Excalibur
permettrai pas ici. Nos anciens Dieux nous
suffisent, Derfel, aussi pourquoi en aurions-nous d’autres ? La moitié des
ennuis que connaissent les Bretons vient de là. Ils ont perdu leurs Dieux.
— Pas
Merlin », dis-je.
Ma remarqua
porta. Aelle se tourna vers l’ombre d’un arbre et je lus de l’inquiétude sur
son visage. Il avait toujours craint Merlin. « J’ai entendu certaines
rumeurs, se hasarda-t-il.
— Les
Trésors de Bretagne.
— Qu’est-ce
que c’est ?
— Peu de
choses, Seigneur Roi, dis-je avec une certaine franchise, juste une collection
de vieux objets dépenaillés. Seuls deux d’entre eux ont une véritable valeur :
une épée et un chaudron.
— Tu les
as vus ? demanda-t-il d’un air farouche.
— Oui.
— Que
feront-ils ? »
Je haussai les
épaules. « Personne ne le sait. Arthur croit qu’ils ne feront rien, mais
Merlin dit qu’ils commandent aux Dieux et que s’il accomplit la bonne magie au
bon moment, les anciens Dieux de la Bretagne exécuteront ses ordres.
— Et il
lâchera ces Dieux contre nous ?
— Oui,
Seigneur Roi », répondis-je, et cela arriverait bientôt, très bientôt,
mais cela, je ne le dis pas à mon père. Aelle se renfrogna. « Nous avons
aussi des Dieux.
— Alors,
invoquez-les, Seigneur Roi. Laissons les Dieux combattre les Dieux.
— Les
Dieux ne sont pas idiots, mon garçon, grogna-t-il, pourquoi combattraient-ils
alors que les hommes peuvent s’entre-tuer à leur place ? » Il se
remit en marche. « Je suis vieux, me dit-il, et de toute ma vie, je n’ai
jamais vu de Dieux. Nous croyons en eux, mais se soucient-ils de nous ? »
Il me lança un regard inquiet. « Tu as foi en ces Trésors ?
— Je
crois au pouvoir de Merlin, Seigneur Roi.
— Mais à
la descente les Dieux sur terre ? » Il y réfléchit un moment, puis
secoua la tête. « Et si vos Dieux venaient, pourquoi les nôtres ne
viendraient-ils pas pour nous protéger ? Même toi, Derfel, déclara-t-il d’un
air sarcastique, tu aurais peine à lutter contre le marteau de Thunor. » Il
m’avait mené à l’orée du bois et je vis que son escorte et nos chevaux étaient
partis. « Marchons, dit Aelle, et je te dirai tout sur la Dumnonie.
— Je
connais la Dumnonie, Seigneur Roi.
— Alors
tu sais, Derfel, que son roi est un imbécile, et que celui qui la gouverne ne
veut pas être roi, pas même être un, comment appelez-vous cela, un kaiser ?
— Un
empereur, dis-je.
— Un
empereur », répéta-t-il, ridiculisant ce mot par sa prononciation. Il me
fit prendre un sentier qui longeait la forêt. Il n’y avait personne d’autre en
vue. Sur notre gauche, le sol descendait en pente jusqu’à la plaine embrumée de
l’estuaire, alors qu’au nord s’étendait une grande forêt humide et froide. « Tes
chrétiens se rebellent, résuma Aelle, ton roi est un infirme imbécile et ton
chef refuse de lui voler le trône. À la longue, Derfel, et plus tôt que tard,
un autre homme voudra ce trône. Lancelot a failli s’en emparer, et un homme
plus valable que lui essaiera bientôt. » Il se tut, les sourcils froncés. « Pourquoi
Guenièvre lui a-t-elle ouvert les cuisses ? demanda-t-il.
— Parce
qu’Arthur ne voulait pas devenir roi, dis-je sombrement.
— Alors,
c’est un idiot. Et l’année prochaine, cet idiot sera mort, à moins qu’il n’accepte
ma proposition.
— Quelle
proposition, Seigneur Roi ? » demandai-je en m’arrêtant sous un hêtre
d’un rouge flamboyant.
Il fit de même
et mit les mains sur mes épaules. « Dis à Arthur de te donner le trône,
Derfel. »
Je regardai
mon père dans les yeux. Durant un battement de cœur, je crus qu’il plaisantait,
puis je vis qu’il était aussi sérieux qu’on puisse l’être. « Moi ?
demandai-je, étonné.
— Toi,
répondit Aelle, et tu me jureras fidélité. Je veux m’emparer du pays, mais tu
peux dire à Arthur de te donner le trône et tu gouverneras la Dumnonie. Mon
peuple s’y établira et cultivera la terre, et toi, tu les gouverneras, mais en
roi vassal. Nous formerons une fédération, toi et moi. Le père et le fils. Tu
gouverneras la Dumnonie et je gouvernerai l’Angleterre.
— L’Angleterre ? »
demandai-je, car ce mot était nouveau pour moi.
Il ôta les
mains de mes épaules et montra la campagne. « Ça ! Vous nous appelez
Saxons, mais toi et moi, nous sommes des Angles. Cerdic est Saxon, mais toi et
moi sommes des
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