.
    Arthuis de Beaune hocha la tête, signifiant qu’il avait à l’esprit l’histoire de ce prodige.
    — Le pain de l’autel s’y est transformé dans la bouche d’une vierge en un morceau de viande sanguinolent, commenta-t-il. La question demeure : est-ce de tissu humain ou animal ? Si vous venez apporter la réponse, vous libérerez d’un poids notre bon Aimé Davril qui étudie ces miracles depuis dix ans. Venez-vous d’arriver au monastère ?
    — J’y suis depuis quelques heures.
    Beaune sourit :
    — Il vous faudra des jours avant de vous familiariser avec tout ce

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