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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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se rendre chez son
trésorier régler une dette de jeu que son oncle lui réclamait avec insistance. Son
oncle prétextait qu’il devait quitter Paris tôt le lendemain pour Poitiers, et
qu’il fallait régler cette affaire d’urgence. Maudite soit la rapacité de ce
mauvais duc qui l’avait distrait de la fête ! Alors, il aurait su qu’ordre
avait été donné de ne point approcher une flamme du charivari. Et le départ de
son oncle n’était pas si pressant puisqu’il l’avait différé après la tragédie.
    Le prince marchait à grands pas dans le froid vif
de janvier, sa main droite était bandée et lui faisait un mal de chien, car la
chair était à vif. Tout en se glissant par la porte dérobée qui communiquait
avec les jardins des Célestins, il songeait à la douleur effroyable des
courtisans, brûlés ainsi sur tout le corps. Personne ne pouvait y survivre. Il
se dirigea vers le cloître, où il passerait une couple d’heures dans la
solitude de la cellule qui lui était réservée.
    Débauché autant que croyant, Louis subissait le
champ de bataille de ses contradictions. Pourquoi Dieu avait-il créé la
jouissance s’il fallait s’en abstenir ? Il songea à Isabelle. Lui
garderait-elle rancune de sa mortelle maladresse ? Allait-elle mettre fin
à son courtisement alors qu’elle était prête à se rendre ? Du moins le
croyait-il, tant elle se plaisait à se laisser mignarder. Il la désirait plus
que jamais, c’était son obsession, sa frustration. Il violait là le
commandement de Dieu : « Tu ne commettras pas d’adultère. »
Fallait-il qu’il se fasse moine à vingt et un ans ? Isabelle attendait à
nouveau un enfant, alors que Valentine s’aigrissait dans son attente stérile. Il
était vrai qu’il la délaissait, il était fatigué de ses crises de jalousie, de
la violence de leurs accouplements, et il était peu pressé de la voir ce jour d’hui
car elle le presserait d’aigres questions pour savoir pourquoi, ou surtout pour
qui, il avait quitté le bal. Après avoir fait oraisons, il ne se rendrait pas à
son hôtel, mais directement chez le roi qui l’avait convié après complies. Il n’y
aurait de convives que le duc de Berry et le duc de Bourgogne. C’était
un conseil de famille qui se tiendrait à ce souper.
    *
    — Tu appelles ton chien et il tarde, alors tu
le corriges. Tu l’appelles encore, il tardera bien davantage sachant ce qui l’attend.
    À l’hôtel de la Pute-y-Muse, Capucine, assis en
tailleur dans le vaste lit où se désolait Valentine, tentait de la consoler
alors qu’elle ne cessait de pleurer.
    — Je t’entends, Louis est un chien ! lança-t-elle
avec emportement en tordant son mouchoir.
    Dans le chauffedoux où le fou d’Orléans étouffait,
elle gisait en chemise, les cheveux emmêlés, comme toujours pendant ses crises
de désespoir. Elle avait chassé ses dames italiennes qui l’épuisaient à
ressasser le drame du Bal des Ardents, et l’imprudence de son époux.
    — Mais, quand le chien te rejoint, poursuivit
Capucine, si tu le caresses et lui donnes récompense, même s’il a bien tardé, il
sera plus prompt alors à te revenir, sachant toujours ce qui l’attend.
    — Que veux-tu me faire entendre avec tes
histoires de chien ?
    — Que Louis n’est guère pressé d’essuyer tes
fureurs, belle dame. Et qu’il va chercher ailleurs les douceurs que tu lui
refuses.
    — Mais je l’aime, sanglota-t-elle de plus
belle.
    — Mais tu te gardes bien de le lui dire.
    — Faut-il que je m’humilie davantage ?
    — C’est toi qui t’humilies à vouloir qu’il te
punisse alors que tu jouis. Si l’enfant tarde, c’est qu’un enfançon ne veut pas
être le fruit de la punition.
    Valentine ouvrit de grands yeux noyés de larmes. Elle
semblait ne pas comprendre.
    — N’est-ce pas ce que mon époux désire ?
Que désirent tous les hommes ?
    — Et comment le sais-tu, s’aventura le nain
avec précaution, as-tu connu charnellement tant d’hommes que cela ?
    Le visage de la jeune femme se ferma.
    — Comment oses-tu ?
    — Il faudrait plutôt dire, comment a-t-il osé ?
    — De qui parles-tu ? répondit-elle en se
mettant à trembler.
    — Je ne t’oblige en rien à me révéler ton
secret, douce dame, mais Louis d’Orléans n’est pas Jean-Galéas Visconti.
    Valentine cacha son visage entre ses mains en
poussant un long gémissement. Le nain n’avait pas eu de mal à deviner, la
duchesse n’était

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