FBI
prêt à courir ce risque, et les responsables du FBI entérinent la fin de « Coldwater ».
Avant d’arrêter les membres de la famille Bonanno visés par « Coldwater », le FBI tente une ultime manœuvre. Une réunion a lieu avec Joe Pistone, Ed Robb et leurs supérieurs, dont Jules Bonavolonta, en présence d’un profileur de la Behavioral Science Unit, l’unité du FBI chargée d’étudier le crime et les criminels. Les deux agents fournissent au profileur tous les détails sur les personnalités de Sonny Black et de Lefty Ruggiero, afin de déterminer lequel des deux serait le plus à même de collaborer avec le Bureau : « La peur d’être assassiné, ajoutée à la promesse d’une protection à vie dans le cadre du Programme de protection des témoins, fera-t-elle craquer d’abord Sonny ou Lefty ? » Telle est la question posée au profileur.
Pour bien connaître les mafieux, Joe Pistone sait qu’aucun des deux ne craquera. En revanche, il pense qu’il faut attaquer Sonny Black en premier. Sait-on jamais, peut-être le capitaine commettra-t-il un faux pas ? Peut-être téléphonera-t-il à Paul Castellano, le chef suprême de la mafia new-yorkaise, dont il est proche, permettant ainsi au Bureau d’ouvrir une enquête ?
Les agents du FBI mettent au point un plan d’attaque. Joe Pistone et Ed Robb posent pour une photo en compagnie de l’agent Doug Fencl, dont Sonny Black disait qu’il était « un gentleman ». Les deux agents infiltrés sourient en brandissant leur badge du FBI. Le 28 juillet 1981, Doug Fencl et deux autres Agents spéciaux rendent visite à Sonny Black, au Tahitian Motor Lodge. Par souci de discrétion, les agents ont choisi de frapper à la porte du parrain avant 6 heures du matin.
« Sonny, tu connais un type qui s’appelle Donnie Brasco ? » demande Doug Fencl, mentionnant le nom d’emprunt de Joe Pistone.
Puis il lui tend la photo.
« Regarde, le quatrième gars à partir de la gauche. Tu le reconnais ? Tu savais que Brasco était un agent du FBI ? »
Doug Fencl remet au parrain sa carte de visite.
« Que crois-tu qu’il va se passer, Sonny, quand ils vont apprendre que ton ami Donnie est un agent du FBI ? Tu peux me téléphoner nuit et jour au numéro que je t’ai donné…
– Doug, tu sais bien que je ne peux rien faire. C’est fini ! »
Sonny Black tente alors de sauver la face. Quelques heures plus tard, les micros du FBI enregistrent une conversation entre Black et ses hommes : « Donnie a été kidnappé par les Feds. Les Feds sont venus chez moi et ont essayé de me faire croire qu’il était un agent du FBI… » Puis Black envoie ses hommes à la recherche de Joe Pistone, à New York, en Floride, à Chicago, à Milwaukee, en Californie. Ils écument tous les endroits fréquentés par Pistone/Brasco. Ils interrogent leurs informateurs au sein des polices locales et d’État, en quête de la moindre piste. Au bout de dix jours, Sonny Black se résout à accepter l’inacceptable. Il passe deux coups de fil afin de rendre publique la nouvelle. Il appelle d’abord Santo Trafficante, puis Paul Castellano. Prudents, les deux parrains ne disent rien.
Le 17 août 1981, Sonny Black est convoqué chez un des parrains de la Famille, dans le quartier des Flatlands, à Brooklyn. Avant de partir, il remet tous ses bijoux à son barman favori ; il lui recommande de nourrir ses précieux pigeons et lui confie les clefs de sa maison. Puis il téléphone à sa petite amie : « Je laisse mes papiers, mes clefs et ma voiture ; je pars pour un rendez-vous. Je ne reviendrai pas. » On retrouvera son cadavre, un an plus tard, enterré à l’angle de South Avenue et de Bridge Street, à Staten Island, dans l’État de New York. Entre-temps, treize de ses hommes auront été éliminés.
Tony Daniels, le coordinateur du programme « Criminalité organisée » du bureau du FBI de Tampa, n’a pas résisté au plaisir d’aller remettre lui-même à Santo Trafficante sa convocation devant les tribunaux. Mais, d’appel en renvoi, l’affaire traîne en longueur. Trafficante est finalement acquitté en juillet 1986. Il mourra quelques mois plus tard d’une crise cardiaque.
Joe Pistone a tenté de reprendre une vie normale d’agent du FBI sous haute protection. La Mafia a offert 500 000 dollars à qui le tuera. Les agents du Bureau sont allés chez les principaux parrains de la Cosa Nostra pour leur expliquer que, si jamais il
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