Douze
la poutre contre les battants. Celui qui tentait de les ouvrir fut totalement pris au dépourvu et les portes se refermèrent dans un claquement. Je n’avais que quelques instants avant qu’il se ressaisisse. Je ne pouvais pas à la fois m’appuyer contre les battants et utiliser la poutrelle pour les fermer de façon définitive. Je cessai de peser sur les portes et glissai la poutrelle entre les deux poignées de fer, craignant à tout moment que les portes s’ouvrent en grand avant que je les aie sécurisées. Ce ne fut pas le cas et, la poutre désormais en place, cela ne risquait plus de se produire. Je repris ma respiration.
Je savais que je devais partir, que j’avais autant à craindre du feu que les vampires eux-mêmes, mais je ressentais le besoin d’attendre, de m’assurer qu’ils avaient péri. Je m’assis sur les marches. Presque immédiatement, j’entendis quelqu’un cogner contre les portes. Au début, c’était le battement rapide de quelqu’un qui exigeait de l’attention, puis ce fut le bruit sourd, plus lent, plus lourd, d’une épaule tentant de briser une barrière. La porte tint bon. Bientôt, il y eut des quintes de toux. Je pouvais voir de la fumée commencer à filtrer sous la porte. Je me rappelai l’une des histoires de ma grand-mère, dans laquelle un voordalak pouvait se transformer en brume ou en fumée à volonté. Cela pouvait-il être vrai ? Si c’était le cas, ils en auraient certainement déjà fait la démonstration. La toux ainsi que le martèlement n’avaient pas cessé, je me sentis donc en sécurité.
Le feu était très proche désormais, et je me décidai à partir. Tandis que je commençais à remonter les marches, les coups sur les portes reprirent au rythme rapide qui réclamait l’attention. Maintenant, entre les quintes de toux, ils étaient accompagnés d’un cri tourmenté.
— À l’aide ! À l’aide !
Je ne pus m’empêcher de sourire à l’idée que Iouda ou Ioann, lequel que ce soit, allait mourir dans de telles souffrances après ce qu’il avait infligé à d’autres. Je n’eus pas conscience que le cri était en russe. Rapidement, la voix perdit la force même de crier. J’entendis le bruit d’un corps s’affaler au sol et les cris se muer en prière.
— Mon Dieu, ayez pitié de moi.
C’est seulement à ce moment-là que je reconnus la voix de Dimitri.
Chapitre 15
Je me précipitai en bas de l’escalier et levai la poutre qui barrait les portes. Instantanément, elles s’ouvrirent avec violence et le corps à demi-conscient de Dimitri s’effondra sur le sol. Au même moment, je fus atteint par un mur de fumée et de chaleur qui se conjuguaient pour rendre toute respiration impossible.
La cave était en feu. Les flammes dansaient à travers le plafond de bois et les poutres qui le soutenaient étaient presque carbonisées. D’ici peu, le toit allait s’effondrer. Un des cercueils était totalement embrasé, l’autre — où je pouvais tout juste distinguer le corps endormi de Ioann — était déjà noirci par les flammes. Il avait été traîné depuis sa position d’origine vers la porte, de sorte que les pieds de Dimitri le touchaient presque.
Je me penchai sur Dimitri. Il respirait de façon superficielle. Le dos de ses mains, ainsi que ses avant-bras, étaient brûlés. Sur le côté droit de son visage, sa barbe avait disparu pour révéler sa cicatrice, demeurée intacte alors que le reste de sa joue s’était boursouflé sous l’intense chaleur. Je l’aurais giflé pour essayer de le ramener à lui mais, compte tenu de ses blessures, je choisis de le secouer par les épaules.
Il se mit à tousser et ouvrit les yeux.
— Peux-tu marcher ? demandai-je.
— Oui, oui.
Il s’assit avec difficulté.
— Nous devons sortir, et vite !
Je revins vers les portes. L’escalier par lequel j’étais descendu commençait à se consumer. Par endroits, son plafond était déjà en feu. Il était encore praticable et c’était, de toute façon, la seule sortie dont nous disposions.
— Allez, dis-je en me retournant vers Dimitri.
— Donne-moi un coup de main ! (Dimitri s’était enfoncé dans la cave. Ses mains étaient crispées sur l’une des poignées du cercueil de Ioann et il tentait de toutes ses forces de l’amener à la porte. Dans sa faiblesse, Dimitri n’était pas en mesure de le déplacer, même d’un pouce.) Nous devons les faire sortir d’ici !
Même si j’avais souhaité sauver les
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