FBI
s’écrie-t-il. Ils veulent me tuer. Ne les laissez pas faire ! »
Dasch sera gracié deux ans plus tard et expulsé à destination du secteur américain de l’Allemagne occupée. Restée aux États-Unis avec leurs enfants, son épouse ira régulièrement rendre visite à « Monsieur Jack » pour qu’il aide son mari à rentrer aux États-Unis. Ses visites ne cesseront qu’à la mort de Dasch, sans que celui-ci ait jamais pu remettre les pieds sur le territoire américain.
SIS contre nazis en Amérique latine
Knoxville, Tennessee, mai 2008. Il y a, dans la carrière de Wallace F. Estill, matière à nourrir les meilleurs scénarios hollywoodiens. Cet homme est pourtant l’un des agents du FBI en tête des « abonnés absents » de l’Histoire. Une existence bien remplie au service du Bureau l’a conduit à traquer les agents nazis en Amérique latine, du fin fond de la jungle équatorienne aux côtes argentines. En Alaska, il a été le seul agent du FBI (et sans doute le seul être humain) à avoir arrêté quatre villages eskimos en même temps !
Pour le tirer de l’anonymat auquel il est voué, la section « Histoire orale » de l’Association des vétérans du FBI a entrepris de recueillir par téléphone le témoignage du vieil homme, qui vit à Knoxville (Tennessee).
Assis dans sa cuisine, Wallace F. Estill raconte sa vie pendant près de deux heures, sans faiblir. Son interlocuteur ne peut voir les grimaces qui, de temps à autre, déforment le visage du vieillard ; il ne se doute pas que, quelques minutes avant l’entretien, celui-ci est tombé et s’est fracturé le bras…
Quand Wallace F. Estill rejoint le FBI en 1942, son instructeur lui pose la question traditionnelle : compte-t-il parmi ses proches ou ses parents quelqu’un s’étant adonné à une activité subversive ? Le jeune homme répond : « Mon oncle a été pendu pour faits d’espionnage. » C’était pendant la guerre civile et ledit oncle s’était fait prendre derrière les lignes de l’Union avec des documents compromettants. Soulagement de l’instructeur, qui lâche : « C’est OK, fils ; moi aussi, je suis du Sud. »
Après douze semaines de classes et d’entraînement dans un bâtiment du Département de la Justice, près d’Union Station, à Washington, et sur la base des marines de Quantico, Wallace F. Estill rebondit à Buffalo, puis atterrit à Philadelphie. Après un stage de radio, le G-man part pour l’Équateur avec un dictionnaire d’espagnol et trois grosses valises pesant un âne mort et renfermant les pièces détachées et l’antenne d’un poste émetteur-récepteur « portable ». Wallace Estill fait désormais partie de la Special Intelligence Section (SIS), chargée du renseignement en Amérique latine, mission prévue dans les accords de non-agression signés avec l’armée et la marine américaines4.
Wallace Estill fait partie des 360 agents du FBI qui opèrent alors en Amérique latine. Ses collègues et lui peuvent se targuer d’avoir démasqué 887 agents secrets nazis (dont 389 furent arrêtés et 109 condamnés). Même taux de réussite en ce qui concerne les agents d’influence (60 arrestations pour 281 dénonciations) ou les contrebandiers (75 arrestations et 11 condamnations pour 222 trafiquants identifiés). Côté saboteurs, le FBI est encore plus efficace : 20 arrestations sur les 30 dépistés. Pourtant, le SIS reste une des sections les plus mystérieuses du FBI : ses faits d’armes sont toujours entourés de secret et les historiens n’ont pu se pencher sur ses activités que très récemment5.
Wallace Estill a une couverture : officiellement, il travaille dans les bureaux d’une mine d’or. Le FBI lui a assigné pour mission de démanteler les réseaux de trafiquants de quinine. « Après l’occupation japonaise des colonies hollandaises d’Indonésie, les Alliés n’ont plus de sources d’approvisionnement en quinine, explique Wallace Estill. Or la quinine était vitale pour les nombreux soldats alliés dépêchés dans des zones infestées par la malaria. Seul traitement, la quinine est extraite des fleurs du Cinchona , arbre originaire des Andes. » Les plantations andines de Cinchona sont dès lors des objectifs stratégiques pour l’effort de guerre américain. De leur sécurité dépendent les batailles à venir contre les Japonais. Wallace Estill et ses collègues en sont responsables.
Le quartier général de Wallace
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