Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
Vom Netzwerk:
la
vieille prit le perchoir et disparut à l’intérieur de la taverne, l’oiseau
agitant frénétiquement ses ailes tronquées pour garder l’équilibre.
    La foule se dispersa en chuchotant tant et plus. Je fis
remonter la ruelle à Chancery, flanqué de Pepper et de son ami.
    Pepper avait perdu de sa superbe.
    « On dit des merveilles de ce Pérou conquis par les
Espagnols. J’ai toujours pensé qu’on ne pouvait croire la moitié des fables
venant des Indes, mais ça, par Notre-Dame !
    — C’est une ruse, rétorquai-je. Tu n’as pas vu les yeux
de l’oiseau ? On n’y percevait pas la moindre lueur d’intelligence. Et la
façon dont il s’est arrêté de parler pour se nettoyer les plumes…
    — Mais il a parlé, monsieur, dit Mintling. On l’a
entendu.
    — On peut parler sans comprendre. Et si l’oiseau ne fait
que répéter les paroles de la vieille, réagissant comme le chien qui répond à l’appel
de son maître ? Il paraît que certains geais possèdent cette faculté. »
    Ayant atteint le bout de la ruelle, nous nous arrêtâmes. Pepper
fît un large sourire.
    « Il est certes vrai que les fidèles répondent sans les
comprendre aux momeries en latin des prêtres. »
    Je haussai les épaules. Cette sorte de sentiments à propos de
la messe en latin n’étant pas encore orthodoxe, je refusais de me laisser
entraîner dans un débat théologique.
    Je leur fis un salut.
    « Eh bien ! je crains de devoir vous quitter. Je
suis convoqué par lord Cromwell à Westminster. »
    Le jeune homme eut l’air impressionné et Pepper chercha à ne
pas sembler l’être. Avec un petit sourire en coin, j’enfourchai Chancery et me
mêlai à nouveau à la cohue. Les avocats étant les pires colporteurs de ragots
que Dieu ait placés sur cette terre, cela ne ferait pas de mal aux affaires que
Pepper racontât au palais de justice que j’avais été reçu en audience privée
par le premier secrétaire. Mais mon plaisir fut de courte durée, car, comme je
longeais Fleet Street, de grosses gouttes commencèrent à tomber sur la rue
poudreuse et, lorsque je passai sous Temple Bar [1] ,
poussée par un vent violent, une forte pluie me fouettait le visage. Je relevai
le capuchon de mon manteau, le maintenant serré pour me protéger de la
bourrasque.
    **
    Au moment où j’arrivai au palais de Westminster, des nappes
de pluie torrentielle se plaquaient contre moi en rafales. Les rares cavaliers
que je croisais se recroquevillaient eux aussi dans leurs manteaux et nous nous
plaignions de concert du déluge qui nous trempait jusqu’aux os.
    Le roi l’ayant abandonné quelques années plus tôt pour son
magnifique nouveau palais de Whitehall, celui de Westminster n’était dorénavant
utilisé que pour abriter les tribunaux. La Cour des augmentations, où
travaillait Pepper, était une nouvelle création, instaurée pour s’occuper des
biens des maisons religieuses de moindre importance dissoutes l’année
précédente. Lord Cromwell et son entourage croissant y avaient aussi leurs
bureaux. C’était donc un endroit très peuplé.
    D’habitude, la cour grouillait d’hommes de loi en noir
occupés à discuter à propos de parchemins, ainsi que d’agents de l’État
palabrant ou complotant dans des recoins tranquilles. Mais ce jour-là elle
était presque vide, la pluie ayant poussé tout le monde à l’intérieur. Seuls
quelques hommes mal vêtus, dépenaillés, trempés de la tête aux pieds, se
blottissaient sous le porche de la Cour des augmentations : d’anciens
moines des établissements dissous venus supplier qu’on leur accorde les
bénéfices séculiers que la loi leur avait promis. L’employé de service devait
être parti ailleurs, peut-être était-ce messire Mintling. Un vieillard au
visage fier portait toujours le froc des cisterciens, la pluie ruisselant de
son capuchon. Le port de cet habit dans les bureaux de lord Cromwell ne l’aiderait
guère.
    Les anciens moines avaient en général la mine penaude, mais
ce groupe-là regardait d’un air horrifié des rouliers décharger de grands
chariots et en empiler le contenu contre les murs, maudissant la pluie qui leur
dégoulinait dans les yeux et dans la bouche. Je crus d’abord qu’ils apportaient
du bois pour le feu des employés, mais, lorsque j’arrêtai Chancery, je vis qu’il
s’agissait de châsses au couvercle de verre, de statues en bois ou en plâtre, ainsi
que de grandes croix de bois, finement sculptées et

Weitere Kostenlose Bücher