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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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son lit, pâle
et défaite, mais résolue. Le roi se dressa entre les courtines du lit, l’épée
haut levée.
    — Vous m’avez trahi, madame ! Où est ce
bâtard qui ne doit point survivre à votre honte ?
    — Mon ami, n’avez-vous donc pas le respect du
deuil qui vient de nous frapper ?
    — Quel deuil ? demanda-t-il en regardant
autour de lui d’un air égaré.
    Il vit alors la nacelle, les cierges, les dames
qui l’entouraient en grande affliction. Il s’approcha, contempla la petite
momie au visage défiguré et verdâtre, insoutenable à voir. Il baissa son épée, sa
colère tomba d’un coup, épouvanté par ce qu’il voyait. Il ne savait plus
soudain ce qu’il faisait dans cette chambre.
    — Où suis-je ? dit-il.
    Une ventrière le désarma avec douceur, tandis que
les dames l’entraînaient dans le corridor. Il ne cessait de répéter :
« Où suis-je ? Que fais-je là ? Où m’emmenez-vous ? »
    Elles le remirent entre les mains de ses valets et
chevaliers, tandis que le glas se mettait à résonner à la chapelle privée de l’hôtel
de Barbette.

26
Plus ne m’est rien
    Plus, entre les crimes, on tient un rang sublime,
    Moins aux regards publics on peut cacher son crime.
    Juvénal des Ursins
    Le mardi 22 novembre, le fils d’une cuisinière
fut porté en l’abbaye de Saint-Denis, auprès des rois de France, où il fut
inhumé sous le nom de Philippe. La reine, que l’on croyait désolée de cette
mort, se désolait plus encore pour sa fille. Que faire d’elle, puisqu’elle n’avait
aucune existence officielle ? Elle était une princesse de Valois, fille
de roi, et nul sort ne pouvait être plus cruel.
    La duchesse d’Anjou, qui avait emporté l’enfant, vint
lui rendre visite et n’eut pas le temps de lui en donner des nouvelles tant la
reine était mortifiée de cet échange de nourrissons : « Hier, j’étais
trop épuisée pour m’y opposer, lui dit-elle. J’aurais su apaiser le roi, il n’aurait
pas occis sa propre chair. Avec l’aide de Dieu, j’aurais retenu son bras. »
    Mais il était trop tard, et Yolande d’Aragon était
une femme prompte à prendre une décision. « Mieux vaut la croire morte, songea-t-elle,
qu’exilée sans remède de sa place et de son rang. »
    — Madame, lui murmura-t-elle, votre fille s’est
éteinte cette nuit.
    — Ainsi le Seigneur l’a reprise. A-t-elle été
baptisée ?
    — Sans tarder, madame ! Dès que je fus à
l’abri en mon hôtel. Jeanne est avec les anges.
    Isabelle pleura longtemps dans les bras de Yolande
d’Aragon.
     
    Le mercredi 23 novembre, jour de la
Saint-Clément, la reine, se portant mieux, invita son beau-frère à souper. Elle
était en son mois de relevailles, ce n’était pas convenable, lui firent
remarquer les dames de son entourage.
    — L’urgence n’a cure des convenances, elles
ne sont plus de mise. J’ai à m’entretenir avec le régent des choses du
gouvernement.
    Mais elle avait plutôt besoin de joyeuseté dans
son affliction. La légèreté de son ancien amant seule pouvait y parvenir.
    — Madame, lui dit Nicolette, si vous n’avez
cure des convenances, dites au moins à monseigneur le duc qu’il vienne avec une
bonne escorte armée, et qu’il s’en retourne de même.
    — Qui crains-tu donc ? Jean sans Peur ?
Je crois savoir qu’ils sont réconciliés.
    — C’est ce que l’on croit savoir, madame. Mais
les rues sont de vrais coupe-gorge en ce moment.
    — Fort bien, Nicolette, je lui donnerai ce
conseil.
    — Exigez, madame, pour la sauveté du prince.
    Isabelle fut étonnée de cette insistance.
    — Que sais-tu donc, Nicolette, que je ne sais
point ?
    — C’est… c’est frère Agreste, madame, mentit-elle.
Il ne cesse de voir des flots de sang sous vos fenêtres.
    Isabelle soupira en souriant.
    — Voilà qu’il est redevenu voyant. Bien, je l’exigerai,
autant que l’on puisse exiger quoi que ce soit de mon beau-frère.
    Louis d’Orléans vint en voisin, juché sur une
simple mule, en toute petite escorte. Il était si souriant qu’Isabelle oublia
les alarmes de Nicole de Cholet. Il lui offrit moult cadeaux, et la
félicita sans vergogne de sa bonne mine, alors qu’elle se savait encore défaite.
    Ils soupèrent en tête à tête, en bonne amitié. Il
rayonnait de confiance en lui et en l’avenir, lui assurant que ses querelles
avec son cousin étaient derrière eux. Il fit rire la reine par des anecdotes
désobligeantes sur

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