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Faubourg Saint-Roch

Titel: Faubourg Saint-Roch Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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de la rue Saint-François, le mauvais état de la chaussée rendait impossible la moindre expédition familiale. Le dernier dimanche de mars, Thomas ne trouva rien de mieux à faire que de se pencher sur les plans de l'atelier de confection de manteaux de fourrure qu'il entendait inaugurer au milieu de l'été. Les autres Picard cherchaient à s'occuper grâce à des livres. Au moins, les derniers apprentissages des enfants leur donnaient ce loisir. Si jamais ils s'en lassaient trop vite, la proximité de l'église permettait de les conduire aux vêpres. Pareille possibilité rendait intéressantes même les publications les plus austères.
    Vers trois heures, de petits coups contre la porte de la bibliothèque amenèrent Thomas à lever la tête pour inviter la visiteuse à entrer.
    —    Papa, je voudrais te parler, murmura Eugénie d'un ton hésitant, arborant la mine d'une personne condamnée à une démarche intimidante.
    —    Assieds-toi dans l'un de ces fauteuils, je te rejoins.
    Un moment plus tard, Thomas prit place à son tour près de la fenêtre.
    —    Nous sommes rendus au printemps, commença-t-elle.
    —    Depuis une bonne semaine, même si cela ne paraît pas quand nous regardons dehors, constata son père.
    —    ... Il faudrait faire les démarches, au sujet du couvent.
    L'homme laissa échapper un long soupir de lassitude. Le caractère plus intime de ses rapports avec Elisabeth, depuis quelques semaines, réduisait encore son enthousiasme à enfermer sa fille dans un pensionnat. Seule la présence de ses deux enfants dans la maison rendait légitime celle de la jeune femme.
    —    La rentrée scolaire n'aura lieu qu'au mois de septembre.
    —    Mais j'ai vu dans le journal un encadré invitant à faire les inscriptions.
    Apprendre à lire à des enfants ne présentait pas que des avantages. Les institutions d'enseignement commençaient déjà à engranger leur moisson de nouveaux élèves pour la prochaine année. La chose ne pouvait passer inaperçue aux yeux de l'enfant, et surtout pas à ceux de sa mère.
    —    Cela ne signifie pas que nous devons nous précipiter.
    —    Tu ne vas pas tenir ta promesse ?
    Eugénie présentait un visage buté, un pli vertical au milieu du front, une moue hésitant entre la bouderie et les larmes
    sur les lèvres.
    —    Je tiens toujours mes promesses. Si tu n'as pas changé d'idée, tu entreras chez les ursulines en septembre prochain. C'est dans cinq mois. Viendras-tu pleurer comme cela tous les dimanches en attendant ce moment ? Cela signifie plus de vingt dimanches.
    Cette fois, les larmes coulaient sur ses joues. D'une voix plaintive, elle déclara encore :
    —    Maman m'a dit que tu mentais. Que jamais tu ne voudras me laisser partir.
    Un peu plus, et elle ajoutait «à cause d'elle». Thomas réussit à maîtriser le timbre de sa voix pour répondre :
    —    C'est cruel de sa part de dire des choses semblables, mais nous devons lui pardonner tous les deux, car elle est malade. Cependant, toi, tu ne devrais pas croire de pareilles sottises, encore moins les répéter.
    Un long moment de silence suivit l'admonestation, marqué de petits sanglots. A la fin, elle s'esquiva, laissant son père bouillant de colère.
    Deux jours plus tard, Thomas rentra un peu tard, à cause de la tenue d'une réunion du Parti libéral. Plutôt que de l'accueillir avec le plateau de son souper, Joséphine vint lui dire dans la salle à manger :
    —    Monsieur, votre femme a demandé à vous voir dès votre arrivée.
    —    Cela peut certainement attendre après le repas.
    —    Elle semblait très... excitée.
    Cette information lui donnait d'autant plus envie d'ajourner un tête-à-tête susceptible de lui faire perdre l'appétit.
    C'est en soupirant qu'il monta à l'étage et frappa à la porte de la chambre surchauffée de sa femme, pour l'ouvrir tout de suite et demander :
    —    Tu veux me voir ? Si c'est pour cette histoire de couvent. ..
    —    Ce n'est pas cela. L'un de mes bijoux a disparu.
    —    ... Tu me fais manquer mon souper pour me dire cela ? Cherche-le.
    Déjà, il esquissait le geste de sortir, aussi lança-t-elle d'une voix étonnamment forte pour une personne qui se déclarait à l'article de la mort depuis l'expédition dans Charlevoix :
    —    J'ai cherché, Joséphine aussi. Je te dis qu'il a disparu.
    —    Que puis-je y faire? De toute façon, je doute que tu planifies

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