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En ce sang versé

En ce sang versé

Titel: En ce sang versé Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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affaires très pressantes m’ont retenu.
    La flagornerie porta et de Trais, radouci, commenta :
    — Quand même… Ah ça, monsieur… vous m’ôtez un affreux poids de la poitrine. Le merci. Je me suis longuement entretenu avec madame la baronne Mahaut. Une telle douceur, une telle crainte au sujet de son fils… une femme ainsi constituée ne peut être sorcière et enherbeuse. Ne doutez pas que ma charge me fait côtoyer tant de faux pleurs, tant de mensongères défenses. Aussi, ardu de me prendre au piège des jolies mines et protestations d’innocence.
    Guy de Trais remplit leurs verres de cristal taillé avant de poursuivre :
    — Mais alors, qui, quoi ? Méchaud n’ajoute plus foi en cette hypothèse de fièvre de ventre qui n’aurait décimé que les mâles de la lignée directe ?
    — Je ne sais, un complot, peut-être. Cependant, avec votre permission, j’entends le découvrir. Madame Mahaut a pu former intuition de femme à ce sujet ? Mère affolée fait redoutable limier.
    — Impitoyable, voulez-vous dire ! Il me faudrait ôter des griffes d’Énora, mon épouse, quiconque manifesterait vils instincts envers notre fils, avant qu’elle ne le réduise en charpie, ronronna-t-il d’admiration.
    — Avec mon respect, on dit votre épouse fort belle, d’admirable nature et bien pieuse.
    — Et on a belle raison ! Elle est également très distrayante. Cependant, le guerrier sang celte coule dans ses veines.
    — Bah, qui souhaite épousailles avec une capone ?
    — De juste ! Monsieur… Venelle, c’est cela ?
    — Hardouin Venelle, pour vous servir.
    Guy de Trais émit un long soupir désolé, puis :
    — Monsieur, détestable affaire en vérité, où des gens de haut s’affrontent, expliquant que je ne puisse commettre de bévue.
    — Bévue fort dommageable, renchérit l’exécuteur des hautes œuvres.
    — En effet. Toutefois, je n’ai pas le sentiment que vous soyez familier de madame Mahaut.
    — Seul cet injuste soupçon me l’a fait connaître, de réputation.
    — Le mieux ne serait-il pas que vous la rencontriez afin de vous forger une opinion à son sujet ? Je m’écarterai, ne souhaitant pas que ma favorable présomption à son sujet vous influence, suggéra le bailli de Nogent.
    Hardouin retint son souffle. Enfin, la voir, lui parler, l’assurer qu’il veillait sur elle. Enfin, rencontrer cette autre Marie de Salvin. Il aurait donné sa fortune pour un tel privilège, et ne voilà-t-il pas que le sort le lui offrait ? Le destin, encore et toujours, le portait vers elle. S’efforçant au calme, redoutant que sa voix ne trahisse son impatience, il déclara :
    — Ma foi, messire, une entrevue peut éclairer.
    — Bien. Êtes-vous prêt à m’accompagner jusqu’au château Saint-Jean ?
    — Maintenant ? s’affola Hardouin, songeant stupidement qu’il n’avait pas changé son vêtement de course en forêt.
    — Si fait. Battons le fer tant qu’il est rouge, lança Guy de Trais en se levant et en fonçant vers la porte de son bureau. Un gens d’armes nous précédera afin de prévenir madame Mahaut… qu’elle se vête, le cas échéant.
    1 - Au sens de rangé, enfermé.

XXIX
    Nogent-le-Rotrou, décembre 1305,
 un peu plus tard
    A h, Dieu du ciel, un miracle. Marie. Marie se tenait devant lui, l’air embarrassé, baissant les yeux, crispant ses longs doigts pâles sur le crucifix d’améthyste qui pendait à son cou, voilé d’une seyante gorgerette 1 . Hardouin en avait le cœur serré au point que sa poitrine le blessait. La suffocante émotion qu’il ressentait lui troublait le jugement. Il s’admonesta. Il devait la sauver, et ses effarouchements de donzelle ne l’aideraient guère. Après avoir présenté Hardouin, Guy de Trais venait de quitter la geôle, ou plus exactement le confortable appartement qu’il avait attribué à la jeune baronne.
    — Madame, je… je suis confus d’une si tardive venue et…
    — Non, monsieur… Votre pardon… vous me voyez en cheveux 2 , je… n’ai point eu le temps de les natter. J’ai passé à la hâte une cotte et… Quel encombre, qu’allez-vous penser… ?
    Cette voix, la même que celle de Marie. Grave, chaude, une voix qu’on aurait davantage prêtée à une brune. Une voix qui donnait à Hardouin une folle envie de s’agenouiller devant elle, de lui baiser la main. Quant à la soie vivante de ses cheveux de blé mûr qui lui tombaient à mi-cuisses, il aurait donné sa

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