Don Juan de Tolède, mousquetaire du Roi
davantage.
Dirigeons-nous vers l’hôtel de la rue Saint-Sauveur.
Les affligés ont pleuré, les cœurs fervents ont prié, mais maintenant, il faut agir.
D’Artagnan doit parler à Son Éminence. Il s’agit de tirer des constats et de prendre les mesures qui s’imposent, quels que soient les sacrifices à payer.
Dernier espoir
« Sire, revenons à nos événements.
Il est tard, votre Majesté, et je tiens à vous tenir en haleine, avant de terminer demain le récit de ces aventures, aussi vais-je aller aux faits, avec brutalité.
Après que Bastoche m’eut informé en grande part de cette histoire que je viens de vous raconter – une histoire ainsi titrée dans les mémoires de l’auteur : La Critique engage la Mort pour tuer le poète –, tout le monde vient se réunir autour de moi.
Car tous ont appris ce qui venait de se passer, en cet hôtel voilé de deuil.
Je prends la parole et j’informe la communauté.
Son Éminence ne peut se réjouir, surtout devant sa fille, mais il doit être soulagé d’apprendre la mort d’Hyppolite de Lanteaume. Don Juan de Tolède, par son action d’éclat, lui a rendu tout compte fait un précieux service, un service qu’il va payer de sa vie. Lanteaume n’est plus, il n’ira pas offrir sa tête au panier de son, mais Amadéor prend sa place.
La nouvelle tombe comme un couperet.
Et il faut régler la chose au plus tôt.
Cette usurpation d’identité est impardonnable, sacrilège.
On ne peut en rire. Et pour qu’on en rît point, la hache punira la fautif. Oui, la hache, Son Éminence accorde cette faveur à son ancien ami. Mort plus noble que la corde, mort exceptionnelle pour un homme qui n’est qu’un aventurier sans naissance.
Margaux, l’Alouette, Marie de Mazarin, s’effondre en larmes.
Finalement, ce don Juan aura tout fait pour elle. Dire qu’elle doutait de lui, de sa loyauté ! Hercule, lui, est fort étonné d’apprendre la mort prochaine de son mécène, étonné et attristé au plus haut point. De même, il est fort surpris de voir pendre son médaillon au cou de cette si jolie femme, qui a son âge.
— Son cadeau d’adieu, dit l’Alouette en prenant le pendentif dans sa main.
— Pas de victoire sans larmes, dit Son Éminence, qui s’évertue à masquer ses émotions. Mais pas de victoire, si on ne peut la prouver. Il reste encore une pièce à trouver : la deuxième moitié du parchemin.
Je rapporte les derniers mots de Lanteaume : Main-gauche …
Serait-ce une piste ?
— Passons un marché, dit aussitôt Marie de Mazarin, redevenant l’Alouette frondeuse. Votre Éminence, dit-elle à son père, si l’on vous rapportait cette pièce manquante, si vous pouviez ainsi faire tomber toute une cabale, accepteriez-vous de gracier le condamné ?
— C’est envisageable, répond le cardinal.
Mais qui pourrait encore se lancer dans une telle recherche ?
Toutes les voix, tous les bras se lèvent de concert.
Hercule de Maisonneuve, Edmond de Villefranche, moi-même, sans oublier l ’ Alouette. Mazarin refuse de laisser sa fille courir ce risque. Pas maintenant.
— Je ne vous demande pas d’autorisation, répond-elle. Je suis la seule à savoir où Main-gauche aurait pu se rendre. Je doute qu’il soit parti fort loin. Je sens qu’il rôde dans les parages, je le connais, mieux que personne. Ce jeune homme, dit-elle en désignant Hercule, et ces messieurs, poursuit-elle en nous montrant Edmond de Villefranche et moi-même, se chargeront de ma protection, n’ont-il pas déjà fait leurs preuves ?
Le cardinal ne trouve rien à dire.
Il a consenti au marché, et il doit accepter que sa fille continue de mener sa vie comme elle l’entend, il ne fera pas d’elle une prisonnière, ni une fille soumise. Quoi qu’il puisse dire ou faire dorénavant, elle restera en partie celle qui fut jadis la protégée et l’élève de Lanteaume, l’insaisissable brigand. Ne fallut-il pas le trahir pour le prendre ?
— Eh bien soit, je cède, dit Son Éminence. Je vous donne jusqu’à midi demain, pas une minute de plus. Je me trouverai dans la rue des Marmousets, à peu de distance, donc, de la place de Grève où se déroulera l’exécution. Si vous n’aviez rien à m’offrir avant ces douze coups de midi, je ne pourrais retenir la hache de l’exécuteur.
Ainsi soit-il.
Majesté, je crois entendre les pas de madame la reine, votre mère, approcher de votre chambre. Il est temps de nous dire à demain, pour un
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