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Dieu et nous seuls pouvons

Dieu et nous seuls pouvons

Titel: Dieu et nous seuls pouvons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Folco
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concluait en fournissant la preuve absolue
qu’il était bien dans la volonté du Seigneur que les femelles noires soient
fouettées d’abondance « sinon pourquoi Dieu, dont la sagesse est infinie
et notoire, les aurait-il dotées d’un aussi large et proéminent
postérieur » ?
    Souhaitée par tous, la venue
d’Anatole et de Rosalie Deibler fit grande sensation. N’était-il pas le dernier
à détenir LE pouvoir ! Sa chaleureuse accolade avec Hippolyte fut d’autant
plus appréciée que leur brouille depuis l’affaire des chauffeurs était connue
de tous.
    — Je savais que tu ne nous
ferais pas faux bond. Sans le seul d’entre nous encore en activité, cette
inauguration n’aurait pas été complète. Tes valets ne sont pas là ?
    — Ils sont de garde à Paris.
Ils auraient aimé venir, mais il fallait bien que quelqu’un reste, au cas où…
    On se pressa autour d’eux, chacun ayant
conscience d’être le témoin d’un moment d’histoire qui alimenterait les
conversations des années durant (« J’y étais »).
    Un verre de champagne à la main,
Alphonse Puech courtisait timidement la fille de l’ancien bourreau d’Arras
lorsque Casimir le héla :
    — M. Deibler vient d’arriver.
Venez le photographier avec le Septième au lieu de faire des ronds de jambe aux
invitées !
    Ne prisant guère le ton autoritaire
du valet, Puech prit son temps pour prendre congé de la jolie rouquine, puis
charger son nouvel appareil à cent francs, un Le Pascal de luxe, entièrement
automatique.
    Bien que la somme fût coquette,
Pibrac n’avait pas rechigné pour payer sans délai sa facture de cinq mille
cartes postales et lui avait commandé l’illustration de son futur catalogue. Pour
ce faire, Puech s’était déplacé jusqu’à l’oustal et avait entrepris de
photographier chaque objet du futur musée. Il n’avait pas terminé quand
Hippolyte le convia à immortaliser par quelques photos l’inauguration.
    — Si vous voulez bien faire
face au soleil, dit-il à Hippolyte et Deibler.
    Ceux-ci obéirent. Les autres
exécuteurs se placèrent en demi-cercle autour d’eux. Les femmes, les enfants et
les valets se mirent à l’écart.
    L’ayant vu jusqu’à ce jour manipuler
un énorme appareil monté sur tripode, Hippolyte s’inquiéta du format fort
réduit de la boîte noire qu’il s’apprêtait à utiliser.
    — J’espère que votre engin ne
fait pas des petites photos. Il nous en faut des grandes pour un jour comme
aujourd’hui.
    Puech le rassura.
    Une fois les clichés pris (douze),
Anatole Deibler ouvrit l’une de ses malles et en sortit un écriteau d’une
quarantaine de centimètres sur vingt-cinq où on lisait :
     
    IMPIE BLASPHEMATEUR SACRILEGE
    ABOMINABLE ET EXECRABLE.
     
    — Par tous mes billots !
Anatole, d’où tiens-tu ça ! s’ébaudit Hippolyte en tournant l’écriteau.
    Une étiquette collée signalait qu’il
avait été porté par le chevalier de La Barre, le 1 er juillet 1776,
sur sa route pour l’échafaud. Hippolyte reconnut l’écriture vieillotte de
Charles Henri Sanson.
    Sans répondre, Anatole produisit du
coffre un étui en ébène au couvercle clouté de lis d’or qui recelait, posé sur
un coussinet d’hermine, le mouchoir ayant servi à lier les poignets de
Louis XVI le jour de son exécution.
    Un murmure d’incrédulité circula
parmi ceux qui se pressaient autour d’eux. Hippolyte fit circuler les reliques
au fur et à mesure qu’Anatole les extrayait de son bagage avec des gestes de
roi mage.
    Tous ici connaissaient par cœur les
dernières paroles de Marie-Antoinette prononcées après avoir marché sur le pied
de Sanson : « Faites excuse, monsieur, je ne l’ai pas fait
exprès », mais personne n’aurait imaginé voir un jour la fameuse
chaussure. Pas celle de la reine, mais celle de Charles Henri, qu’Anatole fit
apparaître du coffre à merveilles.
    Un silence respectueux se fit à la
vue de l’élégant soulier à boucle (pied droit, taille 43). Hélas, aucune trace
du royal faux pas n’était visible sur le cuir noir.
    — C’est Mlle Sophie qui les
confie à ton musée, finit par expliquer Deibler. Elle est recluse au couvent de
Neuil-l’Espoir et n’a pas pu venir. De toute façon, à son âge et sur des routes
comme vous en avez ici, c’était préférable… Ton idée de musée l’a
enthousiasmée, aussi elle t’offre tout ce dont elle a hérité. D’après elle,
l’autre moitié a été détruite par sa

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