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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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passant la main à l'intérieur de sa veste :
    —    Tu as parfois du mal à le croire, mais je t'aime, ce qui est bien naturel entre membres d'une même famille. Alors je ne garderai pas un pistolet braqué sur ta tempe. Cela me tentait de te montrer ce que c'était, te courber sur un bureau pour te baiser bien à fond, comme tu l'as fait à Marie. Avec cette signature, tu as maintenant un aperçu de ce qu'elle a vécu.
    Il jeta la feuille sur le bureau, avant de préciser :
    —    Toutefois, si jamais tu me fais de la misère, je viendrai ici et je te donnerai une raclée à laquelle tu ne survivras pas.
    Sans un mot de plus, il se dirigea vers la porte. En sortant, Alfred adressa à son frère un salut du bout des doigts, sans se retourner.
    Présenter un plan aussi improbable à son frère était une chose, amener Marie à y jouer son rôle en était une autre. Alfred quitta le grand magasin sans tarder pour se rendre à la maison de chambres de la rue Grant. La jeune domestique répondit à ses coups à la porte mais quand il demanda à parler à l'une des locataires, elle s'esquiva en murmurant: «Je vais dire à Madame de venir.» Un moment plus tard, la veuve Giguère apparut devant lui.
    —J'aimerais m'entretenir avec mademoiselle Buteau, répéta-t-il.
    —    Vous êtes monsieur Picard, n'est-ce pas ?
    La question était de pure forme, elle le croisait tous les dimanches à l'église.
    —    Oui. Jusqu'à tout récemment, j'étais son supérieur immédiat.
    —    D'habitude, je ne laisse pas mes invités recevoir de visiteur, ou de visiteuse dans le cas des messieurs. Mais si c'est pour le travail, je peux faire une exception.
    Elle s'écarta pour le laisser passer, puis le conduisit au petit salon.
    —    Si vous voulez attendre, je monte la chercher.
    Alfred acquiesça d'un signe de tête. Laissé seul, il prit place sur une chaise près d'un guéridon. Après quelques minutes, Marie vint le rejoindre, l'air un peu gêné.
    —    Voulez-vous que je vous apporte du thé ? offrit la propriétaire.
    —    C'est très aimable à vous, mais non merci. Nous parlerons
    du travail un moment, sans plus.
    La propriétaire ferma la porte en se retirant. Le chef de rayon fit signe à la jeune femme de prendre place sur la chaise près de la sienne, puis murmura :
    —    Se peut-il qu'elle nous écoute de l'autre côté de la porte ?
    —    ... Je ne pense pas, répondit Marie dans un sourire.
    —    A tout le moins, elle monte bien la garde pour empêcher les intrus de venir perturber son petit troupeau.
    L'homme regarda autour de lui les fauteuils un peu usés mais de bonne qualité, les quelques livres placés sur une étagère, dont tous les titres auraient certainement reçu l'aval du curé de la paroisse et le piano droit portant encore les feuilles de musique des chansons joyeuses du temps des fêtes.
    —    Vous êtes bien installée, ici.
    —- Quand je suis arrivée, je croyais que ce serait mon petit paradis terrestre, l'endroit où me réfugier après de longues journées de travail. Je devrai quitter tout cela bientôt...
    Chaque fois qu'elle faisait allusion à son état, sa main se portait machinalement à son ventre.
    —    Comme vous devrez partir, le mieux est de vous assurer que vous irez dans un logis aussi confortable que celui-ci. Hier vous êtes venue dans ma vieille maison. Vous a-t-elle semblé habitable ?
    —    ... Que voulez-vous dire ?
    —    C'est ma façon bien maladroite de vous proposer le mariage.
    Marie demeura interdite, ses grands yeux sombres dans les siens, puis elle souffla :
    —    Vous êtes cruel, de vous moquer de moi ainsi.
    —    Je ne me moque pas. Je suis très sérieux. Je vous offre un domicile un peu plus sombre qu'ici, mais j'espère en changer bientôt pour le mieux. Puis je prendrai soin de l'enfant de mon frère.
    La jeune femme demeura songeuse, chercha ses mots un moment, puis commença:
    —    Si ce qu'on raconte au magasin est vrai, vous êtes...
    Le silence s'installa entre eux. Finalement, le visiteur continua :
    —    Vous n'arrivez pas à trouver un mot qui ne soit pas trop vulgaire pour dire la chose ? Dans les textes savants, on parle d'inverti. Dans ceux qui ne font pas dans la délicatesse, on utilise parfois le mot bougre. Mais votre frère, le vicaire, dirait sans doute pervers.
    —    C'est vrai ?
    —    Oui, et en même temps un peu plus compliqué que cela. Si

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