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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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glace.
    « Ce ne peut être juste. Ce serait trop cruel. »
    Le visage du frère Andrew devint cramoisi.
    « Mon garçon ! s’écria-t-il, mets-tu en question
les enseignements immémoriaux de la sainte Église ? Toi qui viens ici pour
demander d’être ordonné prêtre ? Quelle sorte de prêtre ? Un lollard
hérétique ? »
    Je le regardai, assis là, vêtu de sa soutane sale, couverte
de taches de nourriture, son visage mal rasé, rougeaud et renfrogné.
    « Donc, je devrais vous ressembler, c’est ça ? »
m’écriai-je sans réfléchir.
    Il se leva en poussant un rugissement et me flanqua une gifle
magistrale.
    « Espèce de vilain petit bossu ! Fiche-moi le camp ! »
    Je quittai la pièce en courant, les oreilles bourdonnant. Il
était trop gros pour me poursuivre (il mourut d’une violente attaque l’année
suivante). Je m’échappai de la cathédrale et, très malheureux, rentrai chez
nous en clopinant le long des sentiers de plus en plus sombres. Lorsque j’aperçus
la maison, je m’assis sur un échalier pour contempler le crépuscule printanier
dont la verdoyante fécondité semblait se gausser de moi. J ’avais le sentiment que si l’Église me
rejetait, je me retrouverais seul, n’ayant nulle part où aller.
    C’est alors que le Christ me
parla dans la lumière crépusculaire. Je dois le dire ainsi car c’est bien ce
qui se passa. Dans ma tête, j’entendis une voix qui cependant n’était pas la
mienne. « Tu n’es pas seul », disait-elle. Et soudain une sensation
de grande chaleur, un sentiment d’amour et de paix envahit tout mon être. Je ne
sais combien de temps je demeurai assis là, respirant à pleins poumons, mais ce
moment changea ma vie. Le Christ Lui-même m’avait consolé des paroles de l’Église,
censées être les Siennes. Je n’avais jamais entendu cette voix auparavant et
bien que j’aie espéré l’entendre à nouveau, agenouillé en prière ce soir-là et
dans les semaines et les années qui suivirent, cela n’arriva jamais. Mais
peut-être qu’au cours de notre vie nous ne pouvons jouir de ce privilège qu’une
seule fois. Beaucoup ne reçoivent même pas ce bienfait.
    **
    Nous partîmes au point du jour, avant le réveil du village. J’étais
toujours d’humeur morose et nous ne parlâmes guère. Comme il avait gelé très
fort, la route et les arbres étaient blancs de givre, mais nous eûmes la chance
qu’il ne neigeât pas encore au moment où nous sortîmes du village et reprîmes l’étroit
chemin entre les hauts talus boisés. Nous chevauchâmes toute la matinée et jusqu’en
début d’après-midi. Enfin la forêt s’éclaircit et nous pénétrâmes dans une
région de champs cultivés, tandis qu’apparaissaient un peu plus loin les pentes
des South Downs. Nous suivîmes un sentier, gravissant la colline où paissaient
des moutons efflanqués. Parvenus au sommet, nous vîmes à nos pieds rouler les
lentes vagues grises de la mer. Sur notre droite, une rivière sujette aux
marées traversait les coteaux et atteignait la mer après avoir franchi une
vaste étendue de marécages. Près des marais se trouvait une petite ville, et à
moins d’une demi-lieue se dressait un grand ensemble de bâtiments de pierre
jaune ancienne, dominé par une énorme église romane presque aussi vaste qu’une
cathédrale et entouré par un haut mur d’enceinte.
    « Voici le monastère de Scarnsea, annonçai-je.
    — « Après nos tribulations le Seigneur nous a
emmenés ici sains et saufs », cita Mark.
    — Je crains, hélas ! que nous ne soyons pas au bout
de nos peines. » Nous fîmes descendre la colline aux chevaux fatigués, juste
au moment où, venant de la mer, une neige légère commençait à tomber.

4
    N ous
guidâmes avec précaution les chevaux le long de la pente jusqu’à la route
menant en ville. Ils se montraient nerveux et cherchaient à éviter les flocons
qui s’écrasaient sur leur face. Heureusement, la neige cessa de tomber lorsque
nous arrivâmes.
    « Allons-nous rendre visite au juge de paix ? demanda
Mark.
    — Non. Il nous faut atteindre le monastère aujourd’hui
même. Si la neige se mettait à tomber de nouveau, on risquerait de devoir passer
la nuit ici. »
    Restant tout près du mur pour éviter de recevoir le contenu
des pots de chambre, nous longeâmes la grand-rue pavée de Scarnsea que
surplombaient les derniers étages des vieilles maisons. Le plâtre et les
poutres de nombre d’entre elles

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