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Elora

Elora

Titel: Elora Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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Elle plongea son visage entre ses mains. Hoqueta.
    — Je les hais. Je les hais de ce qu’ils m’ont forcée à devenir… À faire…
    Hugues de Luirieux jubila. Reprendre l’avantage, rappeler à Enguerrand de Sassenage le bon vieux temps, la manière dont il était encore capable de dompter les rebelles, voilà l’enjeu. Il s’adoucit.
    — Je veux des aveux, Fanette. Complets. Tu les signes et tu auras ta vengeance…
    Elle leva la tête, en larmes.
    — Et la liberté ?
    — Et la liberté.
    Déjà il avançait une plume trempée dans l’encrier et une feuille sur le bureau, griffonnée d’une écriture qu’elle était incapable de déchiffrer. Il avait tout préparé. Avait-elle d’autre choix que d’accepter ? Elle tergiversa pourtant.
    — Je ne sais pas lire…
    La voix se fit tranchante.
    — Signe !
    Elle était prête à s’y résoudre lorsque Enguerrand arrêta sa main tremblante.
    — Elle ne signera rien que je n’aie validé, Luirieux.
    Fanette retrouva un peu d’espoir à le voir prendre le document à sa place, l’examiner. Elle regagna des couleurs lorsqu’il le déchira avant de le jeter à la face du prévôt, crispé.
    — Emmène-la, Dumas. Fanette est sous mon unique protection désormais.
    Un sourire mauvais balaya la face de Luirieux. Il ne tenta rien pour s’y opposer. La porte n’était pas refermée qu’Enguerrand écrasait ses poings sur le bois du bureau pour éviter de le frapper.
    — Les temps ont changé, Luirieux. Et moi avec. Tu veux cette bande, tu l’auras, puisque la contrée a tout à y gagner, mais ce sera à mes conditions.
    Luirieux haussa les épaules, nullement impressionné. Il se savait en position de force. En ce lieu il représentait l’autorité. Un seul mot et ces trois-là se retrouvaient au cachot et au secret.
    — Tu aurais dû rester où tu étais, chevalier.
    — Sous la lame de ton épée, je suppose…
    Luirieux se leva à son tour. Ils s’affrontèrent du regard par-deçà la table.
    — Dix ans. Tu as plutôt bonne mine pour un revenant. Tu ne crois pas qu’il est temps de tirer un trait sur le passé ?
    — Jamais…
    Luirieux ricana.
    — Si tu crois pouvoir sauver cette putain, je ne ferai rien pour t’en empêcher. Elle t’égorgera dans ton sommeil. C’est ce qu’elle fait le mieux.
    — Tu mens… Ce document n’est qu’un ramassis de mensonges !
    Luirieux s’emporta :
    — Alors quoi, qu’est-ce que tu crois, que j’ai monté ça de toutes pièces pour te contrarier ? Que je t’attendais ? Dis-toi bien que s’il y a une chose qui n’a jamais pesé sur ma conscience, c’est ce que je vous ai fait, à toi et à Mounia.
    Incapable de résister plus longtemps à l’appel de sa haine, Enguerrand le saisit au col et le coucha violemment sur le plateau de hêtre, lui piquant la gorge du poignard qu’il avait arraché à sa ceinture. Impavide, le prévôt ricana.
    — Je l’aimais. Autant que toi, alors vas-y, goûte au sang comme j’y ai goûté et tu comprendras enfin à quel point j’ai joui de ma vengeance. Vas-y ! Tue-moi.
    La lame trembla d’impatience dans la main du chevalier. Il avait espéré ce moment-là dix années durant. Pas une nuit de sommeil sans rêver d’elle. Pas une seule. Le souffle court, la poitrine déchirée, il chercha une raison, juste une, de laisser vivre ce monstre. Il n’en trouva pas.
    Pourtant sa main retomba. Il s’écarta, rangea sa lame et recula d’un pas, le timbre brisé d’un effort surhumain.
    — Tu mourras, Luirieux. Tu mourras dans les pires souffrances, je t’en fais la promesse. Mais pour l’heure, je n’ai d’autre choix que de m’allier à ton combat. Voici ce que nous allons faire. Et si Fanette s’avère coupable, fais-moi confiance, elle non plus n’en réchappera pas.
    *
    Cette nuit-là, Fanette dormit en paix dans une des souillardes du château de la Bâtie, un sourire léger flottant sur ses lèvres. L’idée de recourir à Enguerrand pour confondre ses anciens compagnons de misère était la meilleure qui soit. Bien sûr, le prévôt questionnerait Villon et Mathieu. Mais Enguerrand le lui avait promis, quoi qu’ils disent pour la punir de les avoir fait prendre, il avait négocié son pardon. Elle jouissait dès à présent d’une impunité totale et avant longtemps retrouverait les siens. Pour le remercier, elle avait offert de servir Enguerrand à la Rochette. Le chevalier avait accepté et même souri en lui

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