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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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au
ventre ; il aura mis la main à sa blessure. Il s’est dégagé, espérant
peut-être que cette porte s’ouvrirait, mais il est tombé à genoux. Le vrai
massacre a eu lieu là-bas, en pleine rue. Il sera parvenu à se redresser, à
faire deux ou trois pas avant d’être abattu…
    — Peut-être que les esclaves se sont battus avec les
agresseurs, suggéra Tiron.
    J’imaginais plutôt leur fuite éperdue à la vue des
poignards. Je me penchai de nouveau pour examiner l’empreinte. La grande porte
frémit et s’ouvrit sur la rue. Je la reçus en pleine figure. De l’intérieur,
une voix retentit.
    — Quoi ! Encore un vagabond couché devant ma porte !
Je te ferai fouetter ! Bouge-toi de là, que je puisse ouvrir.
    Nouvelle secousse. Je bloquai la porte du pied pour pouvoir
me relever.
    Une figure fripée apparut. La porte s’ouvrit largement,
vibrant sur ses gonds et se rabattit contre le mur, bloquant l’entrée du
cul-de-sac.
    — Oh, ce n’est pas un vagabond, grogna l’homme en me
toisant de haut en bas. Mille excuses.
    Il n’y avait pas l’ombre d’un regret dans sa voix.
    — C’est ton magasin ? demandai-je.
    — Bien sûr que c’est mon magasin. Depuis la mort de mon
père, encore, longtemps avant que tu aies du poil au menton. Et il était à son
père avant lui.
    Le vieux louchait sous l’éclat du jour et se rencogna à l’intérieur.
    — Tu n’ouvres que maintenant ? dis-je en le
suivant. Il est tard.
    — Je suis chez moi. J’ouvre quand je suis prêt.
    — Quand il est prêt  ! cria une voix quelque part à
l’arrière.
    Après la lumière aveuglante du dehors, je tâtonnais comme un
aveugle dans cette espèce de couloir.
    — Quand il est
prêt ! C’est quand j’arrive à le tirer du lit, oui ! Quand moi, je suis prête. Un de ces jours, je
ne prendrai plus cette peine. Je resterai couchée tranquillement, moi aussi. Et
alors, je te le demande, qu’est-ce qu’on deviendra ?
    — Tais-toi, la vieille !
    L’homme trébucha, un panier se renversa, des olives se
répandirent sur le sol. Tiron s’avança et se mit à les ramasser.
    — Qui c’est, celui-là ? Ton esclave ? fît le
vieux en allongeant le cou.
    — Non.
    — Il en a tout l’air. Tu ne veux pas le vendre ?
    — Je te dis : il n’est pas à moi.
    — Nous en avions un, avant. Rien que pour nous. Et puis
mon imbécile de fils l’a affranchi. C’est lui qui ouvrait le matin. À mon âge,
quel mal y aurait-il à se reposer un peu ? C’était un vrai fainéant, c’est
sûr, mais pas trop voleur. Il aurait dû rester, affranchi ou pas. Un affranchi
vous doit des obligations, tout le monde sait ça. C’est maintenant qu’on en a
besoin. Mais il est quelque part en Apulie. Y s’est trouvé une femme.
Libérez-les, et la première chose qu’ils font, c’est de pondre comme les gens
bien. Ouais, c’est lui qu’ouvrait la porte. Et même pas voleur avec ça.
    Pendant qu’il déblatérait, mes yeux s’habituaient à l’obscurité.
La boutique était en triste état, sale et poussiéreuse. Les étagères n’étaient
qu’à demi garnies. Je soulevai le couvercle d’une jarre d’argile et en tirai
une figue sèche, piquetée de moisi. Il flottait un relent aigre dans toute la
pièce, avec la pointe d’acidité des fruits pourris.
    — Pas trop voleur ? Et qu’est-ce que t’en sais ?
fit la voix criarde de la femme.
    Je la voyais à présent, entortillée dans un châle sombre,
qui s’employait à hacher quelque chose derrière son comptoir. Elle ponctuait
chaque mot d’un coup de couteau.
    — Toi, le vieux, t’as tout oublié. T’as la tête comme
une passoire. Ce bon à rien de Gallius, il volait tout le temps ! Je lui
aurais bien fait trancher les mains pour vol, mais à quoi bon un esclave sans
mains ? On pourrait même plus le vendre. Et qui voudrait d’un voleur, sauf
aux mines et aux galères ? Non, Gallius ne valait rien. On est bien mieux
sans lui.
    — Bon, vous voulez acheter quelque chose, ou c’est pour
écouter les sottises de la vieille ?
    Je cherchai de l’œil quelque chose de mangeable.
    — En fait, ce sont les dessins sur la porte qui ont
attiré mon attention…
    — Ah, c’est Gallius qui nous a laissé ça. Il avait du
talent, pour un esclave, même s’il était sacrément fainéant. Et pas trop voleur
en plus.
    — J’en ai remarqué un différent des autres, vers le bas :
une main.
    Le visage de l’homme se

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