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Dissolution

Dissolution

Titel: Dissolution Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christopher John Sansom
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Mes
jambes tremblaient violemment. « Nous allons attendre dans votre cuisine. »
    Alice nous conduisit, Mark et moi, vers la petite pièce où
nous avions pris le petit déjeuner.
    « Vous allez bien, monsieur ? s’enquit Mark d’une
voix inquiète. Vous tremblez.
    — Oui. Oui.
    — J’ai une infusion d’herbes qui calme le corps quand on
a subi un choc, dit Alice. De la valériane avec de l’aconit. Je pourrais en
faire chauffer si vous le souhaitez.
    — Merci. Avec plaisir » Elle demeurait sereine, mais
ses joues avaient pris un étrange éclat, comme si elles étaient meurtries. Je
me forçai à sourire. « J’ai vu que la scène vous a affectée, vous aussi. C’est
compréhensible. On craignait que le démon lui-même ne se fût emparé de cette
malheureuse créature. »
    Je fus surpris par la colère qui apparut soudain sur son
visage.
    « Je ne crains pas les démons, monsieur, sauf les démons
humains qui ont tourmenté ce pauvre garçon. Sa vie a été détruite avant même de
commencer, et voilà ce qui doit toujours nous faire pleurer. » Elle se tut,
devinant qu’elle avait été trop loin pour une servante. « Je vais aller
chercher l’infusion », s’empressa-t-elle d’ajouter avant de sortir en hâte.
    Je levai les sourcils à l’adresse de Mark.
    « Elle a son franc-parler !
    — Elle mène une vie difficile. »
    Je triturai ma bague de deuil.
    « Comme beaucoup dans cette vallée de larmes. » Il
s’est entiché d’elle, me dis-je.
    « Je lui ai parlé, comme vous me l’aviez demandé.
    — Raconte-moi », fis-je d’un ton encourageant. J’avais
besoin d’oublier ce qui venait de se passer.
    « Ça fait dix-huit mois qu’elle est ici. Elle vient de
Scarnsea, son père est mort jeune et elle a été élevée par sa mère, une
guérisseuse qui dispensait des herbes.
    — C’est donc de là qu’elle tient son savoir.
    — Elle devait se marier, or son promis est mort dans un
accident en abattant des arbres. Il y a peu de travail en ville, mais elle
avait trouvé une place à Esher comme assistante d’un apothicaire, une
connaissance de sa mère.
    — Elle a donc voyagé. Je me doutais bien que ce n’était
pas une petite villageoise n’ayant jamais quitté son trou.
    — Elle connaît très bien la région. Je lui ai parlé des
marais. Elle affirme que des chemins existent si on sait où chercher. Je lui ai
demandé si elle accepterait de nous les montrer et elle ne m’a pas dit non.
    — Ça pourrait être utile. » Je lui parlai des
contrebandiers évoqués par le frère Gabriel, lui racontai mon équipée et l’accident.
Je lui montrai ma jambe boueuse. « S’il y a des chemins, le guide a intérêt
à faire bien attention. Sangdieu, quelle journée mouvementée ! » Ma
main, posée sur la table, tremblait. Je ne paraissais pas pouvoir arrêter les
tremblements. Mark était toujours pâle, lui aussi. Il y eut quelques instants
de silence, que je voulus soudain désespérément meubler.
    « Vous semblez avoir eu une longue conversation… Comment
a-t-elle échoué ici ?
    — L’apothicaire est mort, car c’était un vieil homme. Alors
elle est revenue à Scarnsea, mais sa mère est morte peu après, elle aussi. Elle
occupait sa maisonnette en vertu d’une copie du rôle et le propriétaire l’a
reprise. Alice s’est retrouvée sans feu ni lieu. Elle était désemparée, puis
elle a appris que l’infirmier cherchait une assistante laïque. Personne en
ville ne voulait travailler pour lui – on l’appelait le lutin noir – mais elle
n’avait pas le choix.
    — Je n’ai pas l’impression qu’elle éprouve beaucoup d’admiration
pour nos saints frères.
    — Elle dit que certains sont des hommes lubriques et qu’ils
cherchent tout le temps à la toucher en catimini. Elle est la seule femme jeune
de l’endroit. Apparemment, le prieur lui-même l’a importunée. »
    Je haussai le sourcil.
    « Mordieu ! elle a vraiment parlé à cœur ouvert…
    — Elle est en colère, monsieur. Le prieur s’est montré
importun dès son arrivée.
    — J’ai remarqué, en effet, qu’elle ne l’aimait pas. Fi
donc ! l’homme est un hypocrite qui punit les péchés des autres tout en
pourchassant les servantes. L’abbé est-il au courant ?
    — Elle en a informé le frère Guy qui a forcé le prieur à
cesser de la harceler. L’abbé intervient rarement. Comme il approuve la stricte
discipline maintenue par le prieur, il lui

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