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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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n’est pas juste. Et pourtant, tes mains sont douces
comme celles d’une vestale.
    — C’est que ma mère m’a appris à les soigner. En
Egypte, même les filles les plus pauvres savent prendre soin de leur corps et
garder leur beauté. Pas comme ces Romaines. (Les yeux fermés, je pouvais
imaginer la mine qu’elle faisait.) Elles se fardent le visage, elles y mettent
des crèmes comme on met du mortier pour tenir les briques.
    — C’est vrai, les Romains manquent de style, et les
Romaines de grâce. Ils sont devenus trop riches, trop vite. C’est un peuple
grossier et vulgaire, tout maître du monde qu’il soit. Il y eut un temps où les
gens savaient se tenir. Quelques-uns n’ont pas oublié.
    — Comme toi.
    — Moi ? Je n’ai pas de manières. Ni d’argent, d’ailleurs.
Tout ce que j’ai, c’est une femme, une chatte et une maison que je ne peux pas
entretenir. Non, c’est à Cicéron que je pensais.
    — D’après ta description, il est assez laid.
    — Oui, Bethesda. Cicéron n’a rien qui puisse t’intéresser.
    — Mais le jeune garçon…
    — Non, Bethesda. Rufus Messalla est trop jeune, même
pour ton goût, et beaucoup trop riche.
    — Je veux dire le jeune esclave, celui qui est venu de
la part de son maître, celui que tu as vu avec la fille. Comment était-il sans
ses vêtements ?
    — Je l’ai à peine vu, et rien des parties qui
pourraient t’intéresser.
    — Comment sais-tu ce qui m’intéresserait ?
    Les yeux clos, je les revoyais plaqués au mur, emportés par
le rythme endiablé d’une sarabande qui excluait le reste du monde. La main de
Bethesda se glissa sous ma tunique.
    — Qu’est-il arrivé ensuite ? Ne me dis pas qu’ils
ont été surpris, ça me ferait de la peine.
    — Ne t’inquiète pas pour eux.
    — As-tu fait comprendre au garçon que tu les avais vus ?
    — Non, je suis retourné au jardin où j’ai retrouvé
Cicéron et Rufus avec Cæcilia Metella, tous les trois bien sombres. Nous avons
causé un peu, puis Tiron est arrivé, l’air gêné. Cicéron n’a pas fait de
commentaires. Personne n’a soupçonné quoi que ce soit.
    — Bien sûr que non. Ils croient tout savoir, et pensent
qu’il n’y connaît rien, puisqu’il est un simple esclave. Tu n’as pas idée des
choses qu’un esclave peut accomplir sans se faire prendre.
    Une boucle de cheveux frôla ma joue. Je m’en emparai pour
respirer le parfum du henné et des plantes aromatiques.
    — Crois-tu que je sois un ignorant, Bethesda ?
    — Non. Toi, tu sais. Rien ne t’étonne.
    — C’est que je suis méfiant de nature, et j’en rends
grâce aux dieux.
    Bast ronronnait très fort. Je reposai confortablement mes
épaules sur les cuisses de ma bien-aimée.
    — Comme tu es fatigué, murmura-t-elle, veux-tu que je
te chante quelque chose ?
    — Oui, Bethesda. Quelque chose d’apaisant, dans une
langue que je ne connais pas.
    Sa voix était comme une eau dormante, pure et profonde. C’était
une chanson que je n’avais jamais entendue. Une berceuse que sa mère lui
chantait, peut-être. A moitié endormi, je restais contre elle, et des images
épouvantables défilaient dans ma tête sans m’atteindre. Je revoyais les
gladiateurs ivres, les embaumeurs, et les coups de poignard donnés dans la rue
ce matin-là, et le visage de Tiron tout empourpré. Je voyais un vieillard
attaqué dans une ruelle, blessé à mort. Je voyais un homme nu, ligoté, fouetté,
couvert d’excréments, puis cousu dans un sac avec des animaux vivants.
    La berceuse prit fin, puis ce fut un autre chant. Je le
connaissais celui-là, sans en comprendre davantage les paroles. Il faisait
partie du répertoire de séduction. Tout en l’écoutant, je savais que Bethesda
se déshabillait, libérant son parfum musqué. Bientôt nous fûmes côte à côte.
Elle releva ma tunique jusqu’à la taille, comme l’avait fait pour Tiron la fille
de Sextus Roscius, et se pencha sur moi. Je gardai les yeux fermés lorsqu’elle
m’avala, et même lorsqu’à mon tour je la soulevai, roulai sur elle et la
pénétrai. C’était le corps de Bethesda que j’étreignais, mais derrière mes
paupières closes, c’était l’autre fille que je voyais nue, souillée par la
semence d’un esclave.
    Longtemps nous restâmes accolés, immobiles, nos chairs comme
fondues par la sueur et la chaleur. La chatte, qui avait disparu momentanément,
revint se blottir dans le désordre de nos jambes. Quand

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