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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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construction
relativement récente. La façade aveugle se trouvait déjà barbouillée de slogans
électoraux (car les élections se poursuivirent, sans grande conviction il est
vrai, sous la dictature de Sylla). Plus représentatifs étaient les graffitis
obscènes, sans doute laissés par les clients comblés de la Maison aux Cygnes
que je survolais dans l’espoir qu’Elena y serait mentionnée.
    Une volée de marches conduisait à la porte, ouverte à la
chaleur du matin. Deux couloirs partaient sur la gauche. L’un menait à une cage
d’escalier qui grimpait au second, l’autre desservait sur toute la longueur du
bâtiment une série d’alcôves drapées de lambeaux d’étoffe.
    Un grand maigre, assis au bout à même le sol, se déplia et
vint à notre rencontre. C’était le gardien. Chaque immeuble en possède un,
parfois un par étage – en général un résident qui gagne trois as
auprès des locataires ou du propriétaire pour surveiller les affaires en leur
absence et tenir les étrangers à l’œil.
    — Citoyens, dit-il en se mettant au garde-à-vous.
    Il était encore plus grand de près, avec une barbe poivre et
sel et une lueur farouche dans le regard.
    — Citoyen, répondis-je. Je cherche une femme.
    Il sourit bêtement.
    — Comme nous tous.
    — Elle s’appelle Polia.
    — Polia ?
    — Oui. À l’étage, il paraît.
    — Polia ? répéta-t-il en se frottant le menton.
    — Une jeune veuve, avec son fils. Le garçon est muet.
    Le type haussa exagérément les épaules, retournant lentement
la paume de sa main droite.
    Tiron m’avait devancé et farfouillait dans ma besace. Il en
retira quelques as de cuivre, mais je lui fis signe d’attendre. Penché sur
nous, l’échalas fixait son poing fermé avec une cupidité non dissimulée.
    — Y a-t-il bien une femme du nom de Polia qui habite
ici ?
    Il inclina la tête. Tiron lui tendit une première pièce.
    — Est-elle dans sa chambre à présent ?
    — J’en sais rien. Elle est au second. Une grande
chambre avec porte et tout et tout.
    — Une porte qui ferme à clef ?
    — Pas assez bien pour aller y voir de plus près.
    — Ce qui signifie que je dois m’adresser au gardien à l’étage,
n’est-ce pas ? Je ferai mieux de garder ma monnaie pour lui.
    Je me dirigeai vers l’escalier.
    Il me retint d’une main preste.
    — Citoyen, attends. Ne va pas jeter ton argent par les
fenêtres. C’est un bon à rien, qui picole toute la journée. Avec la chaleur qui
fait, il doit être en train de roupiller. Inutile de le déranger. Tiens, je m’en
vais te montrer moi-même, simplement, faites pas de bruit dans l’escalier.
    Il grimpa quatre à quatre, exagérément juché sur la pointe
des pieds, et semblait perdre l’équilibre à chaque pas. Comme prévu, l’autre
était endormi en haut des marches : un petit bonhomme rondouillard adossé
au mur, une outre de vin reposant sur le genou, avec sa bouteille dressée
obscènement entre ses courtes cuisses. Le géant l’enjamba en levant le nez.
    Le couloir était faiblement éclairé par deux lucarnes à
chaque extrémité. Le plafond était si bas que notre guide se courbait en deux
pour éviter les poutres. A un moment, Tiron fit craquer le plancher ; il
se retourna et nous supplia à mains jointes. Il s’arrêta à mi-chemin et toqua à
la porte, surveillant à chaque coup le gardien endormi. Décidément, ce petit
ivrogne possédait des pouvoirs de représailles invisibles au commun des
mortels.
    Après un temps, la petite porte s’entrebâilla d’un doigt.
    — Oh, c’est toi, fit
une voix de femme. Je t’ai déjà dit mille fois, c’est non. Tu ne peux pas me laisser tranquille ? Il y a
cinquante autres femmes dans l’immeuble.
    Le géant me regarda et rougit comme un jouvenceau.
    — Je suis pas seul. Tu as de la visite.
    — De la visite ? Pas… ma mère ?
    — Non. Un homme. Et son esclave.
    On l’entendit respirer.
    — Pas ceux de la dernière fois ?
    — Mais non. Ils sont là, à côté de moi.
    La fente s’ouvrit d’un brin, juste assez pour révéler le
visage de la veuve d’une oreille à l’autre.
    — Qui êtes-vous ?
    Au bout du couloir, l’ivrogne se retourna pesamment,
heurtant la bouteille entre ses jambes, qui partit en roulant vers l’escalier.
    — Par Hercule ! suffoqua le géant qui se précipita
sur la pointe des pieds.
    Le temps d’arriver au palier, la bouteille entamait sa
descente, cognant chaque

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