FBI
« J’ai pris la décision de garder John à New York pour qu’il se concentre sur le versant américain de l’affaire. On avait déjà plein de monde sur place ; moi-même, je m’y suis rendu plusieurs fois. À l’époque, je pensais que John nous serait bien plus utile aux États-Unis, centralisant toutes les informations et faisant jouer ses contacts. »
Le directeur adjoint du FBI Pat d’Amuro explique : « Le jour des attentats en Afrique orientale, j’étais de repos. D’habitude, ma femme prépare le café du matin. Mais, ce matin-là, c’est moi qui l’ai fait : nous allions rendre visite à ma famille, dans l’ouest de l’État de New York. J’ai allumé la télé et j’ai vu les explosions. J’ai dit : “Nous n’allons pas aller voir mes parents, nous n’irons probablement nulle part” – mais j’avais le pressentiment que j’allais devoir partir pour l’Afrique orientale. La nuit même, nous étions à bord d’un C5 en direction de Nairobi. Nous savions qu’Al Qaida y était déjà implanté. Pour cette opération, nous avons eu jusqu’à 500 à 600 agents travaillant à plus de 14 000 kilomètres de chez eux, dans un pays où nous n’exercions pas la moindre autorité. »
Une première dans l’histoire du FBI ! La plupart des agents envoyés en Afrique n’ont jamais mis les pieds hors des États-Unis ; certains même ont reçu des passeports seulement quelques heures avant leur départ pour le Kenya ou la Tanzanie. Rares étaient ceux qui avaient déjà entendu parler d’Al Qaida. Et tous, face aux ruines encore fumantes des ambassades, ont eu la même réaction : par où commencer ?
« Aussi bien en Tanzanie qu’à Nairobi, raconte Lewis Schilliro, la scène du crime était immense, mais, en travaillant conjointement avec les autorités locales, nous avons pu amasser assez de preuves pour monter un acte d’accusation. »
À New York, le SAC John O’Neil est sur les dents. Il sait que ce n’est qu’un début : Al Qaida va encore frapper. Il n’a pas droit à l’échec, alors que, de son côté, l’ennemi a droit à autant d’essais qu’il veut : il lui suffit de réussir une fois pour gagner.
« Les attentats d’Afrique orientale ont prouvé qu’Al Qaida était maintenant hors de contrôle et grandissait, explique Pat d’Amuro, directeur adjoint du FBI, alors responsable de la Joint Terrorism Task Force de New York1. D’après certaines estimations, ce sont entre 15 et 20 000 individus qui seraient passés par ses camps d’entraînement quelque part en Afghanistan. Les renseignements que nous avons collectés lors des attentats d’Afrique orientale et que nous avons partagés avec de nombreux services d’espionnage et de police ne suffirent toujours pas à convaincre nombre d’entre eux de l’imminence de la menace. Je n’ai pas convaincu assez de responsables politiques, dans ce pays, que c’étaient des actes de guerre qui étaient perpétrés, et que nous devions utiliser tous les moyens dans cette guerre contre le terrorisme. »
« Les attentats contre les ambassades étaient des actes de guerre directs. L’attaque d’une ambassade est bien un acte de guerre, et quand Ben Laden a déclaré la guerre aux États-Unis en 1996, il voulait dire la guerre, pas le Djihad ! » renchérit Dan Coleman.
Mais la riposte américaine n’est pas à la hauteur. En se fondant sur des informations fournies par Jamal al-Fadl, le président Clinton fait tirer des missiles de croisière sur une usine de produits pharmaceutiques au Soudan, censée fabriquer des armes chimiques pour Ben Laden. Mais les informations de Fadl remontent à deux ans, et Ben Laden a quitté le pays depuis belle lurette.
Au même moment, soixante-six missiles de croisière s’abattent sur deux camps militaires d’Al Qaida ; l’attaque fait des dizaines de victimes, mais manque sa cible principale, Oussama Ben Laden, qui se trouve alors à Kaboul.
À l’époque, les relations entre Bill Clinton et le directeur du FBI, Louis Freeh, sont quasi inexistantes. Le Président refuse même de parler au Directeur. Les deux hommes sont brouillés à mort.
Où l’on découvre un jeune agent pas comme les autres, Ali Soufan
Travailler avec John O’Neil n’est pas une sinécure. Le soir du passage au XXI e siècle, quand O’Neil se mêle à la foule qui se presse sur Time Square pour attendre minuit, le FBI vient de déjouer un attentat prévu pour ce
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